Après avoir examiné les deux impasses du rationalisme et du fidéisme, on peut aussi remarquer qu’autant historiquement que personnellement, on peut passer facilement d’un extrême à l’autre. Par exemple, je connais des personnes qui avait une approche plutôt rationnelles et qui, après quelques études théologiques, se sont réfugiées dans le fidéisme parce qu’elles ne parvenaient pas à rationnaliser tous le contenue proposé. À l’inverse, il arrive aussi qu’un croyant qui, souvent suite à une confrontation au sujet de sa foi, se mette à la recherche de ses raisons de croire et sombre dans le rationaliste en essayant de tout vouloir comprendre et résoudre tous les mystères divins.

En guise de solution, nous devons alors admettre que la foi n’est ni rationnelle ni irrationnel, mais qu’elle est plutôt transrationnelle (pour emprunter l’expression de Mgr Léonard). Une foi transrationnelle, c’est une foi qui, tout en gardant un lien avec la raison, sait aussi faire confiance en la Révélation. Comme le disant le Cardinal Barbarin au JMJ de 2005 : "Nous ne croyons pas pour des raisons, mais nous avons nos raisons de croire". La foi transrationnelle s’appuie donc sur la raison mais sans pour autant l’écraser.

Voici deux citations qui proposent un rapport saint entre foi et raison :
Lorsque la raison, éclairée par la foi, cherche avec soin, piété et modération, elle arrive par le don de Dieu à une certaine intelligence très fructueuse des mystères, soit grâce à l’analogie avec les choses qu’elle connaît naturellement, soit grâce aux liens qui relient les mystères entre eux et avec la fin dernière de l’homme ; jamais toutefois elle n’est rendue capable de les pénétrer de la même manière que les vérités qui constituent son objet propre. Car les mystères divins, par leur nature même, dépassent tellement l’intelligence créée que, même transmis par la révélation et reçus par la foi, ils demeurent encore recouverts du voile de la foi, et comme enveloppés dans une certaine obscurité, aussi longtemps que, dans cette vie mortelle, nous cheminons loin du Seigneur, car c’est dans la foi que nous marchons et non dans la vision. Mais, bien que la foi soit au-dessus de la raison, il ne peut jamais y avoir de vrai désaccord entre la foi et la raison, étant donné que c’est le même Dieu qui révèle les mystères et communique la foi, et qui a fait descendre dans l’esprit humain la lumière de la raison : Dieu ne pourrait se nier lui-même ni le vrai contredire jamais le vrai. Cette vaine apparence de contradiction vient surtout de ce que les dogmes de la foi n’ont pas été compris et exposés selon l’esprit de l’Église, ou bien lorsque l’on prend des opinions fausses pour des conclusions de la raison. Nous définissons donc que toute affirmation contraire à la Vérité attestée par la foi éclairée est absolument fausse. (Concile du Vatican I, Dei Filius)
Cela n'enlève rien au fait que le rapport actuel entre foi et raison demande un effort attentif de discernement, parce que la raison et la foi se sont toutes deux appauvries et se sont affaiblies l'une en face de l'autre. La raison, privée de l'apport de la Révélation, a pris des sentiers latéraux qui risquent de lui faire perdre de vue son but final. La foi, privée de la raison, a mis l'accent sur le sentiment et l'expérience, en courant le risque de ne plus être une proposition universelle. Il est illusoire de penser que la foi, face à une raison faible, puisse avoir une force plus grande; au contraire, elle tombe dans le grand danger d'être réduite à un mythe ou à une superstition. De la même manière, une raison qui n'a plus une foi adulte en face d'elle n'est pas incitée à s'intéresser à la nouveauté et à la radicalité de l'être. (Jean-Paul II, Fides et Ratio)
On peut voir que l’approche  qui est enseignée par l’Église se situe au centre des deux impasses du rationalisme et du fidéisme. Il revient aussi à chaque croyant d’y trouver un certain équilibre qui lui sera propre tout en sachant éviter ces impasses. Certain vont avoir besoin de plus de substance rationnelle tandis que d’autre trouveront que tout cet intellectualisme les éloigne de l’expérience réelle de Dieu qui nous dépasse.

Lorsque je regarde les gens de ma génération qui m’entourent et leur attitude en rapport avec la foi (sans nécessairement être croyant eux-mêmes), il y a une chose que j’ai souvent remarquée. Ils passent successivement dans ces deux impasses du rationalisme et du fidéisme et ils ont de la difficulté à demeurer équilibrés. Je crois que cette réaction vient surtout d’une certaine ignorance religieuse surtout au niveau des raisons de croire (ou apologétique). Étant ignorant qu’il existe des raisons de croire, ils sont alors condamnés au fidéisme. Un peu plus tard, lorsqu’ils vont tenter d’interroger leur foi avec leur raison, s’ils n’ont toujours pas reçu d’enseignement solide en ce qui concerne les raisons de croire, ils vont tenter de le faire en utilisant la vision souvent rationaliste et naturaliste reçue par leur éducation et opter pour une vision rationaliste. Finalement, on peut se rendre compte qu’une partie importante d’entre eux, devant la précarité spirituelle de ses deux positions, vont tout simplement devenir agnostique ou athée.

Si vous avez trouvé dans votre vie un certain équilibre sur cette question, vous êtes invité à partager votre solution avec les autres via commentaire.

Pour définir le fidéisme, on pourrait dire que c’est l’opposé du rationalisme. C’est le refus de confronter les données de la foi à la raison, comme si la foi ne reposait sur rien de rationnel et n’aurait rien à se faire justifier par la raison. La foi devient simplement une conviction personnelle que j’adopte parce que je veux bien l’adopter. Elle relèverait donc plus d’un volontarisme que d’une réalité à laquelle je devrais me plier. Une personne fidéiste refusera souvent de discuter des raisons pour laquelle elle croit, car elle a volontairement amputée la dimension rationnelle de sa foi. Elle se contentera de vous répondre une petite maxime du genre « Je crois parce que j’y crois », « la foi est une affaire personnelle », « vous n’avez pas vécu ce que j’ai vécu », etc.

Pour donner un exemple d’une vision fidéiste, je vais citer Martin Luther, une figure importante de la réforme protestante : «La raison, c'est la plus grande putain du diable ... qu'on devrait fouler aux pieds et détruire, elle et sa sagesse. Jette-lui de l'ordure au visage pour la rendre laide. Elle est et doit être noyée dans le baptême. Elle mériterait, l'abominable, qu'on la relègue dans le plus dégoûtant lieu de la maison, aux cabinets»*. Je ne veux pas dire par là que tous les chrétiens protestants ont nécessairement une approche fidéiste, mais je crois que cette phrase, malgré son langage vulgaire, représente bien cette position.

Pourquoi le fidéisme est-il aussi une impasse ? Parce que la foi n’a alors aucune base solide pour s’appuyer. La foi est considérée alors comme une affaire d’expérience et de sentiment personnelle. Comme la foi ne s’appuie sur rien de raisonnable, elle a de la difficulté à se communiquer à d’autres personnes et, devant cette absence de raisons, peut ensuite pousser les autres au relativisme ou à l’indifférence religieuse. Pour la personne elle-même, lorsque les bons sentiments ne sont plus ressentis et que les confrontations arrivent (croyez-moi elles arriveront tôt ou tard), on peut alors être tenté de les fuir et de se replier ou même de laisser tomber la révélation du Christ. Ce n’est pas pour rien qu’on peut lire dans la première lettre de Pierre : «Au contraire, sanctifiez dans vos cœurs le Seigneur Christ, toujours prêts à la défense contre quiconque vous demande raison de l'espérance qui est en vous».

Selon notre personnalité, certaines personnes sont plus naturellement portées vers l’une ou l’autre des ces impasses. Dans le prochain article, je vais tenter de d’expliquer comment on peut éviter ces deux extrêmes.

* La philosophie du droit de Martin Luther, Tome IV, p. 142

Commençons d’abord par définir ce qu’est le rationalisme. Le rationalisme se défini par une attitude qui, à priori, établi que Dieu ne peut pas exister, se révéler ou agir de la façon présenté par la religion. Dans sa forme la plus radicale, le rationalisme refusera tout élément surnaturel ou toute vérité qui ne se pliera pas à la raison humaine. Par exemple, une personne rationaliste pourrait lire les évangiles en tentant d’y expliquer tous les miracles opérés par Jésus de façon purement naturelle ou psychologique. Elle pourrait même tenter de lire la Bible en ignorant les passages qui contiennent des miracles. Ce que je viens de décrire doit rappeler à certains la démarche de plusieurs penseurs de l’époque des «Lumières». Comme par exemple, qui n’a pas entendu des exégètes expliquer le miracle de la multiplication des pains et des poissons par le fait que la foule aurait tout simplement partagé leur nourriture entre eux. Vous savez, cette miche de pain et ce poisson que l’on traine toujours dans sa poche, au cas ou…

Dans une approche un peu plus modérée le rationaliste sera plus intéressé à réutiliser des notions contenues dans les Évangiles, mais en les interprétants dans le champ de la raison. Ce qui les réduiront à une idéologie ou comme on aurait dit dans les temps plus ancien, à une certaine gnose (connaissance supérieure). Par exemple, plutôt que d’interpréter  ce contenu dans la règle ecclésiale (Écritures, Tradition et magistère), il va plutôt tenter de récupérer ce qui « fonctionne » avec son idéologie (que ce soit le marxisme, le syndicalisme, le pacifisme…) et tout simplement ignorer le reste qui lui plait moins ou s’oppose à son idéologie.

On peut retrouver bien des exemples de principes rationalistes qui ont été condamnés dans le syllabus du pape Pie IX en 1864:
  • §I, III : La raison humaine, considérée sans aucun rapport à Dieu, est l'unique arbitre du vrai et du faux, du bien et du mal : elle est à elle-même sa loi, elle suffit par ses forces naturelles à procurer le bien des hommes et des peuples.
  • §I, IV : Toutes les vérités de la religion découlent de la force native de la raison humaine ; d'où il suit que la raison est la règle souveraine d'après laquelle l'homme peut et doit acquérir la connaissance de toutes les vérités de toute espèce.
  • §I, V : La révélation divine est imparfaite, et par conséquent sujette à un progrès continuel et indéfini correspondant au développement de la raison humaine.
  • §I, VI : La foi du Christ est en opposition avec la raison humaine, et la révélation divine non seulement ne sert de rien, mais encore elle nuit à la perfection de l'homme.
  • §I, VII : Les prophéties et les miracles racontés dans les saintes Écritures sont des fictions poétiques, et les mystères de la foi chrétienne sont le résumé d'investigations philosophiques ; dans les livres des deux Testaments sont contenues des inventions mythiques, et Jésus-Christ lui-même est un mythe.
Quel est le problème du rationalisme qui mérite que je le définisse comme une impasse ? Le problème du rationalisme est, si seulement il permet à la divinité d’exister (déisme), qu’il l’enferme dans une mesure purement humaine et souvent naturelle. Dieu alors ne peut même plus être Dieu, il devient humain ou en est réduit à se confondre avec la nature. Ce qui résulte qu'au bout du compte, en ramenant Dieu à la mesure de l'homme, l'homme devient Dieu.

Est-ce que cela veut dire que le chrétien ne doit pas faire aucune place à la raison ? Absolument pas. Avant de tenter de définir une place convenable à la raison, j’aimerais, dans le prochain article, parler de l’autre impasse qui se trouve à son opposé : le fidéisme.

Le rapport entre la foi et la raison a toujours été présent dans l’histoire du christianisme. Tout chrétien sérieux arrive à des moments où il se remet en question et se demande la place qu’il devrait accorder à la raison et à la foi. Est-ce que la foi doit se placer au dessus de la raison ? Le contenu de la foi doit-il absolument être raisonnable ? Ou alors doit-on cesser de raisonner et se contenter de croire ? Y a-t-il un moyen de croire tout en demeurant raisonnable ?

Je ne vais pas prétendre pourvoir répondre de manière absolue à toutes ces questions dans les prochains articles. Je crois qu’il revient à chaque personne de trouver dans sa vie le point où il juge qu’il est arrivé à une saine relation entre la foi et sa raison. Certaines personnes font plus facilement confiance et d’autre ont besoin de plus de raisons pour croire.

Ce que je veux présenter dans les prochains articles, ce sont les deux impasses à éviter en ce qui concerne le rapport entre la foi et la raison. Je les appelle des impasses, parce je ne crois pas qu’elles sont des positions saines pour une vie chrétienne enrichissante et épanouissante. De plus, chacune à leur façon, elles privent l'être humain d'une des facettes importantes de son être.

Voici les deux impasses :
-         Le rationalisme
-         Le fidéisme

Dans le prochain article, nous débuterons avec une réflexion sur le rationalisme.
Luc  2, 1-14


En ces jours-là, parut un édit de l'empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre - Ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. - Et chacun allait se faire inscrire dans sa ville d'origine. Joseph, lui aussi, quitta la ville de Nazareth en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem, car il était de la maison et de la descendance de David. 

On peut faire un beau parallèle du nom de Bethléem, qui signifie « la maison du pain », avec le discours du pain de vie de Jean chapitre 6. Jésus vient donc au monde dans la ville du pain, déposé dans une mangeoire (où l’on place la nourriture) et nous fait ce beau discours sur le pain de vie. Comment peut-on donc ne pas y voir une grande fresque du mystère eucharistique ? Saint Grégoire le grand avait déjà fait un commentaire semblable dans une homélie :
Bethléem signifie « la maison du pain. » C'est lui qui a dit : « Je suis le pain vivant descendu du ciel. » A l’avance, le lieu où le Sauveur devait naître s'appelait « la maison du pain », parce que c'était là que devait apparaître dans la chair celui qui venait nourrir les âmes de ses élus (saint Grégoire le grand : homélie VIII sur les péricopes évangéliques)

Il venait se faire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte.
Or, pendant qu'ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l'emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n'y avait pas de place pour eux dans la salle commune.

Concernant la polémique qui entoure à l’occasion l’expression « premier-né » de ce verset, voici un commentaire intéressant de saint Jérôme :
Helvidius s'efforce de prouver par ce passage qu'on ne peut donner le nom de premier né qu'à celui qui a des frères; de même qu'on appelle fils unique celui qui est le seul enfant de ses parents. Pour nous, voici notre explication: Tout fils unique est premier né, mais tout premier né n'est pas fils unique. Nous appelons premier né, non pas celui après lequel naissent d'autres enfants, mais celui qui est né le premier de tous (cf. Nb 18, 15). En effet, si on n'est le premier né qu'autant qu'on aura des frères après soi, les prêtres n'auront aucun droit sur les premiers nés, avant la naissance d'autres enfants; car alors au défaut de ces autres enfants, il y aurait un fils unique, il n'y aurait point de premier né. (Saint Jérôme : contre Helvidius).

Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L'Ange du Seigneur s'approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d'une grande crainte, mais l'ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : aujourd'hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur. Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »  Et soudain il y eut avec l'ange  une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. »
Je veux souhaiter un joyeux Noël 2010 à tous ceux qui ont visité, aidé, encouragé ou qui ont laissé des commentaires sur ce blogue au cours de l’année. Profitons aussi de cette période pour nous rappeler le plus beau cadeau que nous avons reçu qui est la vie éternelle par Jésus-Christ.

Vous avez aussi les meilleurs souhaits de mon fils Olivier, ma femme Valérie et de la petite Arianne qui devait naître dans quelques semaines.


Joyeux Noël à tous
Matthieu 1, 18-24


Voici quelle fut l'origine de Jésus Christ. Marie, la mère de Jésus, avait été accordée en mariage à Joseph ; or, avant qu'ils eussent habité ensemble, elle fut enceinte par l'action de l'Esprit Saint. Joseph, son époux, qui était un homme juste, ne voulait pas la dénoncer publiquement ; il décida de la répudier en secret.

Que peut-on voir dans la sainte Vierge de supérieur aux autres femmes? Si elle n'est pas la mère de Dieu, comme le soutient Nestorius, mais seulement la mère du Christ ou du Seigneur, qu'y aurait-il d'absurde à donner le nom de mère du Christ à toutes les mères de ceux qui ont reçu l'onction sainte du baptême. Cependant la sainte Vierge seule entre toutes les femmes est reconnue et proclamée à la fois vierge et mère du Christ, parce qu'elle n'a pas enfanté un homme ordinaire, mais le Verbe engendré de Dieu le Père, qui s'est incarné et s'est fait homme. Peut-être m'objectera-t-on: Dites-moi, pensez-vous que la Vierge soit devenue la mère de la divinité: Voici notre réponse: Le Verbe est né de la substance de Dieu, il a toujours existé égal à son Père sans jamais avoir eu de commencement. Il s'est fait chair dans ces derniers temps, c'est-à-dire qu'il s'est uni un corps vivifié par une âme raisonnable, et c'est pour cela que nous disons qu'il est né aussi de la femme selon la chair. Notre naissance présente quelqu'analogie avec ce mystère. Nos mères fournissent à la nature un peu de chair coagulée qui doit recevoir la forme humaine, et c'est Dieu qui envoie une âme dans cette matière. Cependant, bien que nos mères ne soient que les mères de nos corps, elles sont regardées comme ayant enfanté l'homme tout entier, et non pas seulement la chair. Quelque chose de semblable s'est passé dans la naissance de l'Emmanuel. Le Verbe de Dieu est né de la substance du Père; cependant comme il a pris une chair humaine et se l'est rendue propre, il faut reconnaître qu'il est véritablement né d'une femme selon la chair, et comme il est réellement Dieu, comment hésiter à proclamer la sainte Vierge mère de Dieu?  (Saint Cyrille : aux moines d'Égypte).

Il avait formé ce projet, lorsque l'Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse : l'enfant qui est engendré en elle vient de l'Esprit Saint ; elle mettra au monde un fils, auquel tu donneras le nom de Jésus (c'est-à-dire : le-Seigneur-sauve), car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
Tout cela arriva pour que s'accomplît la parole du Seigneur prononcée par le prophète : « Voici que la Vierge concevra et elle mettra au monde un fils, auquel on donnera le nom d'Emmanuel, qui se traduit : Dieu-avec-nous. »

Ces paroles sont du prophète Isaïe 7, 14-16 : C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe : Voici, la jeune femme est enceinte, elle va enfanter un fils et elle lui donnera le nom d'Emmanuel. Il mangera du lait caillé et du miel jusqu'à ce qu'il sache rejeter le mal et choisir le bien. Car avant que l'enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, elle sera abandonnée, la terre dont les deux rois te jettent dans l'épouvante.

Voici ce que nous dit Saint Jérôme, traducteur de la célèbre Vulgate, sur ce passage d'Isaïe :
Le prophète fait précéder sa prédiction de cet exorde: «Dieu lui-même vous donnera un signe»; il s'agit donc de quelque chose de nouveau et de merveilleux. Mais s'il n'est question que d'une jeune fille ou d'une jeune femme qui doit enfanter, et non d'une vierge, où est le miracle? Puisque ce nom n'indique plus que l'âge et non la virginité. Il est vrai qu'en hébreu c'est le mot Bethula qui signifie vierge, mot qui ne se trouve pas dans cette prophétie; il est remplacé par le mot halma, que tous les interprètes, à l'exception des Septante, ont traduit par jeune fille. - Or, le mot halma en hébreu a un double sens, car il signifie jeune fille, et qui est cachée. Ainsi il désigne non seulement une jeune fille ou une vierge, mais une vierge cachée qui n'a jamais paru aux regards des hommes, et sur laquelle ses parents veillent avec le plus grand soin. La langue phénicienne, qui tire son origine de l'hébreu, donne aussi au mot halma le sens de vierge; dans la nôtre, halma signifie sainte. Les Hébreux se servent de mots que l'on retrouve dans presque toutes les langues, et autant que je puis consulter mes souvenirs, je ne me rappelle pas que le mot halma ait été employé une seule fois pour exprimer une femme mariée; il sert toujours à désigner une vierge, et non pas une vierge quelconque, mais une vierge encore jeune, car il en est d'un âge avancé. Or, celle-ci était encore dans l'âge de l'adolescence, ou bien elle était vierge, tout en ayant dépassé cet âge où l'on n'est pas en état d'être marié. (Catena Aurea 3122)

Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse.

Ce midi, je dinais avec des amis et l’un d’eux a posé la question suivante : « Est-ce que Dieu peut créer une pierre qu’il ne peut pas soulever? » Sous cette question, se dissimule le raisonnement suivant qui semble mettre en doute l’omnipotence (toute-puissance) de Dieu. D’un coté, s’il peut créer une pierre qu’il ne peut pas porter, il n’est pas tout-puissant car il ne pourra pas la soulever. De l’autre, s’il ne peut pas créer cette pierre, il n’est donc pas tout-puissant car voilà quelque chose qu’il ne peut pas créer. Comment résoudre ce dilemme ? Un peu comme le dilemme d'Euthyphron, ce dilemme a une solution.

Premièrement je vais tenter de démontrer que, sous ce faux dilemme, se cache principalement une erreur sur ce que Dieu est. Dieu est un pur esprit et il ne peut donc pas littéralement soulever par lui-même des objets matériels comme nous l’imaginons avec notre corps où la force de nos muscles ou d’une machinerie devrait être suffisante. La toute-puissance de Dieu doit être en accord avec son être. On peut résumer cela par : Dieu peut faire tout ce qu’il est. Il ne faut pas confondre ce qui est impossible pour des créatures (nous), et ce qui est impossible en soi car relevant du non-être, du néant. Prenons par exemple les énoncés suivants qui ne limitent pas sa toute-puissance mais au contraire la démontre :
- Dieu est Amour, il ne peut donc pas haïr
- Dieu est Vérité, il ne peut donc pas mentir
- Dieu est Juste, il ne peut donc pas être injuste
Cela se comprend car si Dieu venait qu’à être injuste, il ne serait plus Dieu.

Deuxièmement, Saint Thomas d’Aquin, dans sa somme théologique, avait déjà donné l’explication que Dieu pouvait faire que ce qui était logique et qui ne contient donc pas de contradiction. Ce qui veut dire que si ce qu’on tente de faire exécuter à Dieu est illogique, l’énoncé est invalide et cela ne nie pas la toute-puissance de Dieu en autant que l’être en question soit absolument et non seulement accidentellement tout-puissant. Dieu peut tout ce qui est possible dans le domaine de l'être. Par exemple, Dieu ne pourrait pas créer un cercle-carré car cela est impossible.

À la lumière de ces deux explications, je crois donc que cet énoncé est un sophisme et non un réel paradoxe qui contredirait la toute-puissance de Dieu. Si quelqu’un connait une meilleure explication ou veut tenter de mettre au défi cette conclusion, vous pouvez toujours le faire via commentaire.
Matthieu 11, 2-11

Or Jean, dans sa prison, avait entendu parler des œuvres du Christ. Il lui envoya de ses disciples pour lui dire : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? »

Ce passage de Jean nous semble à première vue un peu étrange. Comme Jean le Baptiste a entendu la voix du Ciel lorsqu’il a baptisé Jésus (Jean 1, 32-34), il est difficile de croire que Jean, pendant qu’il est en prison, doute de l’identité ou de la mission de Jésus. Un des commentaires des plus intéressants pour bien comprendre ce passage est un commentaire de saint Jean Chrysostome :

Il est impossible d'admettre que le courage ou la foi de Jean aient subi dans sa prison une défaillance. II ne craignait pas la mort, lui qui s'était exposé à la mort en reprenant Hérode avec tant de courage ; il n'attendait pas sa délivrance. La question qu'il pose à Jésus ne peut venir du doute ou de l'ignorance. Il avait remarqué que ses disciples, cédant à l'envie, se tournaient contre Jésus. Ils ne savaient pas ce qu'était Jésus ; ils croyaient que ce n'était qu'un homme, tandis qu'ils croyaient Jean plus qu'un homme. Se sentant au moment de mourir, il voulait donc les rattacher à Jésus. S'il leur avait dit : "Allez à lui, il est plus que moi ", ils auraient attribué cette parole à son humilité. Il veut que les faits parlent et disent la différence qu'il existe entre lui et Jésus. Il envoie donc les deux disciples qu'il croit les plus aptes à comprendre. (Saint Jean Chrysostome : XXXVIe homélie sur l'Évangile selon Saint Matthieu)

Jésus leur répondit : "Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles voient et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres ; et heureux celui qui ne trébuchera pas à cause de moi !"

Ces paroles de Jésus sont tirées du livre d’Isaïe :
Isaïe 35, 5-6 : Alors se dessilleront les yeux des aveugles, et les oreilles des sourds s'ouvriront. Alors le boiteux bondira comme un cerf, et la langue du muet criera sa joie
Isaïe 61, 1 : L'esprit du Seigneur Yahvé est sur moi, car Yahvé m'a donné l'onction; il m'a envoyé porter la nouvelle aux pauvres, panser les cœurs meurtris, annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance

Pour ce qui est de la dernière partie où Jésus dit « et heureux celui qui ne trébuchera pas à cause de moi », cela fait référence à sa mort en croix qui pourrait à prime à bord en égarer plus d’un. Comme le dit Saint-Paul : « nous proclamons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens » (1 Corinthiens 1, 23). Comme l’explique Saint Ambroise :

Ce qui fonde la plénitude de la foi, c'est la croix du Seigneur, sa mort, son ensevelissement. C'est pourquoi il dit encore : « Heureux celui qui ne tombera pas à cause de moi ! » En effet, la croix pourrait provoquer la chute des élus eux-mêmes, mais il n'y a pas de témoignage plus grand d'une personne divine, rien qui paraisse davantage dépasser les forces humaines que cette offrande d'un seul pour tous : par cela seul, le Seigneur se révèle pleinement. Et enfin c'est ainsi que Jean l'a désigné : « Voici l'Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde » (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, V 109)

Tandis que ceux-là s'en allaient, Jésus se mit à dire aux foules au sujet de Jean : « Qu'êtes-vous allés contempler au désert ? Un roseau agité par le vent ? Alors qu'êtes-vous allés voir ? Un homme vêtu de façon délicate ? Mais ceux qui portent des habits délicats se trouvent dans les demeures des rois. Alors qu'êtes-vous allés faire ? Voir un prophète ? Oui, je vous le dis, et plus qu'un prophète. C'est celui dont il est écrit : Voici que moi j'envoie mon messager en avant de toi pour préparer ta route devant toi. En vérité je vous le dis, parmi les enfants des femmes, il n'en a pas surgi de plus grand que Jean le Baptiste ; et cependant le plus petit dans le Royaume des Cieux est plus grand que lui. »