La plupart des chrétiens disent que les apôtres sont venus à croire que Jésus était Dieu après avoir vu comment la résurrection du Christ a justifié ses prétentions à la divinité. Mais le dernier livre de Bart Ehrman, How Jesus Became God: The Exaltation of a Jewish Preacher from Galilee, propose une autre théorie.
Ehrman est un spécialiste de la critique textuelle du Nouveau Testament. Il était auparavant un chrétien fondamentaliste, mais il est maintenant agnostique. Ehrman est devenu populaire avec son livre publié en 2005 intitulé Misquoting Jesus, où il défend l’idée que le texte du Nouveau Testament a été corrompu par le processus de copie des scribes. Il a ensuite fait valoir que cette corruption compromet notre compréhension orthodoxe de la Bible. Le livre s'est vendu à des millions d'exemplaires et vous avez sans doute vu ou entendu Ehrman à la télévision, y compris dans le Colbert Report.
La thèse d’Ehrman dans son dernier livre est que le fossé entre l'humain et le divin dans le monde antique n’était pas aussi clair et « infranchissable » comme il est pour les croyants modernes. Selon Ehrman, dans le monde antique, il était courant que ce fossé soit franchi, soit par des « dieux qui descendent sous les traits des hommes » ou à l’inverse par des « hommes qui s’élèvent et qui deviennent des dieux ». Dans ce milieu culturel, il n'était donc pas improbable que les apôtres aient cru que leur bon rabbin était devenu « Dieu ».
J'ai bien aimé le livre et je pense que c'est décevant de voir comment plusieurs chrétiens entrent automatiquement dans un mode « frappez l’hérétique » avant de le lire. Ne vous méprenez pas : je pense qu’Ehrman a tort, mais son livre est bien écrit.
Les dieux et les hommes dans le monde antique
Les deux premiers chapitres décrivent la barrière flexible entre les dieux et les hommes. Les premières pages ont laissé un goût amer dans ma bouche. Ehrman commence par l'histoire d'un faiseur de miracles du premier siècle, dont les disciples crurent qu'il était le Fils de Dieu et qu’il avait survécu à sa propre mort. Mais, surprise! Ehrman ne parle pas de Jésus, mais d’un autre supposé thaumaturge et contemporain de Jésus nommé Apollonios de Tyane. Ceci prépare le terrain à Ehrman pour dire qu’il y avait « à la pelle » de ces histoires d’hommes qui deviennent des dieux, et vice-versa, dans le monde antique.
Cependant, Ehrman omet de mentionner que nous avons plusieurs sources de la vie de Jésus, mais nous avons qu’une seule source pour celle d’Apollonios. Ehrman dit que cette source, Philostrate, a écrit ce que des témoins oculaires ont dit au sujet Apollonios, mais il omet de mentionner que le seul témoin oculaire cité est un Damis de Ninive, une ville qui n'existait pas au premier siècle (ce qui signifie que Damis n’a probablement pas existé). Ehrman ne mentionne pas non plus que la femme de l'empereur Severus a commissionné Philostrate pour écrire la biographie d'Apollonios plus d'un siècle après la « mort » d'Apollonios. La Vie d'Apollonios a donc probablement été créé pour concurrencer les récits évangéliques de Jésus, qui connaissaient déjà une large diffusion à travers l'Empire romain.
Ehrman reconnaît cette théorie dans une note de bas de page, mais il affirme alors que tout ce qu'il fait est de montrer comment la croyance en des « hommes-Dieu » était facilement acceptable dans le contexte culturel romain; mais je trouve cette réponse insatisfaisante. Si la croyance en un homme-Dieu comme Apollonios a été facilement acceptée car elle a été conçue pour imiter Jésus, cela n'explique toujours pas comment on en est venu à croire en la divinité de Jésus.
Probablement que la concession la plus frappante qu’Ehrman fait dans cette section est qu’Apollonios est la seule histoire d'un véritable « homme-Dieu » comme Jésus. Ehrman écrit: «Je ne connais pas d'autres cas dans la pensée antique grecque ou romaine de ce genre d’« homme-Dieu », où un être divin qui existe déjà est dit être né d'une femme mortelle ». Si l'histoire d’Apollonios est parasitaire de l'histoire de Jésus, alors cela fait de l'histoire de l’« homme-Dieu » Jésus d'autant plus exceptionnelle et difficile à expliquer sans avoir recours à un miracle.
La résurrection de Jésus
Dans le chapitre trois, nous avons un cours intensif sur les « études du Jésus historique » et sur l'utilisation de critères objectifs pour trouver ce que le critique biblique du XIXe siècle Martin Kähler a appelé « Le Jésus de l'histoire » (par opposition au soi-disant non-historique « Christ de la foi » qui habite le catéchisme). Au sujet de ce point, j'ai remarqué que certains éléments de ce qu’Ehrman a discuté ont également paru dans son livre précédent, Did Jesus exist?.
Je pense que c'était le critique du Nouveau Testament Burton Mack, qui disait que le plus grand mystère du christianisme est la question à savoir comment Jésus en est venu à être adoré comme un Dieu si rapidement après sa mort. Les « mythicistes », qui nient que Jésus a existé, ont une réponse simple : il a toujours été vénéré comme Dieu et on lui a ajouté la dimension humaine plus tard. Ehrman rejette ce point de vue, mais il doit alors trouver un moyen d’amener Jésus au sommet de l’échelle ontologique à un rythme très rapide. Ehrman prétend être en mesure de le faire dans son analyse de la Résurrection, un « événement » qui était, selon lui, nécessaire pour qu’on ne se rappelle pas de Jésus comme étant juste un autre messie qui a échoué.
Ehrman est persuadé que ce n'était pas la mielleuse « résurrection de la foi de Pâques » et que ce n’était pas la « résurrection spirituelle » que d'autres critiques avaient proposée. C'était plutôt une véritable résurrection corporelle que les apôtres ont proclamée. Il est prudent de dire, cependant, que c'était la croyance en la résurrection, qui avait causé les apôtres à penser que Jésus était Dieu, et non pas la résurrection elle-même. Ehrman consacre ensuite deux chapitres à fournir une explication naturelle de la façon dont cette croyance en la résurrection est arrivée.
Son point principal est que, bien qu'il croyait autrefois que nous pouvions savoir que Joseph d'Arimathie a enterré Jésus, il a changé d'avis et il dit que nous ne pouvons pas en être certain. Il dit que nous ne pouvons tout simplement pas savoir ce qui s'est passé avec le corps de Jésus. Cependant, nous pouvons savoir que les apôtres avaient des visions de Jésus après sa mort, mais que c'était sans doute parce qu'ils ont été endeuillés et que ces visions sont assez communes. Il dit que la réponse à la question de savoir si ces visions étaient réelles ou hallucinatoires est au-delà de la portée de l'historien.
Mes réflexions sur la Résurrection
Je ne suis pas convaincu par les arguments d’Ehrman contre l'authenticité de la tradition de l'enterrement. Il dit que parce que Joseph et le tombeau vide ne sont pas mentionnés dans le credo de 1 Corinthiens 15, 3-5, cela montre que c'était probablement le développement d’une légende. Mais l'utilisation dans le credo du mot « enseveli » (en grec, hetaphe) implique quelque chose de formel et de cérémonial, non pas seulement le fait de jeter un corps dans une fosse. De plus, il n'y a aucune raison d'inclure ces informations dans 1 Corinthiens, parce qu'ils ne sont pas nécessaires. Lorsque le credo dit que « le Christ est apparu » il est naturel de se demander « à qui est-il apparu ? » Le credo répond à cette question avec une liste de témoins. Quand il dit que le Christ a été enseveli, nous n'avons pas besoin de savoir qui l'a enterré, tout comme nous n'avons pas besoin de savoir qui a tué le Christ (quelque chose que le credo de 1 Corinthiens ne mentionne pas non plus).
En ce qui concerne les visions, comment savons-nous que les disciples ont été endeuillés et qu’ils n’étaient pas plutôt en colère parce que Jésus s'est avéré être une fraude à la place du messie ? Je suis sûr que les disciples de Jean-Baptiste ont pleuré sa mort et ont pu se sentir coupables de ne pas l’avoir aidé pendant son emprisonnement, mais leur chagrin ne les ont pas conduits à proclamer qu'il avait ressuscité d'entre les morts.
Dans l'ensemble, le traitement de la résurrection d’Ehrman est bon quand il va en profondeur sur un sujet et pauvre quand il donne une réponse rapide à une objection. Par exemple, son sommaire superficiel des témoignages sur la résurrection étant contradictoires et qui ne peuvent donc pas être fiables, n'est pas convaincant, parce que les témoignages ne diffèrent que par des détails secondaires. Beaucoup d’histoires antiques font de même. Par exemple, avec Tacite, Suétone et Dion Cassius, nous avons trois récits différents du lieu où Néron était quand Rome a brulé, mais cela ne signifie pas que Néron n'était pas dans la ville quand c'est arrivé.
La voie de l'orthodoxie
Dans les chapitres huit et neuf, Ehrman raconte les luttes au sein de l'Église primitive, lorsque les chrétiens ont cherché à définir en détail ce qu'ils croyaient au sujet de Dieu et de Jésus. Si jamais vous prenez le temps de lire les canons des conciles comme ceux de Nicée et de Chalcédoine, alors vous verrez comment il est vraiment difficile de décrire correctement l'orthodoxie. Il est cependant vraiment facile de faire de votre point de vue une hérésie. Qu'est-ce que la Trinité ? Est-ce que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont tous dieux ? Non ! C'est le trithéisme. Est-ce que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont chacun une partie de Dieu ? Non ! C'est le modalisme. Bien que la description des controverses christologiques du christianisme primitif d’Ehrman soit assez utile, il y a des parties où je pense qu'il sur simplifie au point d'erreur.
Une de celles-ci serait son affirmation selon laquelle les papes du troisième siècle ont approuvé l'hérésie du modalisme, qui prétend qu'il y a un Dieu qui est une personne et que cette personne apparaît dans différents « modes » ou rôles. Dans ce point de vue de Dieu, il n'y a pas de relation entre le Père et le Fils, car ils sont la même personne (Dieu), tout comme mon rôle en tant que « mari » n'a pas de relation personnelle comme « fils ». Ehrman affirme que le pape Calixte I (218 -223) a approuvé ce point de vue, mais notre seule source pour cette accusation est Hippolyte, qui, et Ehrman néglige de le mentionner à ses lecteurs, était un adversaire acharné de Calixte, ce qui rend ses accusations douteuses. Calixte n’était certainement pas modaliste parce qu'il excommunia Sabellius, l'un des principaux promoteurs du modalisme (un autre nom pour modalisme est le sabellianisme). Le livre de référence d’Oxford de J.N.D. Kelly sur les papes donne un bon traitement de cette question ici.
Mot de la fin
Il y a beaucoup plus à discuter ici (surtout sur le point de vue d’Ehrman au sujet de la christologie de Paul), mais dans l'ensemble, je pense que le travail d’Ehrman représente l’approche typique où « Jésus était un prophète de la fin des temps qui a échoué » et qui est populaire dans le milieu des recherches sur le Jésus historique. Ehrman est un peu différent de ses collègues qui partagent les mêmes idées, comme Dale Allison (voir à la page 185 du livre How Jesus became God), et sur ces points, il est agréable de voir comment Ehrman présente un argument convaincant au lieu de lancer simplement une affirmation.
Pour les lecteurs qui veulent un traitement plus complet des arguments d’oppositions à la théorie d’Ehrman, je vous recommande les ressources suivantes :
How God became Jesus : Les vraies origines de la croyance en la nature divine - Une réponse de Jésus à Bart Ehrman. Comme le titre l’indique, ce livre représente les points de vue des cinq auteurs qui sont en désaccord avec la thèse d’Ehrman. Ce livre est une sorte de mélange quand il s'agit de qualité, mais l'essai de Craig Evans sur l'enterrement de Jésus vaut la totalité du prix.
Jesus and the Eyewitnesses: The Gospels as Eyewitness Testimony. Ce livre de Richard Bauckham est une lecture incontournable pour tous ceux qui ont à interagir ou qui sont tentés par l’affirmation d’Ehrman qui dit que les Évangiles n'ont pas été écrits par des témoins oculaires et ne qu’ils ne peuvent donc pas être dignes de confiance.
The Resurrection of the Son of God : Le spécialiste du Nouveau Testament bien connu N.T. Wright donne l'un des traitements les plus complets à la fois sur la résurrection et sur le contexte culturel environnants, ce qui rend l’explication naturelle basée sur une légende de la résurrection très invraisemblable.
Ehrman est un spécialiste de la critique textuelle du Nouveau Testament. Il était auparavant un chrétien fondamentaliste, mais il est maintenant agnostique. Ehrman est devenu populaire avec son livre publié en 2005 intitulé Misquoting Jesus, où il défend l’idée que le texte du Nouveau Testament a été corrompu par le processus de copie des scribes. Il a ensuite fait valoir que cette corruption compromet notre compréhension orthodoxe de la Bible. Le livre s'est vendu à des millions d'exemplaires et vous avez sans doute vu ou entendu Ehrman à la télévision, y compris dans le Colbert Report.
La thèse d’Ehrman dans son dernier livre est que le fossé entre l'humain et le divin dans le monde antique n’était pas aussi clair et « infranchissable » comme il est pour les croyants modernes. Selon Ehrman, dans le monde antique, il était courant que ce fossé soit franchi, soit par des « dieux qui descendent sous les traits des hommes » ou à l’inverse par des « hommes qui s’élèvent et qui deviennent des dieux ». Dans ce milieu culturel, il n'était donc pas improbable que les apôtres aient cru que leur bon rabbin était devenu « Dieu ».
J'ai bien aimé le livre et je pense que c'est décevant de voir comment plusieurs chrétiens entrent automatiquement dans un mode « frappez l’hérétique » avant de le lire. Ne vous méprenez pas : je pense qu’Ehrman a tort, mais son livre est bien écrit.
Les dieux et les hommes dans le monde antique
Les deux premiers chapitres décrivent la barrière flexible entre les dieux et les hommes. Les premières pages ont laissé un goût amer dans ma bouche. Ehrman commence par l'histoire d'un faiseur de miracles du premier siècle, dont les disciples crurent qu'il était le Fils de Dieu et qu’il avait survécu à sa propre mort. Mais, surprise! Ehrman ne parle pas de Jésus, mais d’un autre supposé thaumaturge et contemporain de Jésus nommé Apollonios de Tyane. Ceci prépare le terrain à Ehrman pour dire qu’il y avait « à la pelle » de ces histoires d’hommes qui deviennent des dieux, et vice-versa, dans le monde antique.
Cependant, Ehrman omet de mentionner que nous avons plusieurs sources de la vie de Jésus, mais nous avons qu’une seule source pour celle d’Apollonios. Ehrman dit que cette source, Philostrate, a écrit ce que des témoins oculaires ont dit au sujet Apollonios, mais il omet de mentionner que le seul témoin oculaire cité est un Damis de Ninive, une ville qui n'existait pas au premier siècle (ce qui signifie que Damis n’a probablement pas existé). Ehrman ne mentionne pas non plus que la femme de l'empereur Severus a commissionné Philostrate pour écrire la biographie d'Apollonios plus d'un siècle après la « mort » d'Apollonios. La Vie d'Apollonios a donc probablement été créé pour concurrencer les récits évangéliques de Jésus, qui connaissaient déjà une large diffusion à travers l'Empire romain.
Ehrman reconnaît cette théorie dans une note de bas de page, mais il affirme alors que tout ce qu'il fait est de montrer comment la croyance en des « hommes-Dieu » était facilement acceptable dans le contexte culturel romain; mais je trouve cette réponse insatisfaisante. Si la croyance en un homme-Dieu comme Apollonios a été facilement acceptée car elle a été conçue pour imiter Jésus, cela n'explique toujours pas comment on en est venu à croire en la divinité de Jésus.
Probablement que la concession la plus frappante qu’Ehrman fait dans cette section est qu’Apollonios est la seule histoire d'un véritable « homme-Dieu » comme Jésus. Ehrman écrit: «Je ne connais pas d'autres cas dans la pensée antique grecque ou romaine de ce genre d’« homme-Dieu », où un être divin qui existe déjà est dit être né d'une femme mortelle ». Si l'histoire d’Apollonios est parasitaire de l'histoire de Jésus, alors cela fait de l'histoire de l’« homme-Dieu » Jésus d'autant plus exceptionnelle et difficile à expliquer sans avoir recours à un miracle.
La résurrection de Jésus
Dans le chapitre trois, nous avons un cours intensif sur les « études du Jésus historique » et sur l'utilisation de critères objectifs pour trouver ce que le critique biblique du XIXe siècle Martin Kähler a appelé « Le Jésus de l'histoire » (par opposition au soi-disant non-historique « Christ de la foi » qui habite le catéchisme). Au sujet de ce point, j'ai remarqué que certains éléments de ce qu’Ehrman a discuté ont également paru dans son livre précédent, Did Jesus exist?.
Je pense que c'était le critique du Nouveau Testament Burton Mack, qui disait que le plus grand mystère du christianisme est la question à savoir comment Jésus en est venu à être adoré comme un Dieu si rapidement après sa mort. Les « mythicistes », qui nient que Jésus a existé, ont une réponse simple : il a toujours été vénéré comme Dieu et on lui a ajouté la dimension humaine plus tard. Ehrman rejette ce point de vue, mais il doit alors trouver un moyen d’amener Jésus au sommet de l’échelle ontologique à un rythme très rapide. Ehrman prétend être en mesure de le faire dans son analyse de la Résurrection, un « événement » qui était, selon lui, nécessaire pour qu’on ne se rappelle pas de Jésus comme étant juste un autre messie qui a échoué.
Ehrman est persuadé que ce n'était pas la mielleuse « résurrection de la foi de Pâques » et que ce n’était pas la « résurrection spirituelle » que d'autres critiques avaient proposée. C'était plutôt une véritable résurrection corporelle que les apôtres ont proclamée. Il est prudent de dire, cependant, que c'était la croyance en la résurrection, qui avait causé les apôtres à penser que Jésus était Dieu, et non pas la résurrection elle-même. Ehrman consacre ensuite deux chapitres à fournir une explication naturelle de la façon dont cette croyance en la résurrection est arrivée.
Son point principal est que, bien qu'il croyait autrefois que nous pouvions savoir que Joseph d'Arimathie a enterré Jésus, il a changé d'avis et il dit que nous ne pouvons pas en être certain. Il dit que nous ne pouvons tout simplement pas savoir ce qui s'est passé avec le corps de Jésus. Cependant, nous pouvons savoir que les apôtres avaient des visions de Jésus après sa mort, mais que c'était sans doute parce qu'ils ont été endeuillés et que ces visions sont assez communes. Il dit que la réponse à la question de savoir si ces visions étaient réelles ou hallucinatoires est au-delà de la portée de l'historien.
Mes réflexions sur la Résurrection
Je ne suis pas convaincu par les arguments d’Ehrman contre l'authenticité de la tradition de l'enterrement. Il dit que parce que Joseph et le tombeau vide ne sont pas mentionnés dans le credo de 1 Corinthiens 15, 3-5, cela montre que c'était probablement le développement d’une légende. Mais l'utilisation dans le credo du mot « enseveli » (en grec, hetaphe) implique quelque chose de formel et de cérémonial, non pas seulement le fait de jeter un corps dans une fosse. De plus, il n'y a aucune raison d'inclure ces informations dans 1 Corinthiens, parce qu'ils ne sont pas nécessaires. Lorsque le credo dit que « le Christ est apparu » il est naturel de se demander « à qui est-il apparu ? » Le credo répond à cette question avec une liste de témoins. Quand il dit que le Christ a été enseveli, nous n'avons pas besoin de savoir qui l'a enterré, tout comme nous n'avons pas besoin de savoir qui a tué le Christ (quelque chose que le credo de 1 Corinthiens ne mentionne pas non plus).
En ce qui concerne les visions, comment savons-nous que les disciples ont été endeuillés et qu’ils n’étaient pas plutôt en colère parce que Jésus s'est avéré être une fraude à la place du messie ? Je suis sûr que les disciples de Jean-Baptiste ont pleuré sa mort et ont pu se sentir coupables de ne pas l’avoir aidé pendant son emprisonnement, mais leur chagrin ne les ont pas conduits à proclamer qu'il avait ressuscité d'entre les morts.
Dans l'ensemble, le traitement de la résurrection d’Ehrman est bon quand il va en profondeur sur un sujet et pauvre quand il donne une réponse rapide à une objection. Par exemple, son sommaire superficiel des témoignages sur la résurrection étant contradictoires et qui ne peuvent donc pas être fiables, n'est pas convaincant, parce que les témoignages ne diffèrent que par des détails secondaires. Beaucoup d’histoires antiques font de même. Par exemple, avec Tacite, Suétone et Dion Cassius, nous avons trois récits différents du lieu où Néron était quand Rome a brulé, mais cela ne signifie pas que Néron n'était pas dans la ville quand c'est arrivé.
La voie de l'orthodoxie
Dans les chapitres huit et neuf, Ehrman raconte les luttes au sein de l'Église primitive, lorsque les chrétiens ont cherché à définir en détail ce qu'ils croyaient au sujet de Dieu et de Jésus. Si jamais vous prenez le temps de lire les canons des conciles comme ceux de Nicée et de Chalcédoine, alors vous verrez comment il est vraiment difficile de décrire correctement l'orthodoxie. Il est cependant vraiment facile de faire de votre point de vue une hérésie. Qu'est-ce que la Trinité ? Est-ce que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont tous dieux ? Non ! C'est le trithéisme. Est-ce que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont chacun une partie de Dieu ? Non ! C'est le modalisme. Bien que la description des controverses christologiques du christianisme primitif d’Ehrman soit assez utile, il y a des parties où je pense qu'il sur simplifie au point d'erreur.
Une de celles-ci serait son affirmation selon laquelle les papes du troisième siècle ont approuvé l'hérésie du modalisme, qui prétend qu'il y a un Dieu qui est une personne et que cette personne apparaît dans différents « modes » ou rôles. Dans ce point de vue de Dieu, il n'y a pas de relation entre le Père et le Fils, car ils sont la même personne (Dieu), tout comme mon rôle en tant que « mari » n'a pas de relation personnelle comme « fils ». Ehrman affirme que le pape Calixte I (218 -223) a approuvé ce point de vue, mais notre seule source pour cette accusation est Hippolyte, qui, et Ehrman néglige de le mentionner à ses lecteurs, était un adversaire acharné de Calixte, ce qui rend ses accusations douteuses. Calixte n’était certainement pas modaliste parce qu'il excommunia Sabellius, l'un des principaux promoteurs du modalisme (un autre nom pour modalisme est le sabellianisme). Le livre de référence d’Oxford de J.N.D. Kelly sur les papes donne un bon traitement de cette question ici.
Mot de la fin
Il y a beaucoup plus à discuter ici (surtout sur le point de vue d’Ehrman au sujet de la christologie de Paul), mais dans l'ensemble, je pense que le travail d’Ehrman représente l’approche typique où « Jésus était un prophète de la fin des temps qui a échoué » et qui est populaire dans le milieu des recherches sur le Jésus historique. Ehrman est un peu différent de ses collègues qui partagent les mêmes idées, comme Dale Allison (voir à la page 185 du livre How Jesus became God), et sur ces points, il est agréable de voir comment Ehrman présente un argument convaincant au lieu de lancer simplement une affirmation.
Pour les lecteurs qui veulent un traitement plus complet des arguments d’oppositions à la théorie d’Ehrman, je vous recommande les ressources suivantes :
How God became Jesus : Les vraies origines de la croyance en la nature divine - Une réponse de Jésus à Bart Ehrman. Comme le titre l’indique, ce livre représente les points de vue des cinq auteurs qui sont en désaccord avec la thèse d’Ehrman. Ce livre est une sorte de mélange quand il s'agit de qualité, mais l'essai de Craig Evans sur l'enterrement de Jésus vaut la totalité du prix.
Jesus and the Eyewitnesses: The Gospels as Eyewitness Testimony. Ce livre de Richard Bauckham est une lecture incontournable pour tous ceux qui ont à interagir ou qui sont tentés par l’affirmation d’Ehrman qui dit que les Évangiles n'ont pas été écrits par des témoins oculaires et ne qu’ils ne peuvent donc pas être dignes de confiance.
The Resurrection of the Son of God : Le spécialiste du Nouveau Testament bien connu N.T. Wright donne l'un des traitements les plus complets à la fois sur la résurrection et sur le contexte culturel environnants, ce qui rend l’explication naturelle basée sur une légende de la résurrection très invraisemblable.
Cet article est une traduction personnelle de l’article « How Jesus Became God: A Critical Review » de Trent Horn. Vous pouvez consulter l’article original en anglais ici.
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