Le Concile de Constance (1414-1418) : Fin du Grand Schisme d'Occident et réformes ecclésiastiques

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Le Concile de Constance, tenu de 1414 à 1418, est le seizième concile œcuménique de l'Église catholique. Convoqué par l'empereur Sigismond et le pape Jean XXIII (un des trois papes régnants à l'époque), ce concile avait pour objectif principal de mettre fin au Grand Schisme d'Occident, qui divisait l'Église depuis 1378, et de promouvoir des réformes nécessaires à la discipline et à la moralité ecclésiastiques.

Contexte historique et théologique

Le Concile de Constance se déroula dans un contexte de crise profonde pour l'Église catholique, marquée par le Grand Schisme d'Occident. Ce schisme, débuté en 1378, avait vu l'élection de deux, puis trois papes rivaux — l'un à Rome, l'autre à Avignon, et un troisième élu par le Concile de Pise en 1409 — chacun revendiquant la légitimité pontificale. Cette situation entraîna une profonde confusion parmi les fidèles, des divisions politiques entre les royaumes européens, et un affaiblissement de l'autorité morale de l'Église.

L'empereur Sigismond, conscient des dangers posés par le schisme à l'unité de la chrétienté et aux affaires temporelles de l'Empire, poussa pour la convocation d'un concile œcuménique à Constance, une ville libre du Saint-Empire romain germanique, afin de résoudre la crise et de restaurer l'unité de l'Église.

En outre, le concile devait traiter des questions de réforme de l'Église, qui faisait face à des critiques croissantes concernant la corruption, la simonie, le népotisme, et l'immoralité au sein de son clergé. Le concile devait également examiner les enseignements de John Wyclif et de Jan Hus, deux réformateurs influents qui avaient critiqué l'Église et prôné des réformes doctrinales.

Les décisions du Concile

Le Concile de Constance réunit environ 600 évêques, cardinaux et abbés, ainsi que des représentants des universités et des souverains européens. Voici les principales décisions prises par le concile :

  1. Résolution du Grand Schisme d'Occident : L'une des réalisations majeures du Concile de Constance fut de mettre fin au Grand Schisme d'Occident. Le concile déposa les trois papes rivaux — Jean XXIII, Grégoire XII et Benoît XIII — et élut un nouveau pape, Martin V, en 1417, rétablissant ainsi l'unité de l'Église sous une seule autorité papale. Grégoire XII accepta volontairement de se démettre en faveur du concile, Jean XXIII fut contraint de se soumettre, tandis que Benoît XIII refusa de renoncer et fut finalement excommunié.

  2. Condamnation de Jan Hus et de John Wyclif : Le concile condamna les enseignements de John Wyclif, un théologien anglais qui avait critiqué l'autorité de la papauté et promu une série de réformes théologiques, et ordonna que ses écrits soient brûlés. Jan Hus, un réformateur tchèque influencé par Wyclif, fut également condamné pour hérésie. Malgré la promesse de sauf-conduit pour sa sécurité, Hus fut arrêté, jugé, et brûlé sur le bûcher en 1415, ce qui entraîna une vive réaction en Bohême et contribua au déclenchement des guerres hussites.

  3. Déclaration de la supériorité du concile sur le pape : Le concile adopta le décret Haec Sancta, qui proclamait que le concile œcuménique, représentant l'Église universelle, détenait une autorité suprême sur toute l'Église, y compris sur le pape. Ce décret affirmait que tous, y compris le pape, étaient tenus de se soumettre à son autorité. Ce fut un moment clé dans l'histoire du conciliarisme, un mouvement qui soutenait que le concile général avait plus d'autorité que le pape, surtout en période de crise.

  4. Déclaration de l'obligation de convoquer des conciles périodiques : Le concile édicta le décret Frequens, qui établit que des conciles œcuméniques devaient être convoqués régulièrement pour maintenir la discipline, résoudre les questions doctrinales, et garantir la bonne gouvernance de l'Église. Ce décret visait à instaurer une réforme continue au sein de l'Église.

  5. Mesures de réforme de l'Église : Le concile adopta plusieurs canons visant à réformer la vie et la discipline ecclésiastiques, notamment en matière de simonie, de népotisme et d'immoralité cléricale. Bien que les résultats réels des réformes aient été limités, ces mesures témoignaient de la prise de conscience de la nécessité de réformer l'Église pour répondre aux critiques croissantes.

Importance et impact du Concile de Constance

Le Concile de Constance eut une importance capitale pour l'Église catholique en mettant fin au Grand Schisme d'Occident et en restaurant l'unité de l'Église sous une seule autorité papale. Cette réalisation mit fin à près de quatre décennies de divisions et de confusion qui avaient gravement affaibli l'Église.

Cependant, la question de l'autorité conciliaire par rapport à l'autorité papale resta une source de tension durable. Le décret Haec Sancta, qui proclamait la supériorité du concile, fut rejeté par les papes ultérieurs, et le mouvement conciliariste perdit de son influence avec le temps. Néanmoins, le concile marqua une tentative significative de réforme et de régulation de l'Église par des moyens collectifs.

La condamnation de Jan Hus et de John Wyclif, ainsi que la répression de leurs idées, n'empêcha pas la propagation de mouvements réformateurs et d'insatisfactions qui culmineraient dans la Réforme protestante au début du XVIe siècle. En condamnant Hus sans véritablement répondre aux demandes de réforme, le concile ne fit qu'exacerber les tensions en Bohême et ailleurs.

Les mesures de réforme adoptées par le concile, bien qu'importantes, ne furent pas pleinement mises en œuvre, et la nécessité de réformes plus profondes demeura. Ces efforts de réforme, combinés aux autres décisions du concile, illustrent l'engagement de l'Église à répondre aux défis de son temps, même si les résultats furent parfois ambigus.

Représentation et actualité de Constance aujourd'hui

Aujourd'hui, le Concile de Constance est reconnu comme un tournant majeur dans l'histoire de l'Église catholique, notamment pour sa capacité à mettre fin au Grand Schisme d'Occident et à restaurer l'unité de l'Église. Cet événement nous rappelle que l'unité ecclésiale est essentielle pour la crédibilité et l'efficacité de la mission de l'Église dans le monde.

Le concile nous rappelle également les tensions entre l'autorité papale et l'autorité conciliaire, un débat qui a des répercussions théologiques et historiques importantes. Le conciliarisme, bien qu'affaibli après Constance, soulève des questions sur la gouvernance de l'Église et l'équilibre des pouvoirs au sein de la hiérarchie ecclésiale.

Enfin, la condamnation de Jan Hus et de John Wyclif montre les limites de la réponse de l'Église aux critiques et aux appels à la réforme à la veille de la Réforme protestante. Cela nous enseigne l'importance d'un dialogue ouvert et d'une réceptivité aux critiques légitimes au sein de l'Église.

En conclusion, le Concile de Constance est un exemple frappant de la manière dont l'Église a cherché à naviguer à travers une crise majeure pour maintenir son unité et sa mission, tout en montrant les défis persistants que représentent les besoins de réforme et d'adaptation aux changements du monde.

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