Le verset d'ouverture du livre de la lettre aux hébreux nous dit : « Après avoir, à maintes reprises et sous maintes formes, parlé jadis aux pères par les Prophètes ... » (Hébreux 1, 1) La révélation s'est faite de manière fragmentaire, sous diverses formes, par des figures et des symboles. La vérité religieuse n'a pas été donnée à l'homme, comme d'un théologien la disposant gentiment sur la table avec un index et une table des matières. Les doctrines léguées par Dieu aux hommes ont fait l'objet de réflexions sérieuses, vécues à travers la vie liturgique de l'Église et rassemblées par les Pères de l'Église et les conciles œcuméniques. De cette façon, l'Église obtient une compréhension toujours plus grande du dépôt de la foi qui a été « transmise aux saints une fois pour toutes » par le Christ et les apôtres (Jude 3).
Les protestants, particulièrement les fondamentalistes et évangéliques, admettent cela. Ils reconnaissent qu'il y a eu un réel développement de la doctrine. Qu'il y avait un message initial, beaucoup assombri par la chute de l'homme, et qu'ensuite une explication progressive et plus claire des enseignements de Dieu a été donnée à Israël pour préparer la venue du Messie, jusqu'à ce que les apôtres n'aient été instruits par le Messie lui-même. Jésus a dit aux apôtres que dans l'Ancien Testament :« beaucoup de prophètes et de justes ont souhaité voir ce que vous voyez et ne l'ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l'ont pas entendu ! » (Matthieu 13, 17).
Tenez-vous en à ce que l'on vous a appris
Les chrétiens ont toujours compris qu'à la fin de l'âge apostolique, qui se terminait avec la mort de Jean, le dernier survivant des apôtres (probablement autour de l'an 100 de notre ère), la révélation a cessé (Catéchisme de l'Église Catholique 66-67, 73). Le Christ a accompli l'entièreté de la loi de l'Ancien Testament (Matthieu 5, 17) et Il est l'ultime enseignant de l'humanité : « vous n'avez qu'un Maître, le Christ » (Matthieu 23, 10). Les apôtres comprenaient que leur tâche se voulait être la transmission intacte de la foi donnée par le Maître : « et les choses que tu as entendues de moi devant plusieurs témoins, confies-les à des hommes fidèles qui soient capables d'instruire aussi les autres.» (2 Timothée 2, 2); «Pour toi, tiens-toi à ce que tu as appris et dont tu as acquis la certitude. Tu sais de quels maîtres tu le tiens » (2 Timothée 3, 14).
Cependant, cette fermeture de la révélation publique ne signifie pas qu'il ne peut pas y avoir de progrès dans la compréhension de ce qui a été confiée à l'Église. Quiconque est intéressé par le christianisme demandera : « Qu'est-ce que cet enseignement implique ? Quelle est l'application pratique de cette doctrine ? »
Vatican II sur le développement des dogmes
En répondant à ces questions, l'Église facilite la compréhension, le développement ou le mûrissement des doctrines. La Sainte Vierge Marie est un modèle de ce processus pour arriver à une compréhension toujours plus profonde de la révélation de Dieu : « Quant à Marie, elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son cœur.» (Luc 2, 19). Il est important de comprendre que l'Église ne change pas les doctrines que Dieu nous a données, car elle ne peut pas. Elle ne peut pas non plus en «inventer» de nouvelles ou en ajouter au dépôt de la foi, qui a été «une fois pour toute livrée aux saints». De nouvelles croyances ne sont pas inventées, mais les obscurités et les malentendus quant au dépôt de la foi sont éclaircis.
Vatican II a expliqué : « Cette Tradition qui vient des Apôtres progresse dans l’Église, sous l’assistance du Saint-Esprit ; en effet, la perception des réalités aussi bien que des paroles transmises s’accroît, soit par la contemplation et l’étude des croyants qui les méditent en leur cœur, soit par l’intelligence intérieure qu’ils éprouvent des réalités spirituelles, soit par la prédication de ceux qui, avec la succession épiscopale, ont reçu un charisme certain de vérité. Ainsi l’Église, tandis que les siècles s’écoulent, tend constamment vers la plénitude de la divine vérité, jusqu’à ce que soient accomplies en elle les paroles de Dieu. » (Dei Verbum 8)
Quand nous lisons l'Écriture Sainte, nous y voyons les doctrines que nous comprenons déjà, chacun d'entre nous ayant déjà été instruit dans la foi avant d'approcher le texte sacré. C'est un processus nécessaire, comme l'Écriture Sainte l'indique. Pierre expliquait en parlant des écrits de Paul : « il s'y rencontre des passages difficiles à entendre, et que des personnes ignorantes et mal affermies détournent, comme elles font les autres Ecritures, pour leur perdition » (2 Pierre 3, 15-16). Ceux qui sont ignorants de la doctrine chrétienne parce que l'on ne le leur a jamais apprise, ou qui sont instables dans leur adhésion à la doctrine chrétienne qu'on leur a apprise, peuvent ainsi tordre les Écritures de Paul et le reste de l'Écriture Sainte à leur propre détriment. Il est donc important de lire les Écritures selon l'interprétation de la tradition constante de l'Église, comme cela nous a été transmit par les apôtres dans l'Église catholique.
Cependant, quand nous lisons l'Écriture Sainte à la lumière des enseignements authentiques des apôtres, nous oublions parfois que quelques doctrines fondamentales (comme la Trinité ou l'union hypostatique) n'étaient pas toujours comprises ou clairement expliquées aux premiers jours de l'Église de la façon dont elles le sont maintenant. Leur compréhension a augmentée et s'est approfondie dans le temps. Comme exemple, considérons la divinité de l'Esprit-Saint. Dans l'Écriture Sainte, les références à cela semblent nous sauter aux yeux. Toutefois, si nous nous imaginons comme des païens antiques ou comme des non-chrétiens d'aujourd'hui lisant la Bible pour la première fois, nous comprenons que, de leur point de vue, le statut de l'Esprit-Saint comme personne divine n'est pas clairement reconnaissable dans l'Écriture Sainte, puisqu'ils sont moins en mesure de remarquer les détails qui l'indiquent. Si nous nous imaginons comme n'ayant aucun recours à la tradition apostolique et à l'enseignement de l'Église, par l'autorité de l'Esprit-Saint qui la guide dans la vérité (voir Jean 14, 25-26; Jean 16, 13), nous pouvons apprécier comment il a dû avoir été facile pour les premières hérésies concernant la Trinité et l'Esprit-Saint de se répandre.
Un autre exemple est celui d'une hérésie ancienne connue sous le nom de monothélisme. Cette hérésie, que les Catholiques, les Orthodoxes et les Protestants rejettent, prétendait que le Christ possédait seulement qu'une volonté «divine» et qu'il n'avait pas de volonté humaine. Cette erreur est apparue brusquement parce que les gens n'avaient pas encore clairement perçu que, puisque le Christ est entièrement Dieu, il doit avoir une volonté divine et, puisqu'il est entièrement homme, il doit également avoir aussi une volonté humaine. S'il lui manquait l'une ou l'autre nature, ou bien il ne serait pas pleinement Dieu ou bien il ne serait pas pleinement homme. Ainsi, le Christ doit avoir deux volontés, une divine et une autre humaine. Mais, parce que la question n'avait jamais été posée auparavant, cet enseignement n'avait pas encore été discerné comme une inférence nécessaire au fait que le Christ est pleinement Dieu et pleinement homme, deux enseignements qui sont compris depuis longtemps maintenant.
La transsubstantiation (l'enseignement que pendant la Messe, au moment de la consécration, la substance du pain et du vin devient par un changement miraculeux provoqué par la grâce du Dieu, la substance du corps, du sang, de l'âme et de la divinité de Jésus Christ, quoique les apparences du pain et du vin demeurent les mêmes) est un autre exemple d'une doctrine à laquelle l'Église croyait depuis toujours et dont la signification exacte n'a été comprise plus clairement qu'avec le temps. Dans le sixième chapitre de l'Évangile de Jean, l'Eucharistie est une promesse de Jésus. Si ce chapitre est lu en conjonction avec le texte de la Dernière Cène, il est facile de voir pourquoi les premiers chrétiens savaient que le pain et le vin sont transsubstantiés en le corps et en le sang du Christ. La Bible dit clairement que ce changement arrive (1 Corinthiens 10, 16-17; 1 Corinthiens 11, 23-29), mais la Bible est silencieuse sur comment cela se produit.
Le terme théologique technique de « transsubstantiation » n'a pas été formellement adoptée par l'Église catholique avant le quatrième Concile œcuménique du Latran en 1215. Il ne s'agissait pas là de l'ajout d'une nouvelle doctrine, mais ce fut de cette manière que l'Église a définit ce qu'elle enseignait depuis toujours sur ce sujet, en des termes qui seraient assez précis pour exclurent toutes les explications incorrectes proposées au cours des années précédentes pour expliquer ce qui arrive au moment de la consécration. Parce que les gens ont beaucoup discuté de la signification et des implications de la Présence Réelle du Christ dans l'Eucharistie, parce qu'ils ont essayé de leur mieux de tirer les vraies inférences de cette doctrine et parce que pas tous n'étaient pas d'accord à ce sujet, des discussions ont surgi et une définition formelle par l'Église est devenue nécessaire.
Aucune obligation de définir
Comme ce cas-ci et beaucoup d'autres cas le démontrent, les questions doctrinales peuvent demeurer dans un état de «non-définition» pendant des années. L'Église n'a jamais senti le besoin de définir formellement une doctrine tant qu'il n'y a pas eu aucune pression particulière pour définir. Cela apparaît, en particulier pour les non-catholiques, comme quelque chose d'étrange. Pourquoi tout n'était pas déjà éclaircis au début de notre ère en l'an 100 ? Ainsi les gens pourraient savoir le « comment du pourquoi » ou « qu'est-ce qui est quoi » ? Pourquoi Rome n'a pas publié un liste d'épicerie des définitions dès les premiers jours du christianisme et a plutôt laisser aller les choses ? Pourquoi ne pas avoir tout réglé avant que n'arrive tous ces ennuis qui ont tourmenté le Christianisme, précisément parce que les choses n'étaient pas si claires ? La raison est que Dieu a toujours eu son propre calendrier et ses propres raisons (desquels nous sommes ignorants). La même chose pourrait également être dite des prophètes de l'Ancien Testament : Pourquoi ces derniers n'ont -ils pas compris toute l'ampleur de la doctrine de la Trinité immédiatement ? Ou celle de l'identité du Messie ? Ou de l'ampleur de l'enseignement chrétien à venir ? En partie parce que Dieu ne l'avait pas encore révélé et, en grande partie, parce que leur compréhension des implications des doctrines qu'ils connaissaient avaient besoin de se clarifié avec le temps.
Ce besoin de discerner plus clairement ce qui est contenu dans le dépôt de la foi donnée à l'Église par les apôtres nous oriente sur les sujets de l'infaillibilité et de l'inspiration. Le pape et les évêques ( lorsqu'ils enseignent en union avec lui ) ont le charisme d'infaillibilité en définissant les questions de foi ou de morales; cependant nous pourrions dire que l'infaillibilité ne travaille seulement que négativement. Par l'intervention de l'Esprit Saint, le pape et les évêques ne peuvent pas enseigner l'erreur, toutefois ils ne sont pas immédiatement forcés par l'Esprit-Saint d'enseigner ce qui est vrai. Pour le dire autrement, le pape et les évêques ne sont pas inspirés de la façon dont les auteurs des Écriture saintes ou les prophètes l'étaient. Pour faire une nouvelle définition de doctrine ou pour éclaircir quelque confusion dogmatique, ils doivent d'abord employer la raison humaine, en usant de ce qui a été établi jusqu'à présent, pour être capable d'enseigner plus précisément à partir de ce qui doit être tenu comme vrai. Ils ne peuvent pas enseigner ce qu'ils ne connaissent pas et apprendre les choses comme nous le faisons. Ils n'ont pas accès à une sorte de raccourci prophétique et ils doivent chercher par l'étude de la richesse de la parole que Dieu nous a déjà donnée.
Emprunt au paganisme ?
Les fondamentalistes affirment que ce que les catholiques appelle développement n'est rien de plus qu'une accumulation pendant des siècles de croyances et de rites païens. Pour eux, l'Église catholique n'a pas vraiment raffiné le dépôt original de la foi. Au lieu de cela, elle y aurait ajouté des éléments. Dans sa hâte à augmenter le nombre de ses fidèles, en particulier dans les premiers siècles, l'Église faisait entrer presque m'importe qui en son sein. Lorsque les incitations n'étaient pas assez fortes, L'Église aurait adopter des éléments païens pour encourager les païens à se convertir. À chaque fois que l'Église a fait cela, elle se serait éloignée du christianisme authentique.
Considérons Noël comme exemple. Les fondamentalistes stricts ne fête pas Noël et pas seulement parce que le nom de la festivité signifie « Messe du Christ ». Certains disent qu'ils désapprouvent cela parce qu'il n'y a aucune preuve que le Christ est né le 25 décembre. D'autres soutiennent que le Christ ne pouvait pas être né en hiver, parce que les bergers étaient dans les champs avec leurs moutons, et selon eux, les moutons ne sont jamais ammenés dans les champs pendant cette saison (une affirmation peut-être plausible, mais dans ce cas erronée). D'autres, notant que la Bible est silencieuse sur la fête de Noël, disent que cela clos la question. Mais cela ne sont que des considérations secondaires.
Les raisons réelles pour lesquelles beaucoup de fondamentalistes s'opposent à la célébration de Noël sont d'abord que la fête de Noël a été établie par l'Église catholique (ce qui est mauvais en partant pour eux) et, ensuite, parce que l'Église a établi la célébration de la naissance du Christ comme une alternative à la célébration d'un jour férié païen qui était célébré en même temps.
Contrairement aux objections des fondamentalistes, l'Écriture Sainte sanctionne cette manière de faire. Le fête juive des tabernacles était célébrée le même jour qu'une festivité cananéenne antique qu'elle a supplantée, exactement comme Noël a supplanté la festivité du « Sol Invictus » que les non-chrétiens célébraient lorsqu'ils étaient païens. C'est le même principe que lorsque les églises protestantes remplacèrent la célébration de l'Halloween par la célébration du « jour de la Réforme » ou du « festival des moissons ». Il s'agit d'une tentative de fournir une célébration alternative saine à une autre qui est populaire et malsaine. Les anti-catholiques qui accusent Noël d'avoir des « origines païennes » ne réussissent pas à reconnaître que cette fête est précisément anti-païenne dans son origine.
Le commandement de Paul au sujet de la Tradition
Plus significatif que le rejet des fondamentalistes du développement de traditions humaines, tel que la naissance du Christ et du moment où elle est célébrée, est leur rejet de la tradition apostolique. Les traditions humaines peuvent être bonnes ou mauvaises, mais elles n'ont pas le poids qu'a la tradition apostolique. En définitive, puisque la tradition nous transmet la révélation de Dieu, elle est essentiel au développement approprié des doctrines.
Les catholiques savent bien que la révélation s'est terminée avec la mort du dernier des apôtres. Cependant, la partie de la révélation qui n'a pas été écrite dans la Bible (qui est l'enseignement oral inspiré des apôtres (1 Thessaloniciens 2, 13) et l'interprétation essentielle de l'Ancien Testament qui est la base de la Tradition sacrée) les Catholiques l'acceptent également comme étant la révélation. Les catholiques en cela suivent le commandement de Paul : « Dès lors, frères, tenez bon, gardez fermement les traditions que vous avez apprises de nous, de vive voix ou par lettre. » (2 Thessaloniciens 2, 15, voir aussi 1 Corinthiens 11, 2)
Cet article est une traduction de l’article «Can dogma develop» de Catholic Answers. Vous pouvez consulter l’article original en anglais ici.
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