Peu de passages bibliques ont fait couler plus d'encre d'apologète que Matthieu 16, 17-19:
Prenant la parole à son tour, Jésus lui dit : « Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle.Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. »
Pour les catholiques, ce texte est clair. Les douze apôtres étaient présents lorsque Jésus a promis de donner à Pierre seul les clés du royaume, symbolisant l'autorité du Christ - l'autorité du ciel - sur le royaume des cieux sur la terre: l'Église. Pourtant, des millions de protestants croient qu'il y a une distinction à faire dans le texte grec qui éliminerait Pierre pour être le rocher sur lequel Jésus bâtirait son Église.
Ils affirment que le texte dit en fait, «Tu es Petros (qu'ils traduisent par «petite roche» ou par «pierre») et sur cette petra ( qu'ils traduisent par «rocher massif» ou «grosse roche») je construirai mon Église». Dans cette lecture, Pierre est la «petite pierre» et Jésus est le «gros rocher».
Voici cinq façons dont les apologètes catholiques ont répondu à cette affirmation.
Premièrement, nous avons de bonnes raisons de croire que l'Évangile de Matthieu a été écrit à l'origine en araméen et Jésus parlait probablement en araméen. Cela devient crucial comme l'écrit même le bibliste baptiste D.A. Carson dans « The Expositor's Bible Commentary »:
[L]’araméen sous-jacent est dans ce cas incontestable; et il est très probable que kepha a été utilisé dans les deux clauses («tu es kepha » et «sur ce kepha »), puisque le mot était utilisé à la fois pour un nom et pour un « rocher ». Le Peshitta (écrit en syriaque, une langue apparentée à un dialecte de l'araméen) ne fait aucune distinction entre les mots de ces deux clauses.
Deuxièmement, en grec koinè (le dialecte du grec utilisé par les auteurs du Nouveau Testament), petros et petra sont des formes masculines et féminines de mots de même racine et de même definition: pierre. Il n'y a donc pas de « petite roche » dans le texte grec du Nouveau Testament.
Troisièmement, petra était un terme très courant en grec koinè. Il est employé quinze fois pour signifier «roche», «rocher» ou «rocheux» dans le Nouveau Testament. Petros est un terme grec ancien qui n'était pas du tout utilisé en grec koinè . En fait, il n'a jamais été utilisé dans le Nouveau Testament, sauf pour le nom de Pierre après que Jésus l'ait changé de Simon à Pierre.
Ainsi, saint Matthieu aurait utilisé petra pour «rocher», mais ce faisant, il aurait rencontré un problème. Comme Petra est un nom féminin, il aurait donc été inapproprié de l'utiliser comme nom d'homme. Cela équivaudrait à appeler un homme «Valérie» ou «Priscilla» en anglais. Par conséquent, petros, un mot masculin, a été utilisé à la place de petra pour le nom de Pierre.
Quatrièmement, l'un des dictionnaires grecs les plus respectés et les plus référencés parmi les évangéliques est le «Greek Theological Dictionary of the New Testament» de Gerhard Kittel . Dans une déclaration franche à propos de Matthieu 16,18, Oscar Cullman, un éditeur contribuant à ce travail, écrit:
Le jeu de mots évident qui a fait son chemin dans le texte grec … suggère une identité matérielle entre Petra et Petros ... car il est impossible de différencier strictement les deux mots … Petros lui-même est ce petra, pas seulement sa foi ou sa confession … L'idée des réformés qu'il se réfère à la foi de Pierre est tout à fait inconcevable … Car il n'y a aucune référence ici à la foi de Pierre. Au contraire, le parallélisme de «tu es Pierre» et «sur cette pierre je construirai» montre que le second rocher ne peut être que le premier. Il est donc évident que Jésus fait référence à Pierre, à qui il a donné le nom de Pierre … Dans cette mesure, l'exégèse catholique romaine est juste et toutes les tentatives protestantes pour se soustraire à cette interprétation doivent être rejetées.
Cinquièmement, si saint Matthieu voulait distinguer les tailles de roches dans ce passage, il aurait plus probablement utilisé les «lithos», qui pourraient désigner soit un gros rocher, soit une petite pierre. Cependant, il y a un troisième mot que saint Matthieu aurait pu utiliser et qu'en grec koinè signifie toujours petite pierre: «psephos» . Il est utilisé deux fois dans Apocalypse 2, 17 signifiant «petite pierre» quand Jésus dit:
Au vainqueur je donnerai de la manne cachée, je lui donnerai un caillou blanc, et, inscrit sur ce caillou, un nom nouveau que nul ne sait, sauf celui qui le reçoit.
Et enfin, si Matthieu avait voulu faire la distinction entre les roches, il n'aurait probablement pas dit: «Tu es Pierre et sur cette pierre …» Il aurait probablement dit quelque chose comme: «Tu es Pierre, mais sur cette pierre …» afin de marquer la distinction les roches.
Le texte est en fait assez clair: Pierre est la pierre.
Cet article est une traduction personnelle de « Yes, Peter Is the Rock » de Tim Staples pour Catholic Answers.
Bonjour, merci pour ce texte.
RépondreEffacerL'objection que je rencontre le plus fréquemment est la 4è : Jésus bâtirait l'Eglise sur la foi des croyants, foi que Pierre a exprimée au verset précédent.
Existe-t-il d'autres arguments, grammaticaux et autre, pour y parer ?
Merci :)
Bonjour
EffacerOui, cet article répond plus précisément à l'objection que vous avez :
https://www.foicatholique.com/2015/10/la-pierre-de-matthieu-1618-est-elle.html