L'Évangile du dimanche avec les Pères - Lc 17, 5-10

La puissance de la foi — L'humilité dans le service (Lc 17, 5-10)

5Et les apôtres dirent au Seigneur : " Augmentez notre foi ! " 6Le Seigneur (leur dit) : " Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à ce mûrier : " Déracine-toi, et replante-toi dans la mer, " et il vous obéirait. 
Théophylactus
Les disciples ayant entendu les enseignements du Seigneur sur des devoirs difficiles, c'est-à-dire sur la pauvreté et la fuite des scandales, lui demandent d'augmenter en eux la foi, qui doit les aider à pratiquer la pauvreté (car rien de plus efficace pour inspirer l'amour de la pauvreté, comme la foi et l'espérance en Dieu), et à résister aux scandales: «Alors les Apôtres dirent au Seigneur: Augmentez-nous la foi».
Saint Grégoire le Grand
Afin que cette foi qu'ils avaient reçue dans son germe, parvînt à la perfection par des accroissements successifs.
Saint Augustin
Par cette foi, qu'ils prient le Sauveur d'augmenter en eux, on peut entendre celle qui nous fait croire ce que nous ne voyons pas; cependant il y a aussi une foi qu'on peut appeler la foi des choses, qui nous porte à croire non seulement aux paroles, mais aux choses présentes, ce qui doit un jour s'accomplir, lorsque la sagesse de Dieu, par laquelle tout a été fait, s'offrira à la contemplation des saints dans tout l'éclat de sa gloire.
Théophylactus
Notre-Seigneur approuve ouvertement leur demande, et les exhorte à croire fermement en leur découvrant toute la puissance de la foi: «Le Seigneur leur dit: Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé», etc. Il y a ici deux prodiges extraordinaires, transporter un arbre enraciné dans la terre, et le planter au milieu de la mer (car que peut-on planter au milieu des flots), et qui tous deux font voir la puissance de la foi.
Saint Jean Chrysostome
Le Sauveur prend pour exemple le grain de sénevé, parce que bien que son volume soit très-petit, il a cependant plus de force que toutes les autres graines, et il veut nous apprendre par là que le plus petit degré de foi, peut opérer de grandes choses. N'allez pas cependant accuser légèrement les Apôtres, de ce qu'ils n'ont point transporté de mûrier, car Notre-Seigneur ne leur a point dit: Vous transporterez, mais: «Vous pourrez transporter». Mais ils ne l'ont point voulu, parce que cela était inutile, puisqu'ils ont opéré de plus grands prodiges.
Saint Jean Chrysostome
Mais comment concilier ces paroles de Jésus-Christ, que le plus petit degré de foi peut transporter un arbre ou une montagne, avec celles où saint Paul déclare que c'est la foi parfaite qui transporte les montagnes? ( 1Co 13,2 ) Nous répondons que l'apôtre saint Paul attribue à la foi parfaite la vertu de transporter les montagnes, non que ce soit le privilège exclusif de la foi parfaite, mais parce qu'il s'adressait à des esprits encore grossiers qui trouvaient ce prodige extraordinaire à cause de la difficulté que présente la masse énorme d'une montagne.
Bède le Vénérable
Ou bien le Seigneur compare ici la foi parfaite à un grain de sénevé, parce qu'elle a peu d'apparence au dehors, et qu'elle déploie toute sa force dans l'intérieur de notre corps. Dans le sens allégorique, le mûrier (dont les fruits et les branches ont la couleur du sang), est la figure de l'Évangile de la croix que la foi des Apôtres a par la prédication arraché du peuple juif, dans lequel il était enraciné comme dans sa terre primitive, pour le transporter et le planter au milieu de la mer des nations.
Saint Ambroise
Ou bien encore, ces paroles signifient la puissance de la foi pour chasser l'esprit immonde, d'autant plus que la nature de cet arbre favorise cette opinion. En effet, le fruit du mûrier est blanc dans sa fleur, il paraît rouge lorsqu'il a pris sa forme, et devient noir lorsqu'il est parvenu à sa maturité. C'est ainsi que le démon, déchu par sa prévarication de la fleur blanche de sa nature angélique, et de son éclatante dignité, est devenu un objet d'horreur par les noires vapeurs qu'exhale son iniquité.
Saint Jean Chrysostome
Il y a encore une autre analogie entre le démon et le mûrier; les vers se nourrissent des feuilles du mûrier, ainsi le démon se sert des pensées qu'il suggère pour nourrir le ver qui ne meurt point, mais la foi peut déraciner de nos âmes ce mûrier et le précipiter dans l'abîme.
7Qui d'entre vous, ayant un serviteur employé comme laboureur ou pâtre, lui dira à son retour des champs : " Vite, viens te mettre à table "? 8Au contraire, ne lui dira-t-il pas : " Prépare-moi à dîner; puis, tu te ceindras et te me serviras jusqu'à ce que j'aie mangé et bu; et après cela, toit, tu mangeras et boiras "? 9Est-ce qu'il a de la reconnaissance à ce serviteur, parce qu'il a fait ce qui a été ordonné? 10De même vous, quand vous aurez fait ce qui vous a été ordonné, dites : " Nous sommes des serviteurs inutiles; nous avons fait ce que nous devions faire. " 
Théophylactus
Comme la foi rend celui qui la possède fidèle observateur des commandements de Dieu, et lui fait opérer des oeuvres vraiment admirables, il semblait qu'elle pouvait exposer l'homme au vice de l'orgueil. Aussi Notre-Seigneur prémunit ses disciples contre ce sentiment d'orgueil qui pouvait naître de leurs vertus, par l'exemple suivant: «Qui de vous, ayant un serviteur attaché au labourage», etc.
Saint Augustin
Ou bien encore, comme la plupart ne comprenaient pas cette foi à la vérité qui devait un jour se découvrir sans nuage, on pourrait croire que Notre-Seigneur ne répond pas directement à la demande de ses disciples. En effet, la suite des paroles du Sauveur se rapporte difficilement à cette prière des Apôtres: «Augmentez en nous la foi», à moins de les entendre dans ce sens, que nous passons d'une foi moins parfaite à une foi parfaite, c'est-à-dire de la foi qui nous fait servir Dieu, à la foi où nous jouissons pleinement de Dieu. La foi s'augmente en effet, lorsqu'après avoir eu pour objet les paroles de la prédication, elle s'étend même aux choses visibles. Mais cette foi contemplative est accompagnée de ce repos ineffable que Dieu nous prépare dans son royaume éternel, et ce repos est la récompense des travaux méritoires qui s'accomplissent dans l'Église. Ainsi, quel que soit le genre de travaux auxquels est appliqué le serviteur, qu'il laboure dans les champs, ou qu'il garde les troupeaux (c'est-à-dire qu'il s'occupe dans cette vie des choses de la terre, ou qu'il soit au service des hommes insensés figurés par les troupeaux), il faut qu'après ces travaux accomplis il rentre à la maison, c'est-à-dire qu'il soit réuni à l'Église.
Bède le Vénérable
Ou bien encore, ce serviteur qui revient des champs, c'est le docteur qui interrompt pour un temps l'oeuvre de la prédication, pour rentrer dans sa conscience et y repasser ses actions et ses paroles. Le Seigneur ne lui dit pas aussitôt: Allez (de cette vie mortelle), et mettez-vous à table, c'est-à-dire, réjouissez-vous dans l'éternel repas de la vie bienheureuse.
Saint Ambroise
En effet, nul ne s'asseoit à ce banquet avant de passer de cette vie à l'autre. Moïse lui-même a dû passer de l'endroit où il était pour être témoin de la grande vision ou Dieu se révélait à lui ( Ex 3,3-5 ). De même donc que vous ne dites pas aussitôt à votre serviteur: Mettez-vous à table, mais que vous exigez de lui auparavant d'autres services; ainsi Dieu ne vous demande pas un seul genre d'oeuvres et de travaux, notre travail ne doit cesser qu'avec notre vie: Est-ce qu'il ne lui dit pas au contraire: «Préparez-moi à souper», etc.
Bède le Vénérable
Dieu commande à ce serviteur de lui préparer à manger, c'est-à-dire qu'après le travail de la prédication publique, il doit se livrer à une humble considération de lui-même; c'est la nourriture que Dieu désire. Se ceindre les reins, c'est, pour une âme humble, relever et resserrer toutes les pensées flottantes qui peuvent entraver notre marche dans la voie des bonnes oeuvres; car on ne serre ses vêtements avec une ceinture que pour n'être point exposé à tomber en marchant. Servir le vrai Dieu, c'est confesser hautement que toute notre force vient du secours de sa grâce.
Saint Augustin
C'est alors que ses ministres le servent, c'est-à-dire qu'ils se livrent à la prédication de l'Évangile, que Dieu boit et mange, pour ainsi dire, la confession et la foi des Gentils.
Bède le Vénérable
«Et après cela tu mangeras et tu boiras», c'est-à-dire: Après que j'aurai goûté avec joie l'oeuvre de votre prédication, et que je me serai rassasié de votre componction comme d'un mets délicieux, alors vous passerez, et vous serez nourri vous-même à jamais de l'aliment éternel de ma sagesse.
Saint Cyrille
Notre-Seigneur nous enseigne ici qu'en vertu du droit de sa puissance souveraine, il exige de ses serviteurs l'obéissance comme une chose qui lui est due: «Aura-t-il de l'obligation à ce serviteur, parce qu'il a fait ce qu'il lui a commandé? Je ne le pense pas.» Quoi de plus propre à guérir la maladie de l'orgueil? Pourquoi vous enorgueillir? Ignorez-vous que si vous ne remplissez pas l'obligation qui vous est imposée, vous vous exposez au danger, et que si vous y êtes fidèle, vous ne faites rien de trop, d'après ces paroles de saint Paul: «Si je prêche l'Évangile, la gloire n'en est point à moi, car c'est pour moi une obligation de le faire, malheur à moi si je ne prêche pas l'Évangile !» ( 1Co 9,16 ) Considérez en effet, que ceux qui exercent l'autorité parmi nous, ne remercient pas leurs serviteurs lorsqu'ils exécutent les ordres qui leur ont été donnés, mais ils cherchent à gagner leur affection à force de bienveillance pour leur inspirer un plus grand zèle dans l'accomplissement de leurs devoirs. Ainsi Dieu nous demande de le servir en vertu de son droit souverain, mais comme il est plein de clémence et de bonté, il promet des honneurs infinis à ceux qui travaillent pour lui, et la grandeur de sa bienveillance est bien supérieure à toutes les fatigues que nous endurons à son service.
Saint Ambroise
Ne vantez donc pas votre mérite lorsque vous avez fidèlement servi, vous n'avez fait que ce que vous deviez faire. Le soleil obéit à Dieu, la lune lui est soumise, les anges exécutent ses ordres; gardons-nous donc de nous louer nous-mêmes, c'est la conclusion que le Sauveur tire lui-même de ce qu'il vient de dire: «De même quand vous aurez fait ce qui vous est commandé, dites: Nous sommes des serviteurs inutiles; nous avons fait ce que nous devions faire».
Bède le Vénérable
Nous sommes des serviteurs, parce que nous avons été rachetés d'un grand prix ( 1Co 7,23 ); nous sommes des serviteurs inutiles, parce que le Seigneur n'a nul besoin de nos biens ( Ps 15,2 ); ou parce que les souffrances de cette vie n'ont aucune proportion avec la gloire future ( Rm 8,18 ). La perfection de la foi pour les chrétiens, consiste donc à reconnaître leur imperfection, alors même qu'ils ont accompli tout ce qui leur est commandé.

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