Le latin: la langue de l'Église (4/5)

Le pape émérite Benoit XVI
Dans les précédents articles, nous avons vu que la langue latine est liée à l'identité de l'Église et aux traditions qui en font partie. Il serait impossible d'abolir l'usage du latin sans en même temps abolir les traditions qui font de nous des catholiques. Et pourtant, c'est ce qui s'est passé depuis la fin des années 1960. Non seulement on a abandonné le latin, mais une foule d'autres changements sont venus bouleverser la continuité qui existait depuis deux millénaires entre le temps des apôtres et notre époque moderne, unissant les chrétiens de tous les âges et de tous les lieux. Or cette continuité est l'une des caractéristiques propres au catholicisme. Dans cet article, nous verrons ce que le pape Benoît XVI a fait pour rétablir cette continuité qui avait été rompue par les influences modernistes.

Historiquement, on dénommait « modernisme » le courant anti-chrétien que l'on appelle aujourd'hui le libéralisme ou le relativisme. Au sein de l'Église, le modernisme voit les traditions millénaires comme des superstitions sans valeur, des reliques désuètes et des obstacles à l'œcuménisme. Les modernistes sont allés jusqu'à s'attaquer aux dogmes de l'Église, qu'ils voient également comme des superstitions. On a réussi à semer le doute dans l'esprit d'un grand nombre de catholiques, peut-être la majorité, sur l'autorité de l'Église, sur l'inspiration des Saintes Écritures, sur la divinité de Notre-Seigneur, sur la présence réelle dans la Sainte Eucharistie, sur l'existence du péché, de l'Enfer et des fins dernières, et sur la nécessité d'obtenir le salut pour aller au paradis.

On voit que l'abandon du latin s'inscrit dans le cadre d'un mouvement plus large visant rien de moins que la suppression de l'identité catholique afin de perdre le plus grand nombre de fidèles possible. Évidemment il n'y a pas de lien causal entre l'abandon du latin et les déboires de l'Église, mais il existe une convergence : les deux phénomènes sont le résultat de l'affront moderniste sur le catholicisme.

Le pape Benoît XVI a bien compris tout cela. Il a compris à quel point les traditions de l'Église sont liées aux dogmes et à la foi catholique. Les deux traits les plus marquants de son pontificat ont été son insistance sur la foi et ses efforts pour réformer la liturgie. Il a dénoncé la rupture qui s'est produite entre la tradition millénaire de l'Église et sa vie actuelle, rupture qui s'est traduite par un appauvrissement liturgique et doctrinal. Pour y remédier, Benoît XVI explique qu'il faut adopter vision de continuité avec la tradition.

Selon Benoît XVI, cette continuité avait été rompue dans la réforme liturgique post-conciliaire. Certains problèmes de rupture concernent la façon dont la réforme liturgique a été mise en œuvre : abus liturgiques, improvisation, abandon de la musique sacrée, etc. Benoît XVI est d'avis qu'il faut retravailler cette réforme liturgique pour retrouver la continuité avec la tradition. On parle alors d'une « réforme de la réforme ».

C'est dans cette optique que Benoît XVI a promulgué en 2007 le motu proprio Summorum Pontificum qui rend accessible à tous les catholiques la liturgie pré-conciliaire (la messe en latin ou messe tridentine). L'un des objectifs avoués de Benoît XVI est que l'ancienne liturgie exerce une influence sur la nouvelle pour la ramener en conformité avec la tradition et avec les souhaits du concile Vatican II exprimés dans Sacrosanctum Concilium. En effet, nous avons vu que la mise en oeuvre de la réforme liturgique est allée plus loin que ce que le concile avait mandaté.

Concrètement, le motu proprio autorise l'usage sans restriction des livres liturgiques qui étaient en vigueur en 1962. Désormais, tout prêtre peut offrir la messe tridentine, réciter l'ancien bréviaire en latin et administrer les sacrements selon les formules traditionnelles. L'ancienne liturgie est maintenant appelée « la forme extraordinaire du rite romain » et la nouvelle liturgie est considérée la forme ordinaire. Il est le souhait de Benoît XVI que tous les fidèles catholiques aient accès à la messe dans la forme extraordinaire côte-à-côte avec la messe ordinaire.

Un autre objectif de Benoît XVI était de réconcilier les traditionalistes de la Fraternité Saint-Pie X avec Rome. Cette fraternité est composée de catholiques qui ont toujours rejeté l'influence moderniste dans l'Église et qui tiennent à l'ancienne liturgie. Malheureusement, elle n'a pas de statut canonique et n'exerce aucun ministère légitime, de sorte que les fidèles catholiques doivent faire preuve de prudence à leur égard afin d'éviter de remettre en question leur propre unité avec le Saint-Siège.

Dès le début de son pontificat, Benoît XVI a libéralisé la messe tridentine dans un effort de répondre à l'une des demandes de la Fraternité Saint-Pie X. Malheureusement, ce geste n'a pas été suffisant et la Fraternité est demeurée à l'écart pour de raisons doctrinales concernant le concile Vatican II. Vers la fin de son pontificat, Benoît XVI avait entamé des pourparlers avec la Fraternité pour essayer de résoudre ces objections doctrinales. Les pourparlers ont achoppé et le pape a confié la suite à son successeur François.

Heureusement, les efforts de Benoît XVI n'ont pas été en vain, puisque d'autres catholiques, même ceux qui ne se considèrent pas des traditionalistes, ont pu grandement bénéficier du motu proprio Summorum Pontificum. Cette initiative du Saint Père a donné un nouveau souffle au mouvement de réforme qui cherche à ramener l'Église en continuité avec la tradition et depuis quelques années, les signes encourageants se multiplient.

Dans le prochain billet, j'offrirai quelques conseils pratiques pour redécouvrir et profiter de la tradition de l'Église.

Commentaires

  1. Et le Pape François utilise le Latin et le chant sacré à proffusion dans la liturgie! C'est beau à voir.

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