La venue de l'Emmanuel annoncée à Joseph (Mt 1, 18-24)

La venue de l'Emmanuel annoncée à Joseph (Mt 1, 18-24)

18Or la naissance de Jésus-Christ arriva ainsi. Maire, sa mère, ayant été fiancée à Joseph, il se trouva, avant qu'il eussent habité ensemble, qu'elle avait conçu par la vertu du Saint-Esprit. 
Saint Jean Chrysostome
L'Évangéliste avait dit précédemment : " Jacob engendra Joseph, " dont l'épouse Marie mit au monde Jésus. Mais dans la crainte qu'on ne vînt à penser que la génération du Sauveur était semblable à celle de ses aïeux, il change la forme qu'il a suivie jusqu'à présent pour s'exprimer de la sorte : " Or la naissance de Jésus-Christ arriva ainsi, " expressions qui reviennent à celles-ci : La génération des aïeux du Christ a eu lieu comme je l'ai dit, mais celle du Christ lui-même a été toute différente, et voici comment elle est arrivée : " Marie sa mère étant fiancée, " etc.
Saint Jean Chrysostome
Il annonce qu'il va décrire le mode de cette génération comme étant d'un ordre nouveau, dans la crainte que le nom d'époux de Marie donné à Joseph ne vous fasse croire que Jésus est né selon les lois ordinaires de la nature.
Saint Rémi
On peut encore rapporter ces paroles à ce qui précède, en ce sens : " La génération du Christ a eu lieu comme je l'ai dit, c'est-à-dire : Abraham engendra Isaac, etc. "
Saint Jérôme
Mais pourquoi Jésus est-il conçu d'une vierge fiancée, et non pas d'une vierge dans l'état ordinaire ? C'était d'abord pour que l'origine de Marie fût prouvée par la génération de Joseph ; en second lieu, pour ne pas l'exposer à être lapidée par les Juifs comme adultère ; troisièmement, afin qu'elle eût un soutien et un consolateur pendant la fuite en Égypte. Saint Ignace martyr donne une quatrième raison : ce fut, dit-il, afin que la naissance du Christ demeurât voilée pour le démon, qui le croyait ainsi né d'une femme mariée, et non pas d'une vierge.
Saint Jean Chrysostome
Elle était mariée et habitait avec son mari, car de même que celui qui conçoit un enfant dans la maison de son mari est supposée l'avoir eu de lui, ainsi celle qui conçoit hors de la maison conjugale tombe sous le soupçon d'un commerce illégitime.
Saint Jérôme
Un certain Helvidius, homme inquiet et turbulent, ayant cherché matière à dispute, s'est mis à blasphémer contre la mère de Dieu, et a formulé ainsi sa première objection : " Vous le voyez, dit-il, elle était fiancée et non pas confiée comme un dépôt, ainsi que vous le dites, et elle n'était fiancée que pour se marier quelque temps après. "
Origène
Oui elle fut en effet fiancée à Joseph, mais jamais elle ne lui fut unie par les liens de la concupiscence charnelle. Sa mère fut une mère immaculée, une mère sans souillure, une mère chaste. Nous disons sa mère, la mère de qui ? la mère du Seigneur, du Fils unique de Dieu, du Roi, du Sauveur, du Rédempteur de tous les hommes.
Saint Cyrille
Que peut-on voir dans la sainte Vierge de supérieur aux autres femmes ? Si elle n'est pas la mère de Dieu, comme le soutient Nestorius, mais seulement la mère du Christ ou du Seigneur, qu'y aurait-il d'absurde à donner le nom de mère du Christ à toutes les mères de ceux qui ont reçu l'onction sainte du baptême. Cependant la sainte Vierge seule entre toutes les femmes est reconnue et proclamée à la fois vierge et mère du Christ, parce qu'elle n'a pas enfanté un homme ordinaire, mais le Verbe engendré de Dieu le Père, qui s'est incarné et s'est fait homme. Peut-être m'objectera-t-on : Dites-moi, pensez-vous que la Vierge soit devenue la mère de la divinité : Voici notre réponse : Le Verbe est né de la substance de Dieu, il a toujours existé égal à son Père sans jamais avoir eu de commencement. Il s'est fait chair dans ces derniers temps, c'est-à-dire qu'il s'est uni un corps vivifié par une âme raisonnable, et c'est pour cela que nous disons qu'il est né aussi de la femme selon la chair. Notre naissance présente quelqu'analogie avec ce mystère. Nos mères fournissent à la nature, un peu de chair coagulée qui doit recevoir la forme humaine, et c'est Dieu qui envoie une âme dans cette matière. Cependant, bien que nos mères ne soient que les mères de nos corps, elles sont regardées comme ayant enfanté l'homme tout entier, et non pas seulement la chair. Quelque chose de semblable s'est passé dans la naissance de l'Emmanuel. Le Verbe de Dieu est né de la substance du Père ; cependant comme il a pris une chair humaine et se l'est rendue propre, il faut reconnaître qu'il est véritablement né d'une femme selon la chair, et comme il est réellement Dieu, comment hésiter à proclamer la sainte Vierge mère de Dieu ?
Saint Léon le Grand
Que les mots de conception, d'enfantement ne vous effrayent ni ne vous troublent, car ici la virginité calme toutes les craintes de la pudeur. Et en quoi la pudeur recevrait-elle quelqu'atteinte dans l'union de la divinité avec la pureté qui lui est toujours si chère, dans cette union annoncée par un ange, contractée sons les auspices de la foi et consommée dans la chasteté, dans cette union qui a la vertu pour dot, la conscience pour arbitre, Dieu pour objet, et où nous voyons une conception sans souillure, un enfantement immaculé, une mère vierge ?
Saint Cyrille
Si au contraire, comme le prétend Valentin le corps sacré de Jésus avait été formé d'une matière céleste, et non de la chair virginale de Marie, comment pourrait-elle être considérée comme la mère de Dieu ? L'Évangéliste nous fait connaître le nom de sa Mère lorsqu'il ajoute : " Marie. "
Bède le Vénérable
Le nom de Marie en hébreu signifie étoile de la mer, et en syriaque maîtresse, parce qu'elle a enfanté et la lumière du salut, et le Seigneur du monde.
Bède le Vénérable
Il nous apprend ensuite quel était son époux en ajoutant le nom de Joseph.
Saint Jean Chrysostome
Marie avait pour époux un ouvrier qui travaillait le bois en figure de ce que Jésus-Christ devait opérer le salut du monde sur le bois de la croix.
Saint Jean Chrysostome
Ces paroles : " Avant qu'ils fussent ensemble, "ne veulent pas dire : Avant que Marie fût conduite dans la maison de son époux, car elle y était déjà, selon la coutume assez suivie des anciens d'avoir les fiancées dans leurs maisons, ce qui se voit encore aujourd'hui ; c'est ainsi que les gendres de Loth habitaient la même maison que lui avant d'avoir épousé ses filles.
La Glose
Ces paroles : Avant qu'ils fussent ensemble, doivent être entendues dans le sens de l'union charnelle.
Saint Jean Chrysostome
Cela s'est fait pour que le Christ ne dût pas sa naissance aux inclinations de la chair et du sang, lui qui venait détruire l'empire de la chair et du sang.
Saint Augustin
Il n'y eut point ici de relation conjugale, parce qu'elle ne pouvait avoir lieu dans une chair de péché sans être accompagnée de la concupiscence de la chair qui vient du péché. Celui qui devait être sans péché voulut être conçu en dehors de la concupiscence, pour nous apprendre que toute chair qui naît de l'union de l'homme et de la femme est une chair de péché, puisque la seule chair exempte de cette origine est la seule qui n'eût pas été une chair de péché.
Saint Augustin
Le Christ a voulu naître d'une femme qui eût conservé sa virginité, parce qu'il était contraire à toute idée de justice que la volupté donnât le jour à la vertu, la luxure à la chasteté, la corruption à la sainteté, et aussi parce que celui qui venait renverser l'antique empire de la mort ne pouvait descendre du ciel que d'après les lois d'un ordre nouveau. La Mère du Roi de la chasteté devait donc être la reine de la virginité. Le Seigneur voulut encore se choisir une habitation virginale pour nous apprendre à porter Dieu dans un coeur chaste. Celui donc qui écrivit sur les tables de fer sans se servir d'un poinçon de fer, féconda lui-même le sein de Marie par l'opération du Saint-Esprit, suivant ces paroles de l'écrivain sacré : " Il se trouva qu'elle avait conçu. "
Saint Jérôme
Ce secret ne fut pas découvert par un autre que Joseph, qui en vertu des droits que lui conférait son titre d'époux, connaissait tout ce qui avait rapport à sa future épouse.
Saint Jean Chrysostome
D'après un témoignage historique assez vraisemblable, Joseph était absent lorsqu'eurent lieu les faits racontés par saint Luc, car on ne peut guère croire que l'ange, s'il eût apparu à Marie en présence de Joseph, lui eût tenu le langage qu'il lui adressa et que Marie lui eût répondu tout ce que nous lisons dans l'Évangile. Si nous supposons que l'ange ait pu parvenir jusqu'à Marie et lui parler, du moins n'est-il pas possible d'admettre que, Joseph étant présent, Marie eût entrepris un voyage dans les montagnes et qu'elle soit demeurée trois mois avec Élisabeth, car Joseph se serait nécessairement informé des raisons d'une absence et d'un séjour si prolongé. Ce fut lorsqu'elle revint de ce voyage qui dura plusieurs mois, qu'il la trouva dans un état de grossesse évidente.
Saint Jean Chrysostome
Ces paroles : " elle fut trouvée, "sont justement choisies parce qu'elles expriment ordinairement une chose à laquelle on était loin de s'attendre. Du reste ne fatiguez pas l'Évangéliste de vos questions, en lui demandant comment une vierge a pu devenir mère, il se débarrasse de toutes ces questions par cette simple réponse : " Il se trouva qu'elle avait conçu du Saint-Esprit. " Comme s'il disait : c'est l'Esprit saint qui a fait ce miracle, ni l'archange Gabriel ni saint Matthieu n'ont pu en dire davantage.
Saint Anselme
L'Évangéliste ajoute : " Par l'opération du Saint-Esprit, " afin que ces paroles : " Il se trouva qu'elle avait conçu, " ne pussent laisser aucun soupçon fâcheux dans l'esprit de ceux qui les entendaient.
Saint Jérôme
Nous ne partageons pas l'opinion impie de quelques-uns qui prétendent que l'Esprit saint a remplacé ici ce qui, d'après les lois ordinaires, aurait fécondé le sein de Marie, mais nous disons que tout s'est fait par la puissance et la vertu du Créateur.
Saint Ambroise
Celui qui tire son origine d'un principe quelconque, vient ou de sa substance ou de sa puissance : de sa substance comme le Fils qui est engendré du Père ; de sa puissance, comme toutes les choses créées viennent de Dieu, et c'est de cette manière que Marie a conçu du Saint-Esprit.
Saint Augustin
La manière miraculeuse dont le Christ est né de l'Esprit saint, nous rappelle cette grâce divine en vertu de laquelle la nature humaine dépourvue de tous mérites au premier moment de son existence a été unie au Verbe d'une union si étroite qu'elle ne fait plus qu'une même personne qui est le Fils de Dieu. Mais, puisque l'oeuvre de la conception et de l'enfantement de Marie, bien que n'ayant pour objet que la personne du Fils, est l'oeuvre de la Trinité tout entière (les oeuvres de la Trinité sont indivisibles) pourquoi l'Esprit saint est-il nommé comme en étant le seul auteur ? Faut-il entendre que toute la Trinité est censée agir alors que l'action n'est attribuée qu'à une seule des trois personnes ?
Saint Jérôme
Helvidius objecte que l'Évangéliste voulant parler de personnes qui ne devraient pas s'unir ne se serait pas exprimé de la sorte : " Avant qu'ils fussent ensemble, " de même qu'on ne pourrait dire : Avant de dîner dans le port j'ai fait voile vers l'Afrique, si l'on ne devait pas dîner une fois qu'on serait arrivé au port. Mais ne peut-on pas dire plutôt que bien que le mot avant indique souvent ce qui doit suivre, cependant il n'exprime quelquefois que ce qui était d'abord l'objet de la pensée, sans qu'il soit nécessaire que ce objet se réalise, alors surtout qu'il se présente quelqu'obstacle qui en empêche l'exécution.
Saint Jérôme
On ne peut donc pas conclure qu'ils se soient unis plus tard, car l'Écriture sainte se contente de dire ce qui n'est pas arrivé.
Saint Rémi
On peut dire encore que ce mot : " être ensemble, " exprime non pas l'union conjugale, mais l'époque de la célébration des noces, c'est-à-dire le moment ou la fiancée devient épouse, et alors le sens serait : " Avant qu'ils fussent ensemble ; " c'est-à-dire avant la célébration solennelle du mariage.
Saint Augustin
Ce que saint Mathieu a passé sous silence, c'est-à-dire la manière dont s'est accompli ce mystère, saint Luc nous le raconte après le récit de la conception de saint Jean-Baptiste : " Au sixième mois, dit-il, l'ange fut envoyé, " et plus bas : " l'Esprit saint surviendra en vous. " C'est ce que saint Matthieu rappelle en ces termes : " Il se trouva qu'elle avait conçu du Saint-Esprit. " Il n'y a ici aucune contradiction entre ces deux Évangélistes, parce que saint Luc raconte ce que saint Matthieu a passé sous silence, et il n'y en a pas davantage lorsque saint Matthieu enchaîne dans son récit ce qui a été omis par saint Luc. On lit en effet plus bas dans saint Mathieu : " Joseph, son mari, étant juste, " etc. et tout ce qui suit jusqu'à l'endroit où nous voyons les Mages retourner dans leur pays par un autre chemin. Or si quelqu'un voulait composer d'après l'ordre chronologique un seul et unique récit de toutes les circonstances de la naissance du Christ qui sont racontées par l'un et omises par l'autre, il devrait commencer à ces mots : " Or voici quelle fut la génération du Christ. Il y eut aux jours d'Hérode, " etc. jusqu'à ces autres : " Marie resta avec elle environ trois mois ; et elle revint dans sa maison ; " et puis ajouter ce que nous venons d'exposer : " Il se trouva qu'elle avait conçu du Saint-Esprit. "
19Joseph, son mari, qui était juste et ne voulait pas la diffamer, se proposa de la répudier secrètement. 
Saint Jean Chrysostome
L'Évangéliste après avoir exposé comment Marie devint féconde par l'opération du Saint-Esprit, et sans aucune relation avec son époux semble craindre qu'on ne le soupçonne, lui disciple de Jésus-Christ, d'entourer la naissance de son Maître de grandeurs imaginaires ; il nous présente donc Joseph son époux mis à une si rude épreuve, et rendant ainsi témoignage à la vérité des faits ; c'est pour cela qu'il ajoute : " Or Joseph son mari étant juste. "
Saint Augustin
Joseph voyant la grossesse de Marie, est profondément troublé de voir dans cet état celle qu'il avait reçue comme épouse au sortir du temple et avec laquelle il n'avait eu aucune relation. Ces pensées l'agitent tour à tour et se confondent dans son esprit ? Que ferai-je ? Dois-je faire connaître son crime ou me taire ? Si je dévoile sa faute, je proteste contre l'adultère, mais je m'expose au reproche de cruauté, car je sais que d'après la loi de Moïse elle doit être lapidée. Si je garde le silence, je me rends complice du mal, et je fais alliance avec les adultères. Puisque donc c'est un mal de se taire et un plus grand mal encore de pactiser avec l'adultère, je me séparerai d'elle.
Saint Ambroise
Saint Matthieu nous a enseigné admirablement ce que doit faire un homme juste qui a découvert la honte ou le déshonneur de son épouse, s'il veut à la fois ne pas tremper ses mains dans son sang, et ne pas se souiller au contact d'une adultère. Aussi a-t-il soin de nous dire :" Comme il était juste. " Joseph en effet conserve dans toutes les circonstances la grâce et le caractère d'un juste, et son témoignage n'en est que plus certain ; car la langue du juste tient le langage de la justice, etc.
Saint Jérôme
Mais comment Joseph qui cache le crime de son épouse nous est-il présenté comme juste ? Car la loi veut que l'on considère comme coupables non seulement ceux qui ont commis le crime, mais ceux-là mêmes qui en ont eu connaissance.
Saint Jean Chrysostome
Le mot juste, dans la pensée de l'Évangéliste, veut dire qui réunit toutes les vertus Il y a une justice spéciale, opposée au vice de l'avarice. La justice est aussi une vertu universelle, et c'est dans ce dernier sens que l'Écriture emploie le plus souvent le mot de justice. Joseph étant donc juste, c'est-à-dire plein de douceur et de bonté, voulut la renvoyer en secret, elle qui d'après la loi devait être non seulement traduite ignominieusement, mais condamnée au dernier supplice. Mais Joseph, dont la vie était supérieure à la loi, sauva Marie de ce double danger. De même que le soleil éclaire la terre avant même que ses rayons paraissent sur l'horizon, ainsi Jésus-Christ avant sa naissance a fait briller une multitude d'actes héroïques de vertu.
Saint Augustin
On peut encore donner cette explication : Si vous êtes seul pour connaître l'offense qu'un de vos frères a commise contre vous, et que vous cherchiez à l'accuser publiquement, vous ne le corrigez pas, vous le trahissez. Aussi voyez le juste Joseph : malgré l'énormité du crime dont il soupçonnait son épouse, sa bonté lui inspire les ménagements les plus grands. Il était tourmenté par un soupçon d'adultère qui approchait de la certitude, et cependant comme lui seul avait cette connaissance, il ne voulut pas dénoncer son épouse, mais la renvoyer en secret, car il désirait encore lui être utile, et ne point attirer sur elle le châtiment dû à son péché.
Saint Jérôme
Ou bien peut-être est-ce un témoignage en faveur de Marie, que Joseph qui ne pouvait douter de sa vertu, et qui admirait d'ailleurs ce qui était arrivé, voile sous le silence ce qui était pour lui un mystère.
Saint Rémi
Il voyait donc en état de grossesse celle dont il connaissait la chasteté, et comme il avait lu dans le prophète Isaïe (Is 11) : " Un rejeton sortira de la tige de Jessé (d'où il savait que Marie tirait son origine) ; et encore : " Voici qu'une Vierge concevra, " il ne doutait pas que cette prophétie n'eût reçu en elle son accomplissement.
Origène
Mais si Joseph n'avait aucun soupçon sur son épouse, en quoi se montrait-il juste en renvoyant celle dont la vertu n'avait souffert aucune atteinte ? Il voulait la renvoyer, parce qu'il s'estimait indigne d'approcher de ce grand mystère qui s'était opéré en elle.
La Glose
Ou bien, en la renvoyant il se montrait juste, et en la renvoyant en secret ; il faisait preuve de bonté, puisqu'il voulait la mettre à l'abri de l'infamie, c'est ce que signifient ces paroles : " Comme il était juste, il voulut la renvoyer. " Il pouvait la livrer à la sévérité de la loi, c'est-à-dire la diffamer ; il préféra la renvoyer en secret.
Saint Ambroise
On ne peut renvoyer celle qu'on n'a pas reçue ; par cela même qu'il veut la renvoyer, Joseph prouve qu'il l'avait prise chez lui comme son épouse.
La Glose
Ou bien comme il ne voulait pas l'introduire dans sa maison pour vivre indissolublement avec elle, il voulut la renvoyer en secret et retarder l'époque de son mariage. Car la bonté sans la justice, ou la justice sans la bonté ne peuvent constituer la vertu véritable, et leur séparation mutuelle les détruit. Ou bien encore, il était juste par la foi qui lui faisait croire que le Christ naîtrait d'une vierge, et le portait à s'humilier devant une grâce aussi extraordinaire.
20Comme il était dans cette pensée, voici qu'un ange du Seigneur lui apparut en songe, et lui dit : " Joseph, fils de David, ne craint point de prendre chez toi Marie ton épouse, car ce qui est conçu en elle est du Saint-Esprit. 
Saint Rémi
Comme nous venons de le voir, Joseph pensait à renvoyer Marie en secret. Or s'il avait exécuté ce dessein, la plupart auraient vu en Marie une femme perdue plutôt qu'une vierge. Aussi le ciel se chargea-t-il de changer bien vite le dessein de Joseph, ce que l'Évangéliste exprime en ces termes : " Comme il était dans cette pensée. "
La Glose
On reconnaît ici l'âme d'un sage qui ne veut rien entreprendre avec précipitation.
Saint Jean Chrysostome
La douceur de Joseph n'est pas moins admirable ; il ne confie à personne le soupçon qui l'agite, pas même à celle qui en était l'objet, il garde tout en lui-même. 
Saint Augustin
Pendant que Joseph est dans cette pensée, que Marie la fille de David soit sans crainte, car de même que la voix du Prophète apporta le pardon à David, l'ange du Sauveur vient délivrer Marie. L'ange Gabriel le paranymphe de la Vierge, apparaît de nouveau comme le dit l'Évangéliste : " Voici que l'ange dur Seigneur apparut à Joseph. "
La Glose
Ce mot il apparut exprime la puissance de celui qui apparaît, et qui se rend visible quand il veut et de la manière qu'il veut.
Saint Jean Chrysostome
Il n'apparaît pas ouvertement à Joseph comme aux bergers à cause de sa grande foi. Les bergers avaient besoin d'une apparition manifeste à cause de leur grossière ignorance ; Marie, à cause des grandes choses dont l'ange devait l'instruire la première. Une apparition de ce genre ne fut pas moins nécessaire à Zacharie avant la conception de son fils.
La Glose
L'ange en apparaissant à Joseph le nomme par son nom, lui rappelle le souvenir de sa famille, et bannit la crainte de son coeur par ces mots : " Joseph, fils de David. " En l'appelant par son nom, il le traite commue une personne qui lui est connue, et comme un ami.
Saint Jean Chrysostome
En l'appelant : " Fils de David, " il voulut lui remettre en mémoire la promesse faite à David que le Christ naîtrait de sa race.
Saint Jean Chrysostome
En lui disant : " Ne craignez pas, " il nous fait voir qu'il craignait d'offenser Dieu en gardant chez lui celle qu'il regardait comme adultère ; autrement il n'aurait pas pensé à la renvoyer.
Sévérianus
Ce chaste époux reçoit l'ordre de bannir la crainte de son coeur, car une âme bienveillante trouve dans la compassion qu'elle éprouve un nouveau motif de crainte. L'ange semble lui dire : Il n'y a point ici cause de mort, mais bien plutôt cause de vie, car celle que la vie a rendue mère ne mérite point d'être mise à mort.
Saint Jean Chrysostome
Ces paroles : " Ne craignez pas, on apprennent encore à Joseph que l'ange connaissait les secrets de son coeur et le préparent à croire tout ce qu'il allait dire des biens futurs dont le Christ devait être l'auteur.
Saint Ambroise
Ne soyez pas étonné qu'il donne à Marie le nom d'épouse ; il ne veut pas exprimer par là la perte de sa virginité, mais attester la vérité de leur union et la célébration de leur mariage.
Saint Jérôme
De ce que l'ange lui donne le nom d'épouse, il ne faut pas conclure qu'elle ne fut plus fiancée, car c'est la coutume de l'Écriture de donner le nom d'époux ou d'épouses à ceux qui ne sont que fiancés comme on peut le prouver par ce passage du Deutéronome (Dt 22) : " Celui qui, trouvant dans un champ la fiancée d'un autre lui fera violence et dormira avec elle, sera puni de mort, parce qu'il a déshonoré l'épouse de son prochain. "
Saint Jean Chrysostome
L'ange lui dit : " Ne craignez pas de la recevoir, c'est-à-dire de la garder dans votre maison, car elle était déjà renvoyée dans son esprit.
Rabanus Maurus
Ou bien une craignez pas de la recevoir, c'est-à-dire de l'admettre comme épouse a la participation de la communauté conjugale et du foyer domestique. Ces mots : " En songe " expriment comment l'ange apparut à Joseph, c'est-à-dire de la même manière que Jacob vit des yeux de l'esprit comme une image de l'échelle mystérieuse.
Saint Jean Chrysostome
L'ange apparut à Joseph et lui tint ce langage pour trois raisons : la première, afin que cet homme juste ne fit point par ignorance une action mauvaise dans une bonne intention ; la seconde, pour l'honneur de la mère du Sauveur, car si elle avait été renvoyée, elle n'aurait pas manqué d'être en butte aux soupçons les plus injurieux de la part des infidèles ; la troisième raison, afin que Joseph comprenant combien était sainte cette conception, eût encore plus de respect qu'auparavant pour sa chaste épouse. L'ange cependant ne vint trouver Joseph qu'après que la Vierge eut conçu, pour ne point l'exposer aux pensées et au châtiment de Zacharie, qui se rendit coupable d'infidélité en refusant de croire à la maternité de son épouse si avancée en âge, car il était plus incroyable encore qu'une vierge pût concevoir, qu'une femme parvenue à l'extrême vieillesse.
Saint Jean Chrysostome
Ou bien encore, l'ange apparaît à Joseph lorsque le trouble s'est déjà emparé de son esprit, pour faire éclater davantage la sagesse de cet homme juste, et aussi pour que cette apparition devînt pour lui la preuve de ce qu'il lui annonçait. En effet, lorsqu'il entendait l'ange lui parler de ce qui faisait l'objet de ses pensées les plus intimes, n'avait-il pas une preuve indubitable qu'il était l'envoyé de Dieu, à qui seul il appartient de connaître les secrets des coeurs. La véracité de l'Évangéliste en devient elle-même incontestable, car il nous présente Joseph éprouvant tout ce que tout homme aurait éprouvé à sa place. La Vierge elle-même échappe à tout soupçon déshonorant, puisque nous voyons son époux, malgré ce juste sentiment de jalousie, la recevoir et la garder après qu'elle est devenue mère ; si elle ne fait pas connaître à Joseph ce que l'ange lui avait annoncé, c'est qu'elle présumait qu'elle n'en serait pas crue surtout après les soupçons qu'il nourrissait contre elle. L'ange au contraire vint trouver Marie avant la conception, pour ne point l'exposer aux inquiétudes qu'elle aurait éprouvées si elle n'avait été instruite de ce mystère qu'après son accomplissement, car il fallait que cette mère privilégiée qui avait reçu dans son sein le Créateur de toutes choses, fût inaccessible au trouble et à l'agitation.
Saint Jean Chrysostome
L'ange ne se contente pas de justifier la Vierge de tout commerce criminel, mais il apprend à Joseph que cette conception est toute surnaturelle, et après avoir dissipé ses craintes, il lui inspire la joie par ces paroles :" Ce qui est né en elle, " etc.
La Glose
Naître en elle et naître d'elle sont deux choses différentes : naître d'elle, c'est être mis au jour par elle ; naître en elle, c'est être conçu dans son sein. On peut dire aussi que par suite de la prescience que Dieu, pour qui l'avenir est comme le passé communiquait à l'ange, la naissance était comme accomplie.
Saint Augustin
Mais si le Christ est né de l'Esprit saint, pourquoi est-il écrit : " La sagesse s'est bâtie une demeure ? " (Pv. 9.) On peut faire à cette question une double réponse : premièrement la maison du Christ est son Église, qu'il s'est bâtie par son sang ; en second lieu son corps peut être regardé comme sa maison de même qu'il est appelé son temple. Or l'oeuvre de l'Esprit saint est celle du Fils de Dieu, par suite de l'unité de volonté dans la nature divine ; que le Père agisse, que ce soit le Fils ou l'Esprit saint, c'est toujours la Trinité qui agit, et quelle que soit l'oeuvre faite par l'une des trois personnes, c'est toujours l'oeuvre d'un seul Dieu.
Saint Augustin
Mais pourrons-nous dire cependant que l'Esprit saint est le Père du Christ en tant qu'homme, dans ce sens que l'Esprit saint aurait engendré l'homme comme Dieu le Père a engendré le Verbe ? C'est une telle absurdité, qu'il n'y a pas d'oreilles chrétiennes qui puissent la supporter. Dans quel sens disons-nous donc que le Christ est né de l'Esprit saint, si l'Esprit saint ne l'a point engendré ? Est-ce parce qu'il l'a fait ? Car en tant qu'homme il a été fait, d'après cette parole de l'Apôtre : " Qui a été fait de la race de David, selon la chair. Mais de ce que Dieu a fait le monde, peut-on dire que le monde est fils de Dieu ou qu'il est né de Dieu ? Non sans doute, tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il a été fait, créé ou formé par lui. Lors donc que nous confessons que le Christ est né du Saint-Esprit et de la Vierge Marie, pourquoi ne peut-on pas dire qu'il est le Fils de l'Esprit saint, comme il est le Fils de Marie ? C'est qu'il est impossible d'admettre que tout ce qui tire sa naissance d'une chose doive par là même en être appelé le fils. Car sans m'arrêter à dire qu'un fils naît autrement d'un homme, que ne naissent de lui les cheveux, les poux et les vers (dont aucun sans doute ne pourra être appelé son fils), certainement les hommes qui naissent de l'eau et de l'Esprit saint ne peuvent être appelés les enfants de l'eau, mais les enfants de Dieu leur père, et de l'Église leur mère. C'est ainsi que le Christ est né de l'Esprit saint, et qu'il est appelé non pas le Fils de l'Esprit saint, mais le Fils de Dieu.
21Et elle enfantera un fils, et tu lui donneras pour nom Jésus, car il sauvera son peuple de ses péchés. " 
Saint Jean Chrysostome
Ce que l'ange avait annoncé à Joseph était au-dessus de toute pensée humaine et des lois de la mature ; il en confirme donc la vérité, en ajoutant à la révélation du mystère accompli, la prédiction des grandeurs futures : " Elle enfantera un fils. or Joseph pouvait penser que, puisqu'il avait été étranger à cette conception, il devait l'être désormais aux devoirs de la vie conjugale ; l'ange de dissuade en lui apprenant que s'il n'a pas été nécessaire à la conception, Il le devient pour les soins de la paternité. Car elle enfantera un fils, et alors il sera indispensable à la mère et au fils : à la mère pour défendre son honneur ; au fils, pour être son père nourricier et le faire circoncire. C'est à cette cérémonie de la circoncision que l'ange fait allusion en disant : " Vous l'appellerez Jésus ; " car c'est au moment de la circoncision que le nom est donné aux enfants. 
Saint Jean Chrysostome
Il ne lui dit pas : " Elle vous enfantera un fils, " comme il avait dit à Zacharie : " Voici qu'Elisabeth votre femme vous enfantera un fils. " La femme, en effet, qui conçoit de son mari lui enfante un fils, car l'enfant vient plus de l'homme que de la femme ; mais celle qui conçoit en dehors de l'homme, n'engendre pas l'enfant à son mari, mais à elle-même.
Saint Jean Chrysostome
Ou bien l'ange s'exprime d'une manière générale pour montrer que cet enfant naissait pour le monde entier.
Rabanus Maurus
Il lui dit : " Vous l'appellerez du nom, " et non pas : " Vous lui imposerez le nom, " car ce nom lui a été donné de toute éternité.
Saint Jean Chrysostome
L'ange dévoile tout ce qu'il y avait d'admirable dans cette naissance, puisque c'est Dieu lui-même qui envoie le nom du ciel par le ministère d'un ange, et ce n'est pas un nom quelconque, mais un nom qui est un trésor de biens infinis. Ce nom, Il l'interprète en faisant naître les meilleures espérances et en rendant ainsi plus facile la foi aux choses qu'il annonce, car nous avons une propension naturelle à croire aux espérances qu'on nous donne.
Saint Jérôme
En hébreu le mot Jésus veut dire Sauveur, et c'est l'étymologie de ce nom que l'ange explique en disant : " Il sauvera son peuple de ses péchés. "
Saint Rémi
C'est ainsi qu'il est à la fois le Sauveur de tout l'univers et l'auteur de notre salut. Il sauve non pas les incrédules, mais son peuple, c'est-à-dire ceux qui croient en lui, et il les délivre non pas tant des ennemis visibles que des ennemis invisibles. Il les sauve du péché sans recourir à la force des armes, mais en brisant les liens du péché qui nous retiennent captifs.
Sévérianus
Qu'ils viennent et qu'ils prêtent l'oreille ceux qui demandent quel est celui que Marie a enfanté. C'est celui qui sauvera son peuple, et non le peuple d'un autre. Et de quoi le sauve-t-il ? De ses péchés. Or, qu'il y ait un Dieu qui remette les péchés, si vous ne voulez pas en croire les chrétiens, croyez-en les infidèles ou les Juifs qui disaient : " Personne ne peut remettre les péchés, si ce n'est Dieu. "
22Or tout cela arriva afin que fût accompli ce qu'avait dit le Seigneur par le prophète : 
Saint Rémi
L'Évangéliste a coutume d'appuyer ce qu'il avance sur des témoignages de l'Ancien Testament, et il agit ainsi en faveur des Juifs qui avaient cru en Jésus-Christ et qui pouvaient ainsi reconnaître que tout ce qui avait été prédit sous l'ancienne loi était accompli sous la loi de grâce et de l'Évangile. Mais pourquoi cette manière de s'exprimer : " Tout cela s'est fait, etc., puisqu'il n'a été question que de la conception toute seule ? On peut répondre que l'Évangéliste s'est exprimé de la sorte pour nous apprendre que ces événements existaient dans la prescience de Dieu avant qu'ils fussent accomplis aux yeux des hommes ; ou bien, comme l'Évangéliste racontait l'histoire des événements passés, il a pu dire : " Tout cela s'est fait, " parce que ces événements étaient accomplis alors qu'il écrivait son évangile.
Rabanus Maurus
Ou bien cette expression : " Tout cela a été fait, " veut dire que la Vierge fut fiancée, qu'elle demeura vierge, qu'elle fut trouvée grosse, que ce mystère fut révélé par un ange, afin que ce qui avait été prédit fût accompli. En effet, la prophétie qui prédisait qu'une vierge concevrait et enfanterait n'eût pas été accomplie si elle n'avait été fiancée pour échapper au supplice de la lapidation si l'ange n'avait pas révélé ce secret afin que Joseph pût la recevoir sans crainte et la préserver ainsi du déshonneur d'être renvoyée et du châtiment qui l'attendait. Or, si elle avait été mise à mort avant l'enfantement, que serait devenue cette prophétie : " Elle enfantera un fils ? " Ce sont d'abord les Anges dans leurs chants, ensuite les Apôtres dans leurs prédications, puis les saints martyrs, enfin tous ceux qui croient en lui.
La Glose
Ou bien on peut dire qu'ici la particule afin que n'est pas causative, en ce sens que toutes ces choses auraient été accomplies parce qu'elles avaient été prédites, mais qu'elle exprime la conséquence, comme dans ce passage de la Genèse (Gn 40) : " Il fit attacher le grand pannetier à un gibet, de sorte que l'interprétation du devin fût reconnue vraie, c'est-à-dire que le supplice de cet homme suspendu à un gibet fit ressortir la vérité de l'interprétation. C'est dans ce même seins que nous devons entendre ce passage, c'est-à-dire que la prophétie a été accomplie par le fait qui avait été prédit.
Saint Jean Chrysostome
Ou bien encore l'ange, considérant l'abîme le la divine miséricorde, le renversement des lois de la nature, celui qui était élevé au dessus de tous les êtres créés descendu jusqu'à l'homme, la dernière des créatures intelligentes, exprime toutes ces choses par ces seuls mots : " Tout cela a été accompli, " comme s'il disait : Ne pensez pas que toutes ces choses soient récentes dans le bon vouloir de Dieu, il y a longtemps qu'il les avait décrétées, et l'ange rappelle plus à propos cette prophétie à Joseph qu'à Marie, car il était versé dans la connaissance et la méditation des prophètes. Il avait d'abord appelé la Vierge son épouse, maintenant il lui donne le nom de Vierge avec le prophète, afin qu'ils apprissent de la bouche du prophète lui-même que ce mystère était depuis longtemps dans les desseins de Dieu. Aussi ce n'est pas Isaïe, mais Dieu lui-même qu'il appelle en témoignage de la vérité de ce qu'il annonce, car il ne dit pas : " Pour accomplir ce qui a été dit par Isaïe, " mais ce que le Seigneur a dit par Isaïe.
Saint Jérôme
Le prophète fait précéder sa prédiction de cet exorde : " Dieu lui-même vous donnera un signe ; " il s'agit donc de quelque chose de nouveau et de merveilleux. Mais s'il n'est question que d'une jeune fille ou d'une jeune femme qui doit enfanter, et non d'une vierge, où est le miracle ? puisque ce nom n'indique plus que l'âge et non la virginité. Il est vrai qu'en hébreu c'est le mot Bethula qui signifie vierge, mot qui ne se trouve pas dans cette prophétie ; il est remplacé par le mot halma, que tous les interprètes, à l'exception des Septante, ont traduit par jeune fille. – Or, le mot halma en hébreu a un double sens, car il signifie jeune fille, et qui est cachée. Ainsi il désigne non seulement une jeune fille ou une vierge, mais une vierge cachée qui n'a jamais paru aux regards des hommes, et sur laquelle ses parents veillent avec le plues grand soin. La langue phénicienne, qui tire son origine de l'hébreu, donne aussi au mot halmale sens de vierge ; dans la nôtre, halma signifie sainte. Les Hébreux se servent de mots que l'on retrouve dans presque toutes les langues, et autant que je puis consulter mes souvenirs, je ne me rappelle pas que le mot halma ait été employé une seule fois pour exprimer une femme mariée ; il sert toujours à désigner une vierge, et non pas une vierge quelconque, mais une vierge encore jeune, car il en est d'un âge avancé. Or, celle-ci était encore dans l'âge de l'adolescence, ou bien elle était vierge, tout en ayant dépassé cet âge où l'on n'est pas en état d'être marié.
Saint Jérôme
Le prophète dit : " Elle recevra dans son sein, " tandis que l'Évangéliste saint Matthieu porte : " Elle aura dans son sein ; " mais l'Évangéliste, qui racontait l'histoire de ce qui était passé et non de ce qui devait arriver, a substitué au mot elle recevra le verbe elle aura, car celui qui a n'a plus besoin de recevoir.
Saint Léon le Grand
Il a été conçu du Saint-Esprit dans le sein de la vierge, sa mère, qui l'enfanta comme elle l'avait conçu sans que sa virginité en eût souffert la plus légère atteinte.
Saint Augustin
Celui qui a pu en les touchant rétablir dans leur premier état les membres brisés et séparés les uns des autres, combien plus aura-t-il dû respecter en naissant la pureté qu'il a trouvée dans sa mère ? Aussi cette naissance a-t-elle augmenté sa pureté au lieu de la diminuer, et sa virginité, loin d'en être affaiblie, en reçut un nouvel éclat.
Concile œcuménique
Photin ne voit qu'un homme dans celui qui vient au monde, il prétend que ce n'est pas ici la naissance d'un Dieu, il sépare l'homme de Dieu dans celui qui sort du sein de sa mère ; qu'il nous dise donc comment la nature humaine, qui est née du sein d'une vierge, n'a pas brisé le sceau de la virginité. Jamais la mère d'aucun homme n'est restée vierge après son enfantement ; mais ici c'est le Verbe Dieu qui a daigné naître dans une chair mortelle, et il a montré qu'il était le Verbe tout-puissant en sauvegardant la virginité de sa mère. Notre verbe, à nous, notre parole ne corrompt point notre âme qui l'enfante ; ainsi le Verbe Dieu par cette naissance n'a point porté atteinte à la virginité de celle qu'il avait choisie pour mère.
Saint Jean Chrysostome
C'est la coutume de l'Écriture de présenter les événements sous l'emblème des noms. Ces paroles : " Ils l'appelleront du nom d'Emmanuel " signifient donc : " Ils verront Dieu avec les hommes. " C'est pour cela que l'ange ne dit pas : Vous l'appellerez, mais ils l'appelleront.
Saint Jérôme
Les Septante et trois autres interprètes ont traduit : " Vous l'appellerez, " pour " ils l'appelleront, " qui n'est pas dans l'hébreu, car le mot vekarat, qu'ils ont tous traduit par vous l'appellerez, peut signifier aussi : elle l'appellera, c'est-à-dire que la vierge qui concevra et enfantera le Christ l'appellera elle-même Emmanuel ou Dieu avec nous.
Saint Rémi
A cette question : Qui a donné d'interprétation de ce nom ? est-ce le prophète, est-ce l'Évangéliste ou un traducteur quelconque ? je répondrai d'abord que ce n'est pas le prophète ; ce n'est pas non plus l'Évangéliste, car à quoi bon cette explication, puisqu'il écrivait en hébreu. Peut-être pourrait-on dire que ce nom avait dans l'hébreu une signification obscure, et qu'il avait besoin d'explication. Mais il est plus vraisemblable que cette interprétation a été donnée par quelque traducteur qui aura voulu ainsi faire disparaître ce que ce nom pouvait avoir d'obscur pour les Latins. Or, ce nom exprime parfaitement les deux natures, la nature divine et la nature humaine unies dans la même personne de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui engendré avant tous les siècles d'une manière ineffable par Dieu son père, est devenu à la fin des temps, en naissant d'une vierge, Emmanuel ou Dieu avec nous. Ce nom : Dieu avec nous peut s'entendre en ce sens qu'il est devenu comme un des nôtres, c'est-à-dire passible, mortel, et semblable à nous en toutes choses à l'exception du péché, ou bien encore qu'il a uni à sa nature divine, en unité de personne, notre pauvre nature humaine.
Saint Jérôme
Rappelons ici que les Juifs prétendent que cette prophétie a pour objet Ezéchias, fils d'Achaz, sous le règne duquel fut prise la ville de Samarie, ce font ils ne peuvent donner aucune preuve. En effet, Achaz, fils de Ioathan, régna sur Jérusalem et sur Juda seize ans ; son fils Ezéchias lui succéda à l'âge de vingt-trois ans et régna sur Juda et sur Jérusalem vingt-neuf ans. Comment donc peut-on dire que la prophétie qui fut faite la première année du règne d'Achaz eut pour objet la conception et la naissance d'Ezéchias, qui avait neuf ans lorsque son père monta sur le trône ? Dira-t-on que la sixième année du règne d'Ezéchias, époque où fut prise la ville de Samarie signifie le temps de l'enfance, sinon de son âge, du moins de son règne ? c'est là une supposition violente et forcée, même pour les moins intelligents. Un des nôtres, qui aime à judaïser, prétend que le prophète Isaïe a eu deux fils, Joseph et Emmanuel, et qu'Emmanuel était né de la prophétesse son épouse, comme figure du Seigneur-Sauveur, mais cela n'est qu'une fable.
Pierre Alphonse
Je ne sache pas qu'aucun homme de ce temps ait porté le nom d'Emmanuel. Les juifs me diront peut-être : Comment admettre que cette prophétie ait eu pour objet le Christ et sa mère, alors que d'Achaz à Marie il s'est écoulé plusieurs centaines d'années ? Pierre Alphonse répond : Quoique le prophète s'adresse à Achaz, la prophétie n'a pas seulement pour objet ce prince ou les choses de son temps, car Isaïe ne lui dit pas : " Écoutez Achaz, " mais " Écoutez maison d'Israël. " Voyez encore la suite : " Le Seigneur vous donnera lui-même un signe. " Il ajoute ce mot " lui-même "comme pour dire : ce ne sera pas un autre, d'où il faut conclure que c'est le Seigneur lui-même qui sera ce signe futur. Remarquez enfin qu'en s'exprimant au pluriel, " il vous donnera, " et non " il te donnera, " le prophète fait entendre que cette prophétie n'est pas pour Achaz ou du moins qu'elle n'est pas pour lui seul.
Saint Jérôme
Voici donc le sens de cette prophétie : cet enfant, qui naîtra d'une vierge, maison de David, doit être appelé dès maintenant Emmanuel, parce que, délivrés bientôt des deux rois ennemis qui vous attaquent, vous éprouverez vous-même que Dieu est présent au milieu de vous. Plus tard il sera appelé Jésus ou Sauveur, parce qu'il sauvera le genre humain tout entier. Ne soyez donc pas surprise, ô maison de David, de cette nouveauté si étrange d'une vierge enfantant un Dieu, revêtu d'une si grande puissance, que tant d'années avant sa naissance, il peut vous délivrer si vous avez recours à lui.
Saint Augustin
Qui serait donc assez insensé pour oser dire avec les Manichéens que c'est le caractère d'une foi faible de ne croire en Jésus-Christ que sur témoignages, alors que l'Apôtre lui-même a dit : " Comment croiront-ils en celui dont ils n'ont point entendu parler, et comment en entendront-ils parler si on ne leur prêche ? " Or afin que la prédication des Apôtres ne fût pas exposée au mépris comme un tissu de fables sans réalité, les prophètes lui donnent l'appui de leurs prédictions. En effet, supposez que la prédication des apôtres ne fût autorisée que par des miracles, on n'aurait pas manqué de les attribuer à des opérations magiques, si cette interprétation n'était renversée par le témoignage immuable des prophètes. Personne sans doute n'osera dire qu'il soit au pouvoir d'un homme, longtemps avant sa naissance, de se donner au moyen d'opérations magiques des prophètes qui l'annoncent. De même encore supposons que nous disions à un païen : Croyez en Jésus-Christ parce qu'il est Dieu, et qu'il nous répondît : Pourquoi donc croirai-je ? et qu'alors nous établissions clairement l'autorité des prophètes, s'il persistait encore dans son incrédulité, nous lui démontrerions alors que les prophètes sont dignes de foi par le seul fait qu'ils ont prédit longtemps d'avance des événements dont l'accomplissement s'opère sous nos yeux, car il ne pourrait ignorer, je pense, quelles persécutions la religion chrétienne a eu à souffrir de la part des rois de la terre. Or, qu'il considère maintenant tous ces rois soumis à l'empire du Christ, toutes les nations qui le reconnaissent pour maître, autant d'événements qui ont été tous prédits par les prophètes. En prenant connaissance de ces prophéties et en les voyant accomplies sur toute la face de la terre, il serait certainement déterminé à embrasser la foi.
La Glose
L'Évangéliste combat l'erreur des Manichéens en ajoutant : " Afin que fût accompli ce que le Seigneur avait prédit par le prophète. " Or il y a une prophétie qui a pour cause la prédestination de Dieu, qui doit de toutes manières arriver, dont l'accomplissement est indépendant de notre volonté, comme celle dont il est ici question, et que le prophète commence en disant : " Voici " pour en démontrer la certitude. Il y a une autre sorte de prophétie qui vient également de la prescience de Dieu, mais à laquelle se trouve mêlé notre libre arbitre. D'après cette prophétie, nous obtenons la récompense avec la coopération de la grâce, ou nous sommes soumis au châtiment lorsqu'elle nous abandonne avec justice. Enfin il y a une troisième sorte de prophétie, qui ne vient pas de la prescience de Dieu, mais qui est l'expression d'une menace comme en font les hommes, et telle que celle-ci : " Encore quarante jours et Ninive sera détruite. " Il faut sous-entendre : A moins que Ninive ne se convertisse.
23Voici que la Vierge sera enceinte et enfantera un fils; et on lui donnera pour nom Emmanuel, ce qui se traduit : Dieu avec nous. 24Réveillé de son sommeil, Joseph fit ce que l'ange du Seigneur lui avait commandé : il prit chez lui son épouse. 
Saint Rémi
La vie nous est revenue par la porte qui avait donné passage à la mort : la désobéissance d'Adam nous avait tous perdus, l'obéissance de Joseph commence à nous ramener à notre premier état. En effet, quelle magnifique leçon d'obéissance dans cette conduite de Joseph : " Joseph donc s'étant levé, " etc.
La Glose
Il ne fit pas seulement ce que l'ange lui avait ordonné, il le fit de la manière qu'il lui avait ordonnée. Que celui donc qui reçoit un avertissement du Ciel se lève de son sommeil sans aucun retard et qu'il exécute ce qui lui est commandé.
Saint Jean Chrysostome
Ce n'est pas dans sa maison qu'il la reçut, car il ne l'en avait pas encore renvoyée, mais il la reçut dans son coeur dont il l'avait momentanément bannie. – Remi. Ou bien il la reçut après la célébration des noces, afin qu'elle portât le nom d'épouse, mais non pour avoir comme époux aucune relation avec elle, car voyez la suite : " Et il ne la connut pas, " etc.
Saint Jérôme
Helvidius fait de vains efforts pour prouver que le verbe connaître exprime les relations conjugales plutôt qu'une connaissance ordinaire, mais personne ne soutient le contraire, et il n'y a pas un auteur tant soit peu habile qui s'arrête aux inepties qu'il combat. Il veut encore nous apprendre que l'adverbe jusqu'à ce que signifie un temps déterminé, après lequel ce qui n'existait pas auparavant commencerait à avoir lieu, de manière que ces paroles : " Il ne la connut pas jusqu'à ce qu'elle eût enfanté son fils " signifieraient clairement qu'il eut avec son épouse, après l'enfantement, des rapports qu'il n'avait différés que jusqu'à la naissance de son fils. Pour le prouver il accumule le plus qu'il peut de textes de l'Écriture. Quant à nous, voici notre réponse : Ces paroles : " il ne la connut pas jusqu'à ce que, " etc. peuvent s'entendre de deux manières dans l'Écriture. D'abord il est certain que le verbe connaître qui, comme Helvidius l'avoue, doit s'entendre de l'union conjugale, a quelquefois le sens de connaissance proprement dite, comme dans ce passage : " L'enfant Jésus resta à Jérusalem et ses parents ne le connurent pas ou l'ignorèrent. " De même l'adverbejusqu'à ce que exprime souvent, comme il le reconnaît également, un temps déterminé, mais souvent aussi un temps sans limite, comme dans ce passage d'Isaïe : " Je suis jusqu'à ce que vous parveniez à la vieillesse. " Dira-t-on que Dieu ne sera plus lorsqu'ils auront vieilli ? – Le Sauveur dit aussi dans l'Évangile : " Voici que je suis avec vous jusqu'à la consommation des siècles. " Est-ce qu'il cessera d'être avec ses disciples après la fin du monde ? L'apôtre ne dit-il pas aussi : " Il faut qu'il règne jusqu'à ce qu'il mette ses ennemis sous ses pieds ? " Veut-il dire qu'après que Jésus aura réduit le monde sous son empire, il cessera de régner ? Qu'Helvidius comprenne donc que l'écrivain sacré n'a exprimé que ce qui aurait pu être un sujet de doute s'il ne l'avait écrit, et que le reste est abandonné à notre intelligence. D'après cette règle, l'Évangéliste ne nous indique que ce qui aurait pu donner matière à scandale, c'est-à-dire que son mari ne l'avait pas connue jusqu'à ce qu'elle eût enfanté, nous laissant à conclure qu'à plus forte raison il ne l'avait pas connue après la naissance du Sauveur.
Saint Jean Chrysostome
Si l'on dit de quelqu'un : Tant qu'il a vécu il n'a point tenu ce langage, cela veut-il signifier qu'il l'ait tenu après sa mort ? cela n'est pas possible. Ainsi on aurait pu croire que Joseph avait eu des rapports avec la Vierge avant l'enfantement parce qu'il ne connaissait pas la dignité du mystère qui s'était accompli dans son sein ; mais après qu'il eut appris qu'elle était devenue le sanctuaire du Fils unique de Dieu, comment supposer qu'il ait eu la témérité de profaner un temple aussi auguste ? Les disciples d'Eunomius s'imaginent que parce qu'ils osent le dire, Joseph aurait osé le faire, comme un insensé croit que tout le monde a perdu la raison.
Saint Jérôme
En résumé, je demanderai : Pourquoi Joseph s'est-il abstenu de tout rapport avec son épouse jusqu'à l'enfantement ? C'est parce qu'il avait entendu l'ange lui dire : " Ce qui est né en elle vient de l'Esprit saint, " etc. Celui donc qu'un songe mystérieux avait déterminé à ne pas s'approcher de son épouse, comment, après avoir entendu les bergers, vu les Mages, été témoin de tant de merveilles, aurait-il osé s'approcher du temple de Dieu, du siège de l'Esprit saint, de la Mère de son Seigneur ?
Saint Jean Chrysostome
On peut aussi donner ici au verbe connaître le sens ordinaire de simple connaissance, car en réalité Joseph n'avait pas connu jusque là la dignité de Marie. Ce n'est qu'après son divin enfantement qu'il la connut parfaitement ; c'est alors qu'elle lui devint plus précieuse et plus chère que le monde entier, parce qu'elle avait porté dans l'étroit espace de son sein virginal celui que le monde entier ne peut contenir.
Saint Hilaire
Ou bien encore on peut dire que Joseph ne put connaître la très-sainte vierge Marie avant son enfantement à cause de la gloire dont elle était revêtue ; car comment aurait-il pu connaître celle qui portait dans son sein le Dieu de gloire ? La face de Moïse, qui s'était entretenu avec Dieu, fut si resplendissante de gloire que les Israélites ne pouvaient en soutenir la vue ; à plus forte raison Joseph ne pouvait-il regarder et connaître Marie qui portait dans son sein le Seigneur tout-puissant. Après son enfantement, Joseph la connut par la beauté resplendissante de son visage, et non pas en usant de ses droits d'époux.
Saint Jérôme
De ce que l'Évangéliste dit : " Son fils premier-né, "quelques esprits pervers en concluent qu'elle a eu d'autres enfants, et ils prétendent qu'on ne donne le nom de premier-né qu'à celui qui a des frères, assertion complètement fausse, car l'Écriture appelle premier-né non pas l'aîné d'autres frères, mais celui qui est né le premier.
Saint Jérôme
S'il n'y a de premier-né que lorsqu'il y a d'autres enfants, il faut en conclure que les prémices ou les premiers-nés n'étaient pas dus aux prêtres tant que ces premiers-nés n'avaient pas d'autres frères.
La Glose
Ou bien il est appelé le premier-né entre tous les élus de la grâce, tandis qu'il est proprement le Fils unique de Dieu le Père et de Marie.
La Glose
Ce fut le huitième jour où l'enfant était circoncis et recevait le nom qui lui était destiné.
Saint Rémi
Ce nom a été parfaitement connu des saints patriarches et des prophètes de Dieu, mais il l'a été surtout de celui qui a dit : " Mon âme a défailli dans l'attente de votre salut (Ps.118), et encore : " Mon coeur tressaillera dans votre salut (Ps. 12), et de celui encore qui disait : " Je tressaillerai dans Jésus qui est mon Dieu. on (Habac. 3.)

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