7 mystères de la foi révélés par l'Eucharistie

L’agneau de Dieu, livre de prières de Waldburg (1486)

Dans Apocalypse 5, 1-10, Saint Jean décrit un rouleau scellé de sept sceaux que personne ne pouvait ouvrir:

Puis je vis dans la main droite de Celui qui était assis sur le trône un livre écrit en dedans et en dehors, et scellé de sept sceaux. Et je vis un ange puissant qui criait d'une voix forte " Qui est digne d'ouvrir le livre et de rompre les sceaux? " Et personne ni dans le ciel, ni sur la terre, ne pouvait ouvrir le livre ni le regarder (Apocalypse 5, 1-3).


Alors un des vieillards me dit : " Ne pleure point; voici que le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David, a vaincu, de manière à pouvoir ouvrir le livre et ses sept sceaux". c'est là que Jean vis le Christ, " au milieu du trône et des quatre animaux, parmis les vieillards. " Le contexte ici est profondément liturgique : les quatre animaux représentent les quatre évangiles (Apocalypse 4, 6-7) et le Christ est entouré par les anciens (presbytes ou prêtres). Jésus-Christ est présenté d'une manière eucharistique presque paradoxale: « je vis un Agneau qui était debout : il semblait avoir été immolé ». Le Christ, présenté de cette manière, est la clé pour ouvrir les sept sceaux et révéler le sens du livre. Cela est vrai pour pratiquement chaque aspect de la vie chrétienne. Voici sept autres domaines où l'Eucharistie est la « clé » pour l'ouverture d'une meilleure compréhension.

1. La clé de la Nouvelle Alliance

Dans les cercles théologiques, beaucoup est dit à propos de la « théologie de l’alliance » et le christianisme est souvent désigné comme « la Nouvelle Alliance ». Compte tenu de cela, il est frappant de remarquer que le Christ mentionne spécifiquement la Nouvelle Alliance une seule fois dans le Nouveau Testament et c’est à la Cène. Comme il consacrait le vin en Son Sang, il dit: «Ce calice est la nouvelle alliance en mon sang; faites ceci, toutes les fois que vous en boirez, en mémoire de moi » (1 Corinthiens 11, 25; Matthieu 26, 28; Marc 14, 24; Luc 22, 20). Ainsi, le Christ nous dit : si vous voulez comprendre la Nouvelle Alliance, vous devez regarder ici:

Antoni Estruch, La Cène

Si vous avez une théologie de l’alliance qui n’est pas centrée sur l'Eucharistie, vous n’avez alors pas la vision d’ensemble de l’alliance.

2. La clé de l'Ancienne Alliance

L'Ancienne Alliance peut être un peu déroutante pour les lecteurs modernes : pourquoi tous ces sacrifices d'animaux et ce sang? Hébreux 9, 18-22 explique:

Voilà pourquoi même la première alliance n'a pas été inaugurée sans effusion de sang. Moïse, après avoir proclamé devant tout le peuple tous les commandements selon la teneur de la Loi, prit le sang des taureaux et des boucs, avec de l'eau, de la laine écarlate et de l'hysope, et il fit l'aspersion sur le Livre lui-même et sur tout le peuple, en disant : " Voici le sang de l'alliance que Dieu a contractée avec vous. " II aspergea de même avec le sang le tabernacle et tous les ustensiles du culte. Et d'après la Loi, presque tout se purifie avec du sang; et sans effusion de sang il n'y a pas de rémission (Hébreux 9, 18-22).

Écoutez comment les paroles du Christ font écho à Moïse à travers le temps et l'espace. Si vous revenez au passage de l'Ancien Testament auquel Hébreux fait référence, cette connexion est encore plus profonde :

Ayant pris le livre de l'alliance, il le lut en présence du peuple, qui répondit : "Tout ce qu'a dit Yahweh, nous le ferons et nous y obéirons." Moïse prit le sang et en aspergea le peuple, en disant : "Voici le sang de l'alliance que Yahweh a conclue avec vous sur toutes ces paroles." Moïse monta avec Aaron, Nadab et Abiu et soixante-dix des anciens d'Israël; et ils virent le Dieu d'Israël : sous ses pieds était comme un ouvrage de brillants saphirs, pur comme le ciel même. Et il n'étendit pas sa main sur les élus des enfants d'Israël : ils virent Dieu, et ils mangèrent et burent (Exode 24, 7-11).

Le passage entier procède liturgiquement. Il commence par des lectures bibliques, provenant du livre de l'alliance. Les gens répondent alors avec une forme de Credo : leur profession de foi. Alors Moïse déclare le sang de l'alliance, parallèlement à la consécration de l'Eucharistie. Puis, il est temps pour une communion céleste: Moïse et les anciens virent Dieu, ils mangèrent et ils burent.

Il y a ici un principe à garder à l'esprit : les préfigurations de l’Ancienne Alliance sont toujours inférieures aux accomplissements de la Nouvelle Alliance. La préfiguration n’est jamais aussi impressionnante que la chose qui est préfigurée. Donc, la liturgie que préfigurait Exode 24 sera plus étonnante que de manger et de boire tout en voyant le Dieu d'Israël.

Il se trouve que cela est un des nombreux endroits où l'Ancien Testament pointe vers l'Eucharistie. J’ai déjà écrit à ce sujet avant, je vais donc seulement signaler les endroits les plus évidents.


  • La manne dans le désert (Exode 16) pointe vers le Corps du Christ. Jésus fait cette connexion dans Jean 6, dans lequel il prétend être supérieur à la manne (Jean 6, 49-50) et dit : «Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel; si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai pour la vie du monde est ma chair ». Le Notre Père, en appelant à notre « pain quotidien », fait référence au Christ dans cette capacité, comme étant notre manne « sur-essentiel », tombée du ciel.
  • L'eau du rocher (Exode 17) pointe vers le Sang du Christ : Saint-Paul relie la manne et l'eau dans 1 Corinthiens, se référant à eux comme étant l'aliments et la boisson spirituels des Juifs (1 Corinthiens 10, 3-4).
  • La Pâque (Exode 12) pointe vers l'Eucharistie dans la façon qui est probablement la plus évidente. 1 Corinthiens 5, 7 décrit le Christ comme étant « notre agneau pascal », qui « a été immolé ». Ce sacrifice est inséparable du Sacrifice de la Messe, institué à la dernière Cène - qui, non pas par hasard, se déroule pendant la Pâque (Luc 22, 15). Aussi, vous vous rappelez le discours eucharistique de Jean 6 qui a été référencé ci-dessus? Il se déroule aussi au temps de la Pâque (Jean 6, 4).


Il y a plusieurs autres exemples, mais comme je l'ai dit, j’ai déjà écrit sur cela auparavant. Pour l'instant, il suffit de dire que vous ne pouvez pas comprendre pleinement aucun des passages de l'Ancien Testament, ou le but du système sacrificiel sanglant au sens large, sans comprendre le sacrifice eucharistique.

Israhel van Meckenem, Messe de saint Grégoire (15e siècle)
3. La clé de la Messe

Dans 1 Corinthiens 10, Saint-Paul trace un triple parallèle, entre les systèmes sacrificiels des païens, des juifs et des chrétiens :

Le calice de bénédiction, que nous bénissons, n'est-il pas une communion au sang du Christ? Et le pain, que nous rompons, n'est-il pas une communion au corps du Christ? Puisqu'il y a un seul pain, nous formons un seul corps, tout en étant plusieurs; car nous participons tous à un même pain. Voyez Israël selon la chair : ceux qui mangent les victimes ne participent-ils pas à l'autel? Qu'est-ce à dire? Que la viande sacrifiée aux idoles soit quelque chose, ou qu'une idole soit quelque chose? Nullement; je dis que ce que les païens offrent en sacrifice, ils l'immolent à des démons et non à Dieu; or je ne veux pas que vous soyez en communion avec les démons. Vous ne pouvez boire à la fois au calice du Seigneur et au calice des démons; vous ne pouvez prendre part à la table du Seigneur et à la table des démons. Voulons-nous provoquer la jalousie du Seigneur? Sommes-nous plus forts que lui? (1 Corinthiens 10, 16-22)


Commençons avec les païens. Ils offrent des sacrifices aux démons, à l'autel, que Paul décrit comme étant « la table des démons ». Ils mangent et boivent ensuite ces sacrifices. Paul décrit leur libation sacrificielle comme étant « la coupe des démons ». En mangeant le sacrifice, ils deviennent ainsi « partenaires avec les démons ».

Comparez cela avec les Juifs d'Israël. Leurs prêtres sacrifient aussi à l'autel, mais à Dieu, plutôt qu’aux démons. Comme le note Paul, les gens participent au sacrifice en mangeant : « ceux qui mangent les victimes ne participent-ils pas à l'autel? »

Maintenant, regardez le christianisme. Nos prêtres sacrifient aussi à l'autel, que Paul décrit comme étant « la table du Seigneur ». Nous mangeons et buvons ensuite ces sacrifices. Paul décrit le Sang du Christ, notre libation sacrificielle, comme étant « la Coupe du Seigneur» et,  dans un clin d'œil à la Pâque, comme étant « la Coupe de Bénédiction ».  C’est en mangeant et en buvant ce Sacrifice eucharistique, que nous participons au Corps et au Sang du Christ et dans Son Sacrifice. Si vous ne disposez pas de ces éléments sacrificiels et eucharistiques dans votre compréhension du christianisme, tous ces parallèles s’effondrent. Voilà pourquoi le Catéchisme peut dire que l'Eucharistie est

" source et sommet de toute la vie chrétienne ". " Les autres sacrements ainsi que tous les ministères ecclésiaux et les tâches apostoliques sont tous liés à l’Eucharistie et ordonnés à elle. Car la sainte Eucharistie contient tout le trésor spirituel de l’Église, c’est-à-dire le Christ lui-même, notre Pâque " (CEC #1324).

Ceci est essentiel pour comprendre la Messe, la Divine Liturgie et toutes les liturgies chrétiennes anciennes. Par exemple, la Liturgie de saint Jacques est considérée comme étant la plus ancienne Liturgie couramment utilisée. L'Hymne des Chérubins, une partie de la Liturgie qui était probablement présente depuis le début des années 300, exprime admirablement cette centralité de l'Eucharistie:

Que toute chair mortelle se taise, se tienne avec crainte et tremblement et ne médite rien de terrestre en lui-même: - Car le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, le Christ notre Dieu, se présente pour être sacrifié et être donné en nourriture aux fidèles; et des bandes d'anges vont devant Lui avec tout pouvoir et toute domination, les Chérubins aux yeux innombrables et les séraphins aux six ailes, couvrant leurs visages et criant tout haut l'hymne : Alleluia Alleluia Alleluia.

Cela dépeint un tableau de la Divine Liturgie en tant que manifestation terrestre de la Liturgie Céleste que nous voyons relatée dans le Livre de l'Apocalypse. Au cœur de cette liturgie est l'offrande du Christ, qui nous est donnée dans l'Eucharistie. Il est ce qui explique le paradoxe de l'Agneau debout, bien que tué. Nous ne nous attendons pas à ce qu’un agneau immolé puisse être debout: nous nous attendons à ce qu’Il soit couché, mort et vaincu. Mais l'auto-sacrifice du Christ est Sa victoire, pas sa défaite : « Et moi, quand j'aurai été élevé de la terre, j'attirerai tous les hommes à moi » (Jean 12, 32). Il est non seulement la victime : Il est aussi le prêtre. Au Banquet Céleste, Il est à la fois l’hôte et l’hostie. Saint Jean Chrysostome saisit cette dimension céleste, dans Sur le Sacerdoce (an 387):

Quand tu vois le Seigneur immolé et étendu sur l’autel, le prêtre qui se penche sur la victime et qui prie, et tous les fidèles empourprés de ce sang précieux, crois-tu encore être parmi les hommes, et même sur la terre? N’es-tu pas plutôt transporté dans les cieux, et, toute pensée charnelle bannie, comme si tu étais un pur esprit, dépouillé de la chair, ne contemples-tu pas les merveilles d’un monde supérieur? O prodige! ô bonté de Dieu! Celui qui est assis là-haut, à la droite du Père, en ce moment même se laisse prendre par les mains de tous, il se donne à qui veut le recevoir et le presser sur son coeur; voilà ce qui se passe aux regards de la foi. Ces choses le paraissent-elles mériter le mépris? Sont-elles de nature à ce que l’on puisse les regarder comme au-dessous de soi? (Saint Jean Chrysostome, Sur le Sacerdoce, livre 3, chapitre 4)
Maître de Jacques de Besançon, la Messe de saint Grégoire (1500)

4. La clé du christianisme primitif

L'Eucharistie était non seulement la clé de la Liturgie des premiers chrétiens, elle était la clé de toute leur vie et de leur Église. Nous voyons cela très tôt. Saint Ignace d'Antioche, un étudiant de l'apôtre Jean qui a écrit autour de l’an 107, utilise le refus de la présence réelle des gnostiques comme preuve qu'ils ne faisaient pas partie de l'Église:

Ils [les gnostiques] s'abstiennent de l'eucharistie et de la prière, parce qu'ils ne confessent pas que l'eucharistie est la chair de notre Sauveur Jésus-Christ, chair qui a souffert pour nos péchés, et que dans sa bonté le Père a ressuscitée. Ainsi ceux qui refusent le don de Dieu meurent dans leurs disputes. Il leur serait utile de pratiquer la charité pour ressusciter eux aussi. Il convient de vous tenir à l'écart de ces gens-là, et de ne parler d'eux ni en privé ni en public, mais de vous attacher aux prophètes, et spécialement à l'Évangile, dans lequel la passion nous est montrée et la résurrection accomplie. Et les divisions, fuyez-les comme le principe de tous les maux. (Saint Ignace d’Antioche, Épître aux Smyrniotes, chapitre 7).

Ignace ne cherche pas à convaincre ses lecteurs que l'Eucharistie est vraiment la chair et le sang de Jésus-Christ. Il sait qu'ils le savent. Au lieu de cela, il dit l’Église que, parce que les gnostiques ne confessent pas cette croyance, nous ne pouvons pas être en communion avec eux. Il décrit aussi leur refus de l'Eucharistie comme étant la cause de leur mort spirituelle et dit que ce serait mieux s’ils se repentaient, car ils pourraient alors revivre de nouveau.

En 180 de notre ère, nous voyons saint Irénée de Lyon présenter un argument très similaire (à titre de référence, la première utilisation du mot « Trinité » pour décrire la divinité est en l’an 181, donc nous parlons toujours d’une période assez tôt dans l'histoire chrétienne). Irénée répond à ceux qui nient la résurrection corporelle des chrétiens à la fin des temps. Il réfute leur point de vue en montrant qu'il n’est pas compatible avec la présence réelle de l'Eucharistie:

Comment encore peuvent-ils dire que la chair s'en va à la corruption et n'a point part à la vie, alors qu'elle est nourrie du corps du Seigneur et de son sang ? Qu'ils changent donc leur façon de penser, ou qu'ils s'abstiennent d'offrir ce que nous venons de dire ! Pour nous, notre façon de penser s'accorde avec l'eucharistie et l'eucharistie en retour confirme notre façon de penser. Car nous lui offrons ce qui est sien, proclamant d'une façon harmonieuse la communion et l'union de la chair et de l'Esprit : car de même que le pain qui vient de la terre, après avoir reçu l'invocation de Dieu, n'est plus du pain ordinaire, mais eucharistie, constituée de deux choses, l'une terrestre et l'autre céleste, de même nos corps qui participent à l'eucharistie ne sont plus corruptibles, puisqu'ils ont l'espérance de la résurrection (Saint Irénée de Lyon, Contre les Hérésies, livre IV, chapitre 18).

En d'autres termes, l'Eucharistie est une communion avec Jésus-Christ, Corps, Sang, Âme et Divinité. Nous communions avec lui à la fois spirituellement et physiquement. Parce que nos corps reçoivent l'Homme-Dieu Jésus-Christ, nous pouvons être assurés que nos corps ne seront pas tout simplement jetés à la fin de nos vies. Au contraire, comme le dit le Christ : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour » (Jean 6, 54). Ce qui est frappant est que la croyance d’Irénée en la Résurrection générale est, de son propre aveu, enracinée dans sa foi en la présence réelle. Elle est au cœur de sa théologie et c’est la clé pour comprendre les croyances des premiers chrétiens.

Pour voir ce qui se passe quand quelqu'un n'a pas cette clé, regardez l’Octavius de Minucius Felix (écrit entre l’an 150 et 270). Ici, nous retrouvons une objection romaine au christianisme, enraciné dans un malentendu étrange de l'Eucharistie:

D'ailleurs, les cérémonies qu'ils observent quand ils admettent quelqu'un à leurs mystères ne sont pas moins publiques qu'horribles. On met devant ce nouveau venu un enfant couvert de pâte, afin de cacher le meurtre qu'on veut faire commettre : c'est là-dedans qu'il donne, par leur commandement, plusieurs coups de couteau; le sang coule de toutes parts, ils le sucent avidement, et ce crime commun est le gage commun du silence et du secret. (Minucius Felix, Octavius, chapitre 9)

Les Romains sont bien conscients que l'enfant Christ est centrale au christianisme et qu'il y a quelque chose à propos de manger de la chair et du sang sous les apparences du pain. Mais ils l’ont mal compris (intentionnellement ou par erreur) de la façon la plus barbare et cannibale imaginable. Si votre christianisme n’est pas capable d'être mal compris de cette manière, il n’est pas la même foi pratiquée par les premiers chrétiens.

5. La clé de l'Église

Revenons à 1 Corinthiens 10, pour nous rappeler comment saint Paul dit « Puisqu'il y a un seul pain, nous formons un seul corps, tout en étant plusieurs; car nous participons tous à un même pain.» (1 Corinthiens 10, 17). L'ordre de la causalité est important ici. Parfois, les gens pensent que nous avons la Communion pour célébrer le fait que nous sommes un. Que parce que nous sommes un, nous partageons la même Eucharistie. Mais non, saint Paul dit le contraire : c’est parce que nous partageons la même Eucharistie, nous sommes un seul corps. Dans cette perspective, notre union comme Église est non seulement célébré par l'Eucharistie; dans une manière très réelle, elle est causée par l'Eucharistie.

Notre communion ecclésiale est enracinée dans la Communion Sacramentelle. Le Corps mystique du Christ, l'Église (Éphésiens 5, 23), est fondée sur le corps sacramentel du Christ, l'Eucharistie. En fait, ceci est la raison pour laquelle l'Église est appelée le Corps Mystique du Christ: il est enraciné dans le grand Mystère sacramentel. Gardez cela à l'esprit lorsque vous rencontrez des Écritures comme « le Christ a aimé l'Église et s'est livré lui-même pour elle, afin de la sanctifier, après l'avoir purifiée dans l'eau baptismale, avec la parole, pour la faire paraître, devant lui, cette Église, glorieuse, sans tache, sans ride, ni rien de semblable, mais sainte et immaculée » (Éphésiens 5, 25-27). L'Église au cœur du mystère du salut est enracinée dans l'Eucharistie.

Alexandre Falguière, Tarcisius, martyr chrétien (1868)

6. La clé de la vie des saints

Il y a plusieurs sens dans lesquels nous pouvons voir la centralité de l'Eucharistie pour la vie des Saints. Les exemples les plus évidents sont les chrétiens qui ont mis leur vie en jeu pour préserver le Saint-Sacrement. Saint Ambroise (340-397) raconte l'histoire de son défunt frère Satyre, qui a risqué la noyade pour protéger l'Eucharistie après un naufrage:

Avant d'être initié dans les mystères les plus parfaits, il [Satyre] était en danger de naufrage, lorsque le navire qui le portait heurta les bas-fonds rocheux et était brisé par les vagues. Ne craignant pas la mort, mais de peur qu'il ne quitte cette vie sans ce mystère, il a demandé à ceux qu'il savait être initié au divin Sacrement des fidèles; pas qu'il voulait contempler les choses secrètes avec des yeux curieux, mais pour obtenir de l'aide pour sa foi. Alors il l'a fait lier dans une serviette et plaça la serviette autour de son cou et se jeta ainsi dans la mer, ne cherchant pas une planche qui se serait détachée du cadre du navire pour flotter et sur lequel il aurait pu être sauvé, car il cherchait les moyens de la foi seule. Croyant ainsi qu'il était suffisamment protégé et défendu par cela, il n’a cherché aucune autre aide  (saint Ambroise, sur la mort de Satyre, livre I, chapitre 43).

On pourrait prendre aussi l'exemple de Tarcisius, un garçon de douze ans du troisième siècle. Il était un acolyte et il portait l'Eucharistie aux malades, quand il a été harcelé par un groupe de garçons païens. Quand il a refusé de leur donner le Sacrement, ils l'ont battu à mort. Un poème le commémorant, écrit par le Pape Damase, nous rappelle que « Quand une bande fous menaça saint Tarsicius qui portait les sacrements du Christ, pour les montrer aux profanes, il a préféré être tué et renoncer à son existence plutôt que de trahir aux chiens enragés le corps céleste ».

Il y a d'autres saints, qui sont peut-être moins évidents, dont leur vie est devenue très eucharistique, ce qui les ont conduits à se donner pour les autres. Vous avez saint Paul qui dit: « même dût mon sang servir de libation dans le sacrifice et dans le service de votre foi, je m'en réjouis et vous en félicite » (Philippiens 2, 17), et « quant à moi, je suis déjà offert en sacrifice, et le moment de mon départ approche » (2 Timothée 4, 6). Littéralement, ce second passage se lit : « je suis déjà sur le point d'être versé en sacrifice ». Comparer ces déclarations à la parole de Jésus-Christ à la dernière Cène, « Ceci est mon sang de la Nouvelle Alliance, qui est répandue pour la multitude » (Marc 14, 24). De même, saint Ignace écrivant aux Romains en route pour y être martyrisé, disait: « Je suis le froment de Dieu. Laissez-moi être broyés par les dents des bêtes sauvages, que je sois trouvé le pain pur du Christ ».

Saint Augustin voyait saint Laurent de la même façon:

L'Église romaine nous recommande cette journée comme étant le jour de triomphe du bienheureux Laurent, qui a foulé ce monde comme celui-ci a rugi et ragé contre lui; rejeté comme lui a flatté et cajolé; et dans chaque cas, il a conquis le diable, comme il l'a persécuté. Car dans cette église, vous voyez, comme il vous a régulièrement été dit, il a occupé la fonction de diacre; c’est là qu'il a administré le calice sacré du sang de Christ; c’est là qu'il a versé son propre sang pour le nom du Christ. Jean, le bienheureux apôtre, a clairement expliqué le mystère de la Cène du Seigneur, quand il dit même que le Christ a donné sa vie pour nous, donc nous aussi nous devons donner notre vie pour nos frères. Saint Laurent a compris cela, mes frères, et il l'a fait; il prépare sans doute des choses semblables à ceux qu'il a reçus à cette table. Il aimait le Christ dans sa vie et il l'imita dans sa mort.

7. La clé de notre propre vie spirituelle 

Chacun des saints eucharistiques que j’ai mentionnés dans la dernière section ont risqué leur vie pour le Saint-Sacrement. Mais dans son sermon sur saint Laurent, Augustin est prompt à souligner que « non seulement les roses de martyrs, mais aussi les lys des vierges,  les lierres des personnes mariées et les violettes des veuves. Il n'y a absolument aucune espèce d'êtres humains, mes bien-aimés, qui ont besoin de désespérer de leur vocation; le Christ a souffert pour tous ».

Les conseils de Mère Teresa à des prêtres sont applicables, dans un sens plus large, à nous tous:

Par votre vie tissée serrée avec l'Eucharistie, l'amour de Dieu en Jésus, caché sous les humbles apparences du pain et du vin, peut être vécu dans toute sa grandeur et sa beauté dans les humbles événements de la vie quotidienne. Vous devez continuer votre messe après sa célébration quotidienne au cours de la liturgie, par votre fidélité sincère pour les petits instants de la vie. Comme les gouttes d'huile, qui nourrissent la lampe du sanctuaire et qui brûle en permanence près de Jésus vivant dans le tabernacle, votre vie doit être le prolongement de l'Eucharistie que vous offrez. Avec ce pain, vous devez être brisé pour beaucoup, avec cette Coupe votre vie doit être versée. La charité est l'amour en action.

Saint Josemaría donne quelques conseils concrets pour garder l'Eucharistie au centre de nos vies: de passer du temps, tant à l'intérieur qu’à l'extérieur de la Messe, devant le Saint-Sacrement:

Je ne vois pas comment on pourrait vivre comme un chrétien et ne pas sentir la nécessité de la constante amitié de Jésus dans la parole et dans le pain, dans la prière et dans l'Eucharistie. Je comprends facilement la façon dont des générations successives de fidèles ont exprimé leur amour pour l'Eucharistie, à la fois par des dévotions publiques en faisant des professions de foi et silencieuses, des pratiques simples dans la paix d'une église ou dans l'intimité de leur cœur. 
Nous devons aimer la Sainte Messe qui doit être le centre de notre journée. Si nous vivons bien la Messe, comment ne pas nous trouver le reste de la journée à penser au Seigneur, démangé par l’envie de ne pas nous éloigner de sa présence, à travailler comme il travaillait et à aimer comme Il aimait ? Et si nous apprenons à remercier notre Seigneur pour sa bonté à ne pas limiter sa présence à l'heure du sacrifice de l'autel. Il a décidé de rester avec nous dans l’hostie qui est en réserve dans le tabernacle. 
Je vous dirais que le Tabernacle a toujours été pour moi Béthanie, ce lieu calme et paisible où se trouve le Christ, où nous pouvons lui parler de nos soucis, nos souffrances, nos espoirs et nos joies, avec la simplicité et le naturel de ses amis, Marthe, Marie et Lazare. C’est pourquoi, quand je parcours les rues d’une ville ou d’un village, je me réjouis de découvrir, même de loin, la silhouette d’une église; c’est un nouveau Tabernacle, une occasion de plus de laisser l’âme s’échapper, pour être, par le désir, aux côtés du Seigneur dans le saint Sacrement.

Telle est la foi eucharistique proclamée par le Christ, par l'Ancien et le Nouveau Testament, par les saints, par la Divine Liturgie et par l'Église à travers les âges. Tirer le meilleur du christianisme exige une compréhension profonde de ce Mystère.


Cet article est une traduction personnelle de l’article «7 Mysteries of the Faith Unlocked by the Eucharist» de Joe Heschmeyer. Vous pouvez consulter l’article original en anglais ici.

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