
Les non-chrétiens peuvent-ils être sauvés?
Quatre questions se posent régulièrement sur la position de l'Église au sujet de la possibilité du salut pour ceux qui sont à l'extérieur de ses rangs:
Pour comprendre comment l'Église peut enseigner simultanément que le baptême est nécessaire au salut et que ceux qui n’ont jamais été baptisés peuvent être sauvés, nous avons à examiner deux choses : comment aller au Ciel et comment aller en Enfer.
1. La nécessité du baptême
L’Écriture est étonnamment claire sur le rôle du baptême pour le salut. Je dis « étonnamment », parce que son témoignage est contredit par un grand nombre de chrétiens, en particulier chez les évangéliques.
L’évangélisme soutient que la foi seule est nécessaire pour le salut, mais ils soutiennent cela d'une manière qui peut être résumée comme suit: « Celui qui croit sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné ». En revanche, Jésus-Christ donne explicitement deux conditions pour le salut : la foi et le baptême. « Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé; mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Marc 16, 16). Il y pas moyen de contourner ces trois mots supplémentaires et le fait que la position évangélique ignore cette condition explicite pour le salut montre qu'elle est dans l'erreur.
Ce n’est pas le seul exemple dans l'Écriture où est mentionné le rôle du baptême dans la réalisation du salut. Au contraire, il est mentionné à plusieurs reprises. Voilà pourquoi, après avoir décrit l'Arche de Noé, saint Pierre dit:
Cela est aussi la raison pour laquelle, après avoir imposé les mains sur Saint-Paul et l’avoir guéri (voir Actes 9, 17-19), Ananie lui dit encore, « Et maintenant pourquoi tarder? Lève-toi, fais-toi baptiser et purifies-toi de tes péchés en invoquant son nom. (Actes 22:16) ». Rappelons-nous que Paul croit déjà à ce stade, mais Ananie décrit tout de même le baptême comme étant nécessaire pour purifier ses péchés.
Saint-Paul a compris à ce moment pourquoi il est enseigné que le Christ nous sauve « par le bain de la régénération et en nous renouvelant par le Saint-Esprit, qu'il a répandu sur nous largement par Jésus-Christ notre Sauveur, afin que, justifiés par sa grâce, nous devenions héritiers de la vie éternelle selon notre espérance » (Tite 3, 5-7). Plutôt que d’opposer le salut par la grâce contre le salut par le baptême, Paul décrit le salut par la grâce par le baptême.
Faisons ici une petite parenthèse à propos de la position des évangéliques. Les catholiques sont souvent déconcertés par l'obsession des baptistes avec la forme précise du Baptême. Par exemple, vous avez des gens comme John Piper défendant (lien en anglais) pourquoi « notre église et notre dénomination font du baptême par immersion, un élément déterminant de l'appartenance à la communauté de l'alliance locale (mais pas dans le corps universel du Christ) ». Il explique: « Devrions-nous appeler une méthode de baptême inventé par les hommes « baptême », si nous croyons sur de bonnes preuves qu'il s’écarte de la forme que le Christ a inaugurée? Ne serait-ce pas courir le risque de minimiser l'importance que le Christ lui-même avait investie dans l'ordonnance? » En apparence, cela semble bizarre. Il pense que le baptême n’accomplit rien, et pourtant lui et son église refusent d'accepter des chrétiens dans leur église qui ont été baptisés par aspersion, mais qui n'ont pas eu la totalité de leur corps plongé sous l'eau. Ceci, malgré le fait que les chrétiens du premier siècle autorisaient le baptême par aspersion, comme nous le lisons dans le chapitre 7 de la Didachè.
La position de Piper n’est pas si étrange après un examen plus approfondi. En traitant le baptême, non pas comme un sacrement par lequel Dieu nous sauve, mais comme une ordonnance que nous faisons pour Dieu, ils finissent par le traiter de façon légaliste. Le site « Baptist Distinctives » (lien en anglais) reconnaît que « Parce que le baptême et la Cène du Seigneur sont symboliques, l'utilisation des symboles appropriés est importante. » C’est exactement cela: parce qu'ils pensent qu'il est seulement symbolique, et qu’ils ne peuvent pas envisager d’autres rôles que le baptême pourrait jouer pour le christianisme, ils finissent par développer une obsession légaliste à avoir le juste symbole. Ils se rendent bien compte que le Christ et les apôtres passent beaucoup de temps à parler du baptême, mais leur théologie ne laisse pas une place importante au baptême. Leurs obsessions des détails ritualistes sert à combler ce vide, mais de la pire façon possible. Dans Tite 3, 5-7, Paul propose la bonne solution à ce problème: le Christ nous sauve par la grâce, mais Il le fait par le baptême.
La nécessité du baptême pour le salut explique aussi la fin dramatique du sermon de la Pentecôte de Saint-Pierre, dans laquelle ses auditeurs demandent comment être sauvé et il leur répond que c’est par la foi et le baptême :
Ok, alors l'Écriture enseigne clairement (et à plusieurs reprises) que le baptême est nécessaire au salut. Mais que faisons-nous de ceux qui ne sont pas baptisés? Par exemple, que dire des païens qui ont vécus avant Jésus-Christ, ou les Amérindiens après, mais qui n’avaient pas de baptême et qui ne connaissaient pas le nom de Jésus? À ce sujet, qu'en est-il des fidèles de l'Ancien Testament? Ils avaient les Écritures, ils avaient l'alliance mosaïque, mais ils n’avaient pas le baptême, et ils ne connaissaient pas le nom de Jésus. Ou qu'en est-il du bon larron sur la croix, qui connaissait le nom de Jésus, mais qui ne connaissait pas le baptême (et qui était incapable de la recevoir) ?
2. Les trois éléments du péché mortel
En plus de nous fournir une feuille de route vers le ciel, le Catéchisme de l'Église catholique nous dit comment aller en enfer (CEC #1857) : « Est péché mortel tout péché qui a pour objet une matière grave, et qui est commis en pleine connaissance et de propos délibéré ». Donc, pour aller en enfer, vous devez avoir fait (ou omis) quelque chose de grave, l’avoir fait sciemment et l’avoir fait intentionnellement. Est-ce l'enseignement biblique? Oui ça l’est. Qui plus est, c’est également tout à fait raisonnable.
De nos jours, il est fréquent d'entendre des gens, en particulier des protestants évangéliques, dire que tous les péchés sont aussi mauvais aux yeux de Dieu. Cela est un non-sens non biblique, et je suis heureux de voir que beaucoup de protestants repoussent (lien en anglais) cette idée. Habituellement, les personnes qui prétendent cela basent cette idée sur la première moitié de Romains 6, 23, « le salaire du péché, c’est la mort ». De ce passage, on a tiré l'idée que (1) tout péché est mortel, donc un seul péché (peu importe si c’est un pieux mensonge ou un génocide) conduit à la damnation, que (2) tous les péchés sont punis de manière égale, et (3) donc tous les péchés sont tout aussi mauvais aux yeux de Dieu. Aucune de ces conclusions ne découle logiquement de Romains 6, 23, ni l’une de l'autre. Le premier d'entre eux est en fait explicitement démenti par 1 Jean 5, 16-17, dans lequel saint Jean précise que ce ne sont pas tous les péchés qui sont mortels (menant à la mort):
Cette dernière ligne - qu'il y a un type d'actes répréhensibles qui sont des péchés, mais pas un péché mortel - est une réfutation directe de l'hypothèse que Romains 6,23 appelle chaque péché mortel. Ou pour expliquer cela d'une autre manière: pour qu'un péché soit le type de péché qui vous envoie en enfer, il doit y avoir matière grave. Le catéchisme de l’Église catholique #1855 décrit cette distinction de cette façon:
Mais il ne suffit pas pour l'acte en question soit grave. Vous devez également le savoir. Si vous n’êtes pas au courant, sans culpabilité de votre part, d’un devoir moral ou d’une interdiction, vous n'êtes pas puni, ou au moins puni plus légèrement, pour l’avoir violé. Voilà pourquoi la prière du Christ en croix est « Père, pardonne-leur; car ils ne savent ce qu'ils font (Luc 23, 34) ». C’est également pourquoi saint Paul est doux en réprimandant les Grecs pour leur idolâtrie :
Et c’est pourquoi le Christ conclut une de ses paraboles en disant que ceux dont le péché est enraciné dans l'ignorance seront punis moins sévèrement que ceux qui sciemment désobéit :
Tout cela réfute complètement que « tous les péchés sont également punis », mais cela montre aussi que la connaissance est un élément important dans la gravité d'un péché. Bien sûr, cela a bien du sens. Si vous donnez un sandwich au beurre d'arachide à un enfant qui a une allergie aux arachides, il important de savoir si oui ou non vous saviez qu'il avait une allergie aux arachides.
Et finalement, vous devez agir avec consentement. La loi mosaïque a reconnu cela dès le début, pour faire la distinction entre les femmes adultères et les victimes de viol :
La jeune fille n’est pas punie du tout, parce qu'elle n'a rien fait de mal. Elle a eu connaissance de la gravité de l'infraction faite contre elle, mais elle n'y a pas consenti. Voilà un cas extrême et évident. D'autres facteurs peuvent aussi comprendre des choses allant du sommeil, à la maladie mentale, jusqu’à la torture.
Parmi les trois facteurs que nous avons discutés, un seul d'entre eux (la gravité de l'acte) peut être connu par nous. La mesure dans laquelle une autre personne savait et a consenti à leurs actes mauvais est connue de Dieu seul :
3. Le péché mortel et les non baptisés
Il est temps maintenant de lier cette discussion des éléments du péché mortel avec celle du salut des non baptisés. L'hérésie et l'apostasie sont des matières graves. Mais comme saint Paul l’avait reconnu aux Grecs dans Actes 17, la gravité de ces péchés est diminuée (ou peut-être même éliminé) quand il y a un manque de connaissances non coupable. Il y a un monde de différence entre la personne qui ne fait pas appel à Jésus par orgueil et celui qui ne le fait pas parce qu'il ne connaît pas ce doux Nom.
Ainsi, les premiers chrétiens étaient prompts à revendiquer ceux qui auraient été baptisés s’ils en avaient eu la chance. Par exemple, Saint Justin le Martyr dans la Première Apologie, en l’an 160, explique comment la fois les juifs fidèles de l'Ancien Testament et les Grecs préchrétiens pouvaient être sauvé par le Christ:
Notez la distinction que Justin fait en parlant de ces Gentils qui « vivaient sans raison ». La clé est : Comment répondez-vous à la révélation que vous avez reçue? Les gens demandent souvent quoi faire de ceux qui n’ont jamais entendu l'Évangile. Dans Romains 10, 18, Saint Paul nie que de telles personnes existent. La position constante de l'Église a toujours été que (a) tout le monde reçoit une révélation - la loi naturelle, la conscience, la création, etc.; (b) il est possible d'être sauvé, même avec une très petite parcelle de la révélation, en raison du travail de la grâce; et (c) plus vous avez à travailler avec la grâce, plus vous êtes susceptible d'y répondre et d’être effectivement sauvé. Voilà pourquoi nous évangélisons. Nous voulons donner aux gens les outils nécessaires pour être sauvés et ouvrir autant de canaux possibles par lesquels le Saint-Esprit peut travailler. Supposer que parce qu'une personne est ignorante d'une partie de l'Évangile et qu'elle pourrait alors s'en porter mieux est une insulte à l'Évangile.
Alors oui, le baptême est nécessaire au salut, mais le refus de se faire baptiser est seulement un péché mortel si le refus est en connaissance de cause et fait de façon délibérée. Ceux qui ne sont pas baptisés sans aucune faute de leur part - que ce soit par ignorance non coupable, ou par l'incapacité à être baptisé, comme dans le cas de la mort de catéchumènes, etc. - ne sont pas damnés pour quelque chose qui est en dehors de leur contrôle. Et ce ne sont pas là de nouvelles intuitions de Vatican II, mais tout cela peut être trouvé au sein des premiers Pères de l'Église.
- Le baptême est-il nécessaire pour le salut?
- Est-ce que tous les non baptisés sont damnés?
- Si les non baptisés peuvent être sauvés, pourquoi partager l'Évangile?
- L'Église catholique a-t-elle changé ses réponses aux trois questions précédentes?
Pour comprendre comment l'Église peut enseigner simultanément que le baptême est nécessaire au salut et que ceux qui n’ont jamais été baptisés peuvent être sauvés, nous avons à examiner deux choses : comment aller au Ciel et comment aller en Enfer.
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Gyula Benczúr, Le Baptême du Vajk (1875) |
L’Écriture est étonnamment claire sur le rôle du baptême pour le salut. Je dis « étonnamment », parce que son témoignage est contredit par un grand nombre de chrétiens, en particulier chez les évangéliques.
L’évangélisme soutient que la foi seule est nécessaire pour le salut, mais ils soutiennent cela d'une manière qui peut être résumée comme suit: « Celui qui croit sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné ». En revanche, Jésus-Christ donne explicitement deux conditions pour le salut : la foi et le baptême. « Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé; mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Marc 16, 16). Il y pas moyen de contourner ces trois mots supplémentaires et le fait que la position évangélique ignore cette condition explicite pour le salut montre qu'elle est dans l'erreur.
Ce n’est pas le seul exemple dans l'Écriture où est mentionné le rôle du baptême dans la réalisation du salut. Au contraire, il est mentionné à plusieurs reprises. Voilà pourquoi, après avoir décrit l'Arche de Noé, saint Pierre dit:
C’était l’image du baptême qui vous sauve maintenant : il n’est pas la purification des souillures du corps, mais l’engagement envers Dieu d’une bonne conscience; il vous sauve par la résurrection de Jésus-Christ. Après être monté au ciel, il est maintenant à la droite de Dieu; à lui sont soumis les anges, les principautés et les puissances (1 Pierre 3, 21-22).
Cela est aussi la raison pour laquelle, après avoir imposé les mains sur Saint-Paul et l’avoir guéri (voir Actes 9, 17-19), Ananie lui dit encore, « Et maintenant pourquoi tarder? Lève-toi, fais-toi baptiser et purifies-toi de tes péchés en invoquant son nom. (Actes 22:16) ». Rappelons-nous que Paul croit déjà à ce stade, mais Ananie décrit tout de même le baptême comme étant nécessaire pour purifier ses péchés.
Saint-Paul a compris à ce moment pourquoi il est enseigné que le Christ nous sauve « par le bain de la régénération et en nous renouvelant par le Saint-Esprit, qu'il a répandu sur nous largement par Jésus-Christ notre Sauveur, afin que, justifiés par sa grâce, nous devenions héritiers de la vie éternelle selon notre espérance » (Tite 3, 5-7). Plutôt que d’opposer le salut par la grâce contre le salut par le baptême, Paul décrit le salut par la grâce par le baptême.
Faisons ici une petite parenthèse à propos de la position des évangéliques. Les catholiques sont souvent déconcertés par l'obsession des baptistes avec la forme précise du Baptême. Par exemple, vous avez des gens comme John Piper défendant (lien en anglais) pourquoi « notre église et notre dénomination font du baptême par immersion, un élément déterminant de l'appartenance à la communauté de l'alliance locale (mais pas dans le corps universel du Christ) ». Il explique: « Devrions-nous appeler une méthode de baptême inventé par les hommes « baptême », si nous croyons sur de bonnes preuves qu'il s’écarte de la forme que le Christ a inaugurée? Ne serait-ce pas courir le risque de minimiser l'importance que le Christ lui-même avait investie dans l'ordonnance? » En apparence, cela semble bizarre. Il pense que le baptême n’accomplit rien, et pourtant lui et son église refusent d'accepter des chrétiens dans leur église qui ont été baptisés par aspersion, mais qui n'ont pas eu la totalité de leur corps plongé sous l'eau. Ceci, malgré le fait que les chrétiens du premier siècle autorisaient le baptême par aspersion, comme nous le lisons dans le chapitre 7 de la Didachè.
La position de Piper n’est pas si étrange après un examen plus approfondi. En traitant le baptême, non pas comme un sacrement par lequel Dieu nous sauve, mais comme une ordonnance que nous faisons pour Dieu, ils finissent par le traiter de façon légaliste. Le site « Baptist Distinctives » (lien en anglais) reconnaît que « Parce que le baptême et la Cène du Seigneur sont symboliques, l'utilisation des symboles appropriés est importante. » C’est exactement cela: parce qu'ils pensent qu'il est seulement symbolique, et qu’ils ne peuvent pas envisager d’autres rôles que le baptême pourrait jouer pour le christianisme, ils finissent par développer une obsession légaliste à avoir le juste symbole. Ils se rendent bien compte que le Christ et les apôtres passent beaucoup de temps à parler du baptême, mais leur théologie ne laisse pas une place importante au baptême. Leurs obsessions des détails ritualistes sert à combler ce vide, mais de la pire façon possible. Dans Tite 3, 5-7, Paul propose la bonne solution à ce problème: le Christ nous sauve par la grâce, mais Il le fait par le baptême.
La nécessité du baptême pour le salut explique aussi la fin dramatique du sermon de la Pentecôte de Saint-Pierre, dans laquelle ses auditeurs demandent comment être sauvé et il leur répond que c’est par la foi et le baptême :
Or, en entendant (cela), ils eurent le cœur transpercé, et ils dirent à Pierre et aux autres apôtres : " Frères, que ferons-nous? " Pierre leur dit : " Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour la rémission de vos péchés, et vous recevrez le don du Saint-Esprit, car la promesse est pour vous, et pour vos enfants, et pour tous ceux qui sont au loin, autant qu'en appellera le Seigneur notre Dieu. " Et avec force autres paroles il donna son témoignage; et il les exhortait en disant : " Sauvez-vous de cette génération perverse ! " Eux donc, ayant accueilli sa parole, furent baptisés; et ce jour-là s'adjoignirent environ trois mille personnes (Actes 2, 37-41).
Ok, alors l'Écriture enseigne clairement (et à plusieurs reprises) que le baptême est nécessaire au salut. Mais que faisons-nous de ceux qui ne sont pas baptisés? Par exemple, que dire des païens qui ont vécus avant Jésus-Christ, ou les Amérindiens après, mais qui n’avaient pas de baptême et qui ne connaissaient pas le nom de Jésus? À ce sujet, qu'en est-il des fidèles de l'Ancien Testament? Ils avaient les Écritures, ils avaient l'alliance mosaïque, mais ils n’avaient pas le baptême, et ils ne connaissaient pas le nom de Jésus. Ou qu'en est-il du bon larron sur la croix, qui connaissait le nom de Jésus, mais qui ne connaissait pas le baptême (et qui était incapable de la recevoir) ?
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De la Danse Macabre du cimetière dominicain de Berne, Allemagne |
En plus de nous fournir une feuille de route vers le ciel, le Catéchisme de l'Église catholique nous dit comment aller en enfer (CEC #1857) : « Est péché mortel tout péché qui a pour objet une matière grave, et qui est commis en pleine connaissance et de propos délibéré ». Donc, pour aller en enfer, vous devez avoir fait (ou omis) quelque chose de grave, l’avoir fait sciemment et l’avoir fait intentionnellement. Est-ce l'enseignement biblique? Oui ça l’est. Qui plus est, c’est également tout à fait raisonnable.
De nos jours, il est fréquent d'entendre des gens, en particulier des protestants évangéliques, dire que tous les péchés sont aussi mauvais aux yeux de Dieu. Cela est un non-sens non biblique, et je suis heureux de voir que beaucoup de protestants repoussent (lien en anglais) cette idée. Habituellement, les personnes qui prétendent cela basent cette idée sur la première moitié de Romains 6, 23, « le salaire du péché, c’est la mort ». De ce passage, on a tiré l'idée que (1) tout péché est mortel, donc un seul péché (peu importe si c’est un pieux mensonge ou un génocide) conduit à la damnation, que (2) tous les péchés sont punis de manière égale, et (3) donc tous les péchés sont tout aussi mauvais aux yeux de Dieu. Aucune de ces conclusions ne découle logiquement de Romains 6, 23, ni l’une de l'autre. Le premier d'entre eux est en fait explicitement démenti par 1 Jean 5, 16-17, dans lequel saint Jean précise que ce ne sont pas tous les péchés qui sont mortels (menant à la mort):
Si quelqu'un voit son frère commettre un péché qui ne va pas à la mort, qu'il prie, et Dieu donnera la vie à ce frère, [à tous ceux dont ce péché ne va pas à la mort]. Il y a tel péché qui va à la mort; ce n'est point pour ce péché-là que je dis de prier (1 Jean 5, 16-17).
Cette dernière ligne - qu'il y a un type d'actes répréhensibles qui sont des péchés, mais pas un péché mortel - est une réfutation directe de l'hypothèse que Romains 6,23 appelle chaque péché mortel. Ou pour expliquer cela d'une autre manière: pour qu'un péché soit le type de péché qui vous envoie en enfer, il doit y avoir matière grave. Le catéchisme de l’Église catholique #1855 décrit cette distinction de cette façon:
Le péché mortel détruit la charité dans le cœur de l’homme par une infraction grave à la loi de Dieu ; il détourne l’homme de Dieu, qui est sa fin ultime et sa béatitude en Lui préférant un bien inférieur. Le péché véniel laisse subsister la charité, même s’il l’offense et la blesse. (CEC #1885)
Mais il ne suffit pas pour l'acte en question soit grave. Vous devez également le savoir. Si vous n’êtes pas au courant, sans culpabilité de votre part, d’un devoir moral ou d’une interdiction, vous n'êtes pas puni, ou au moins puni plus légèrement, pour l’avoir violé. Voilà pourquoi la prière du Christ en croix est « Père, pardonne-leur; car ils ne savent ce qu'ils font (Luc 23, 34) ». C’est également pourquoi saint Paul est doux en réprimandant les Grecs pour leur idolâtrie :
Ainsi donc, étant de la race de Dieu, nous ne devons pas croire que la divinité soit semblable à de l'or ou à de l'argent, ou à de la pierre, sculptés par l'art et l'imagination de l'homme. Dieu, ne tenant pas compte de ces temps d'ignorance, annonce maintenant aux hommes qu'ils aient tous, en tous lieux, à se repentir, parce qu'il a fixé un jour où il doit juger le monde avec justice, par un homme qu'il (y) a destiné, fournissant à tous une garantie en le ressuscitant d'entre les morts (Actes 17, 29-31).
Et c’est pourquoi le Christ conclut une de ses paraboles en disant que ceux dont le péché est enraciné dans l'ignorance seront punis moins sévèrement que ceux qui sciemment désobéit :
Ce serviteur qui, ayant connu la volonté de son maître, n'a rien préparé ni agi selon sa volonté, recevra un grand nombre de coups. quant à celui qui, ne l'ayant pas connue, aura agi de façon à mériter des coups, il n'en recevra qu'un petit nombre. On exigera beaucoup de toux ceux à qui l'on a beaucoup donné; et de celui à qui on a confié beaucoup, on demandera davantage. (Luc 12, 47-48).
Tout cela réfute complètement que « tous les péchés sont également punis », mais cela montre aussi que la connaissance est un élément important dans la gravité d'un péché. Bien sûr, cela a bien du sens. Si vous donnez un sandwich au beurre d'arachide à un enfant qui a une allergie aux arachides, il important de savoir si oui ou non vous saviez qu'il avait une allergie aux arachides.
Et finalement, vous devez agir avec consentement. La loi mosaïque a reconnu cela dès le début, pour faire la distinction entre les femmes adultères et les victimes de viol :
Mais si c'est dans les champs que cet homme rencontre la jeune fille fiancée, et qu'il lui fasse violence et couche avec elle, l'homme qui aura couché avec elle mourra seul. Tu ne feras rien à la jeune fille; il n'y a pas en elle de crime digne de mort, car c'est comme lorsqu'un homme se jette sur son prochain et le tue; le cas est le même. L'homme l'a rencontrée dans les champs, la jeune fille fiancée a crié, mais il n'y avait personne pour la secourir (Deutéronome 22, 25-27).
La jeune fille n’est pas punie du tout, parce qu'elle n'a rien fait de mal. Elle a eu connaissance de la gravité de l'infraction faite contre elle, mais elle n'y a pas consenti. Voilà un cas extrême et évident. D'autres facteurs peuvent aussi comprendre des choses allant du sommeil, à la maladie mentale, jusqu’à la torture.
Parmi les trois facteurs que nous avons discutés, un seul d'entre eux (la gravité de l'acte) peut être connu par nous. La mesure dans laquelle une autre personne savait et a consenti à leurs actes mauvais est connue de Dieu seul :
Le péché mortel est une possibilité radicale de la liberté humaine comme l’amour lui-même. Il entraîne la perte de la charité et la privation de la grâce sanctifiante, c’est-à-dire de l’état de grâce. S’il n’est pas racheté par le repentir et le pardon de Dieu, il cause l’exclusion du Royaume du Christ et la mort éternelle de l’enfer, notre liberté ayant le pouvoir de faire des choix pour toujours, sans retour. Cependant si nous pouvons juger qu’un acte est en soi une faute grave, nous devons confier le jugement sur les personnes à la justice et à la miséricorde de Dieu (CEC #1861).
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Mark Antokolski, Mort de Socrate (1875) |
3. Le péché mortel et les non baptisés
Il est temps maintenant de lier cette discussion des éléments du péché mortel avec celle du salut des non baptisés. L'hérésie et l'apostasie sont des matières graves. Mais comme saint Paul l’avait reconnu aux Grecs dans Actes 17, la gravité de ces péchés est diminuée (ou peut-être même éliminé) quand il y a un manque de connaissances non coupable. Il y a un monde de différence entre la personne qui ne fait pas appel à Jésus par orgueil et celui qui ne le fait pas parce qu'il ne connaît pas ce doux Nom.
Ainsi, les premiers chrétiens étaient prompts à revendiquer ceux qui auraient été baptisés s’ils en avaient eu la chance. Par exemple, Saint Justin le Martyr dans la Première Apologie, en l’an 160, explique comment la fois les juifs fidèles de l'Ancien Testament et les Grecs préchrétiens pouvaient être sauvé par le Christ:
Socrate, jugeant ces choses à la lumière de la raison et de la vérité, essaya d’éclairer les hommes et de les détourner du culte des démons ; mais les démons, par l’organe des méchants, le firent condamner comme athée et impie, sous prétexte qu’il introduisait des divinités nouvelles. Ils en usent de même envers nous. Car ce n’est pas seulement chez les Grecs et par la bouche de Socrate que le Verbe a fait entendre ainsi la vérité ; mais les barbares aussi ont été éclairés par le même Verbe, revêtu d’une forme sensible, devenu homme et appelé Jésus-Christ, et nous qui croyons en lui, nous disons que les démons qui se sont manifestés ne sont pas les bons génies, mais les génies du mal et de l’impiété, puisqu’ils n’agissent même pas comme les hommes qui aiment la vertu.
Notez la distinction que Justin fait en parlant de ces Gentils qui « vivaient sans raison ». La clé est : Comment répondez-vous à la révélation que vous avez reçue? Les gens demandent souvent quoi faire de ceux qui n’ont jamais entendu l'Évangile. Dans Romains 10, 18, Saint Paul nie que de telles personnes existent. La position constante de l'Église a toujours été que (a) tout le monde reçoit une révélation - la loi naturelle, la conscience, la création, etc.; (b) il est possible d'être sauvé, même avec une très petite parcelle de la révélation, en raison du travail de la grâce; et (c) plus vous avez à travailler avec la grâce, plus vous êtes susceptible d'y répondre et d’être effectivement sauvé. Voilà pourquoi nous évangélisons. Nous voulons donner aux gens les outils nécessaires pour être sauvés et ouvrir autant de canaux possibles par lesquels le Saint-Esprit peut travailler. Supposer que parce qu'une personne est ignorante d'une partie de l'Évangile et qu'elle pourrait alors s'en porter mieux est une insulte à l'Évangile.
Alors oui, le baptême est nécessaire au salut, mais le refus de se faire baptiser est seulement un péché mortel si le refus est en connaissance de cause et fait de façon délibérée. Ceux qui ne sont pas baptisés sans aucune faute de leur part - que ce soit par ignorance non coupable, ou par l'incapacité à être baptisé, comme dans le cas de la mort de catéchumènes, etc. - ne sont pas damnés pour quelque chose qui est en dehors de leur contrôle. Et ce ne sont pas là de nouvelles intuitions de Vatican II, mais tout cela peut être trouvé au sein des premiers Pères de l'Église.
Cet article est une traduction personnelle de l’article «Can Non-Christians Be Saved?» de Joe Heschmeyer. Vous pouvez consulter l’article original en anglais ici.
baptêmeChristdieusaint
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1) Pour répondre à...

Ils célébraient l’Eucharistie: La didachè
À partir de cet article, nous allons sortir des textes bibliques pour nous permettre d’avancer un peu dans le temps et vérifier comment le message de Jésus et des Apôtres...

Réflexions bibliques du dimanche 30 mars 2014: Les aveugles voient
Lectures de la liturgie
Les aveugles voient
Les voies de Dieu ne sont pas nos voies, entendons-nous dans la première lecture d'aujourd'hui. Jésus illustre cela dans l'Évangile : l'aveugle en vient à...

22 février 2015 - premier dimanche de Carême
Lectures de la liturgie
La nouvelle création
Le Carême nous offre à revenir à l'innocence du baptême. Comme Noé et sa famille ont été sauvés par les eaux du déluge, nous avons...

Confusion baptismale
Cet article est une traduction française personnelle de l’article « Baptismal Confusion », tiré du blogue de Matt Fradd.
Il y a trois conséquences logiques pour le chrétien qui veut nier la régénération...

Les sens de l’Écriture
Sens littéral :
C'est le sens signifié par les paroles de l'Écriture et découvert par l'exégèse qui suit les règles de la juste interprétation. "Tous les sens de la Sainte Écriture...

Réflexions bibliques du dimanche 23 février 2014: Saint comme Dieu
Lectures de la liturgie
Saint comme Dieu
Nous sommes appelés à la sainteté de Dieu. C'est l’affirmation extraordinaire fait à la fois par la première lecture et par l'Évangile de ce dimanche.
Mais...

Les Pères de l'Église : Augustin d'Hippone
Saint-Augustin (354-430) est sans doute le plus grand des Pères de l’Église. Malgré ses erreurs de jeunesse, il est entré dans la secte des manichéens (une religion dualiste aujourd’hui disparue)...